Modibo Sidibé candidat en 2012 Le Dauphin ou la pâle copie ?

 

Difficile d’être précis sur la forme choisie par l’ancien chef du Gouvernement pour manifester ses intentions de se défaire des charges d’officier général des forces de sécurité, mais les sources convergent toutes vers l’évidence d’une démarche entamée dans ce sens. En clair, l’ex Premier Ministre, qui se trouve encore dans l’expectative d’une suite officielle à ses sollicitations, est visiblement l’auteur d’une demande déposée devant qui de droit, demande précisément intervenue dans l’après-midi du jeudi dernier. Motif évoqué, à en croire les mêmes sources, le vaseux prétexte de s’occuper de la politique.

Mais, dans un contexte où les appels (tant spontanés que suscités) se succèdent en son nom, la démarche du prédécesseur de Mariam Kaïdama Sidibé est à juste raison perçue comme une option définitive pour le starting-block de la redoutable course de Koulouba 2012. Du coup, l’ambiance politique donne l’air de se présenter sous les traits d’une tragédie veille d’une longue décennie, des épisodes à rebondissements vécus avec la candidature d’ATT.

– Le Rubicon par contrainte

En quittant les rênes du Gouvernement, à la faveur du remaniement d’Avril dernier, l’ex Premier Ministre laissait derrière lui un héritage pour le moins alourdi par son passage très mitigé à la Primature. Il traîne notamment, tel un boulet, la responsabilité de la gestion controversée de l’Initiative Riz, un projet ayant manifestement plus contribué à la disette qu’elle n’a comblé les attentes de concitoyens désabusés et contraints à la consommation de céréale importée, nonobstant les dizaines de milliards consentis à la production nationale.  Et par delà ce legs peu enviable, la goutte d’eau ayant débordé le vase – et terni pour de bon ses rapports avec son employeur – aura sans doute été le sulfureux pot-aux-roses de  »l’Uranium de Faléya ».

À cette supercherie mise à nu lors du passage de députés verts de l’Union Européenne au Mali il faut ajouter, par ailleurs, les insatisfactions liées à la gestion calamiteuse et peu élogieuse de grands dossiers comme l’école, la corruption, le front social, entre autres. Mais en dépit de toutes ces zones d’ombre et points noirs de son passage à la Primature, l’insistance par laquelle Modibo Sidibé tente de se forger un destin présidentiel laisse tout de même persister quelques équivoques sur la teneur de ses rapports avec Amadou Toumani Touré. Dans l’imaginaire de nombreux observateurs, en effet, il passe pour le dauphin de celui avec qui il a effectué un cheminement long d’une vingtaine d’années environ. Difficile de le confirmer par un indice autre que les seules supputations et le flou intentionnellement entretenu autour de la question, mais à défaut d’être le dauphin de l’ancien président du CTSP, l’ex Premier Ministre se complaît pour le moins dans le statut de pâle copie de son ancien employeur – dont il imite tant bien que mal le parcours et la méthode.

Ainsi, comme celle d’ATT en 2002, la candidature de Modibo Sidibé s’annonce sur fond de plausible polémique autour au créneau utilisé pour se défaire du gênant statut d’officier supérieur. En effet, selon les dispositions constitutionnelles encore en vigueur au Mali, tout membre des forces armées et de sécurité désireux de briguer la magistrature suprême est tenu de démissionner six mois au moins avant le scrutin. Ladite disposition prête visiblement à confusion parce qu’elle ne tient pas compte de son application aux officiers généraux, une catégorie jamais admise à la démission du moins pour les forces armées. C’est du reste la raison pour laquelle, le locataire actuel de Koulouba avait fait usage du créneau de la disponibilité suscitant en son temps tant de polémique et d’exercice d’interprétation quant à sa présidentiabilité.   

À la différence du héros du 26 Mars, celui de l’Initiative Riz, à deux doigts seulement de l’échéance butoir, aurait pour sa part opté pour une anticipation de retraite professionnelle, un créneau qui prête tout aussi à confusion que celui jadis utilisé par son ancien employeur.  Il ne parait toutefois point évident que les potentiels adversaires politiques en fassent le même un cheval de bataille qu’en 2002 tout au moins parce qu’une candidature de Modibo Sidibé à la présidentielle de 2012 s’apparente plus à un Rubicon franchi  par contrainte qu’une option de raison, un passage en force fort probablement par le besoin de paravent politique contre la dé-protection gouvernementale.                                  

– Sur les traces du frère aîné ?

Considéré sous ce prisme, la démarche de l’ancien Premier Ministre, toutes proportions gardées, est comparable avec celle de son frère aîné, Mandé Sidibé, qui s’était également illustré par un même passage en force quelque peu similaire en 2002. Comme le défunt ancien PM d’Alpha O. Konaré, l’ex-chef du Gouvernement d’ATT a également choisi de braver les obstacles du vide partisan et continue de persister en dépit des vaines tentatives de s’imposer comme porte-étendard du parti de son frère aîné.  Faute de quoi, sa candidature ne peut reposer sur une assise autre que les clubs de soutien, des structures assez peu viables pour ne pas pouvoir assurer un résultat à la hauteur de l’audace.

Le mentor des Faso Den Nyuman, entre autres, pourrait tout aussi bien compter sur l’apport de présumés adeptes tapis dans certaines grandes formations politiques, mais aux proportions parait très peu redoutables, à en juger par le plébiscite manifesté en faveur du candidat du PASJ et celle en voie de l’être pour celui de l’URD. Au demeurant, les enseignements tirés de l’expérience vécue par la classe politique pendant dix années d’ATT ne milite point en faveur d’une candidature colmatée de la façon.

Ainsi, à défaut d’être une copie conforme du président sortant ou le successeur que celui-ci s’est volontairement choisi, Modibo Sidibé risque de ne s’en sortir qu’avec une performance électorale aussi maigre que celle engrangée par son frère aîné en 2012. En dépit même du fait qu’il puisse se prévaloir  d’une nette avance financière déjà visible à l’importance de la manne déjà investie dans la logistique, les gadgets et l’organisation de la sa campagne.

A Keïta

Aurore 12/09/2011