Campagne Institut PANOS Défi de la jeunesse Penser à des politiques plus réalistes

Ce défi majeur sera pris en compte dans la troisième génération de CSCRP 2012- 2017,  un nouveau cadre fédérateur des politiques et stratégies en cours  d’élaboration.

Pour une jeunesse valorisée

Le défi de la jeunesse n’est pas séparé du défi majeur qu’est celui de la croissance démographique. Pour corroborer cela, Adama Barry, expert Développement Durable à la Cellule Technique Cadre Stratégique pour la Lutte contre la Pauvreté (CT-CSLP), a fait une précision de taille : « Nous ne dissocions pas les composants défis  démographique et jeunesse. Parce que chaque fois qu’on observe une augmentation de la population malienne, le nombre de jeunes  va accroitre. En effet, il y aura des forces vives à  encadrer et exploiter de manière rentable ».

Ici, l’expert met l’accent sur la valorisation qui, de l’avis des têtes éclairées, doit pallier le manque de ressources humaines qualifiées dans les filières porteuses, notamment celles qui constituent le premier atout du Mali capable de devenir à moyen terme une puissance agricole (au sens large : agriculture, élevage, sylviculture, pêche, industries agro-alimentaires…).

Pour parvenir à cette jeunesse valorisée, il préconise la mise sur pied de véritables politiques et stratégies qui, selon lui, vont au-delà du verbe c’est-à-dire les grands discours ne collant guère aux réalités sur le terrain de l’emploi-jeunes.  En plus, Adama Barry a insisté sur le renforcement des capacités d’intervention de l’Agence Nationale pour l’Emploi (ANPE) et l’Agence de Promotion de l’Emploi des Jeunes (APEJ).

Dans le cadre de la promotion de l’emploi des jeunes, plusieurs milliers de volontaires ont été placés en stage dans les services publics. Cependant, le secteur primaire continue d’être le plus grand pourvoyeur d’emplois avec 83,4% des actifs occupés alors que les secteurs secondaire et tertiaire emploient respectivement 4,1% et 12,5%. La situation de l’emploi au Mali demeure particulièrement préoccupante.

La forte croissance démographique (environ 2,2% par an) accélère l’afflux de jeunes sur le marché du travail pendant que l’urbanisation croissante alimentée par l’exode rural et le retour d’émigrés crée une forte demande pour  l’emploi.

Créer des emplois durables

L’axe d’intervention prioritaire retenu en matière d’emploi est l’adéquation entre formation et exigences du marché de l’emploi, la mise en place d’un cadre favorable à la création d’emploi et enfin la sécurisation des emplois. La création d’emplois favorisera la promotion de l’emploi local à travers la décentralisation, la mise en œuvre des travaux à haute intensité de main d’œuvre à travers les grands projets et le développement des  Petites et Moyennes Entreprises  et Petites Moyennes Industries (PME/PMI).

Un accent particulier doit être  mis à la formation professionnelle et technique. Le Projet Emploi Jeunes (PEJ) qui est en place doit renforcer l’apprentissage et les stages de qualification, le développement de l’entreprenariat des jeunes et l’accès des jeunes promoteurs d’entreprises au crédit.

A ce sujet, Djembéré Alamir Touré, membre du Conseil National de la Société Civile, pense que la politique de l’emploi ne doit pas se limiter à l’approche de l’APEJ qui, selon lui,  engendre  des chômeurs  au fil des ans à travers son programme de 2000 jeunes volontaires. En ce sens que les jeunes qui effectuent  le stage d’un an  dans un service public, une collectivité décentralisée ou dans une ONG, se retrouvent très souvent sur le  « marché » du chômage. Conséquence : on a du mal à assurer la sécurisation des emplois.

Face à cette triste réalité, l’acteur non étatique suggère aux décideurs d’investir dans le secteur productif. Ce qui doit être axé sur la  Politique Nationale de l’Emploi et de la Formation Professionnelle.

Pour rappel, l’objectif à atteindre à travers la Politique Nationale de l’Emploi est de trouver des réponses à la sécurisation des emplois, la réduction du chômage et du sous-emploi, l’adaptation de la formation aux besoins du marché, l’amélioration des conditions du travail.  Pour y parvenir, la stratégie à mettre en œuvre dans le cadre du CSRP est bâtie autour de la création d’un cadre juridique favorable à la promotion du secteur privé. Cette stratégie doit être accompagnée par les mesures relatives à la poursuite du développement des PME/PMI,  le développement du financement de proximité,  le renforcement et l’amélioration de la formation professionnelle et technique, le développement du marché de services privés d’appui aux entrepreneurs et l’organisation du secteur informel.

Bras formés en crise de financement

Certes, des jeunes  talents ont bénéficié de diverses sessions de formation, mais ils restent confrontés aux difficultés de financement. Toutes choses qui douchent leurs ardeurs  en matière d’autopromotion.  Cela s’observe au niveau des bras formés évoluant dans le commerce du détail.  Selon Harber Maïga, vice-président de la Coordination des Associations et Groupements de Commerçants Détaillants du Mali, le commerce du détail  est une activité lucrative qui occupe des milliers de jeunes souffrant des affres de la précarité et du manque d’emplois. « C’est l’une des activités les plus privilégies. Conscient de cela, l’Etat a mis en place le Projet d’Appui aux Commerçants Détaillants du Mali ». Mais, a-t-il dit, l’Etat reste le seul bailleur de fonds, ce qui constitue pour lui un problème, car le financement n’est pas assuré à hauteur de souhait.  Avant de regretter que les résultats soient catastrophiques après la mise en œuvre du Programme de renforcement des capacités des commerçants financé par la Coopération Belge avec un coût de 600 millions. Harber Maïga a argué qu’environ 500 détaillants ont été formés  sans bénéficier de financement.  Sous le soleil,  ils attendent toujours   le plateau d’argent pour  le démarrage de leurs projets.

Le marché du travail est profondément déséquilibré. De nombreux actifs dans le secteur rural ne sont pas occupés à plein temps. Le secteur formel, public ou privé, occupe moins de 2% de la population active et fournit peu de nouveaux emplois chaque année.   

En tous les cas, Sékouba Diarra Coordinateur de la Cellule Technique CSLP, s’est  appesanti sur l’adéquation formation-emploi et  la formation professionnelle axée sur le secteur agricole pour apporter une alternative crédible à la problématique de l’emploi des jeunes.

Mahamane Maïga

Le Scorpion 14/07/2011