L’ADEMA-PASJ et la présidentielle de 2012 : Primaires test grandeur nature

En effet, cette situation au sein de la Ruche, au moment même où le parti s’apprête dans quelques jours, précisément la période du 14 au 31 janvier 2011, à ouvrir la compétition pour la désignation de celui qui sera le porte-étendard des abeilles dans la course pour le Palais de Koulouba en avril-mai 2012, suscite des inquiétudes chez les adémistes. Certains de se poser déjà  des questions. La déchirure est-elle inévitable ? Les différents prétendants à la candidature pour la présidentielle de 2012 accepteront-ils de se plier au choix rendu par les primaires ? Telles sont, entre autres questions, les inquiétudes qui taraudent les esprits. Inquiétudes et  interrogations qui, évidemment, se justifient par les scénarios de 2002 et de 2007.

Rappelons à cet effet que la course à la présidentielle de 2002 avait trop joué avec les nerfs au sein du parti rouge et blanc au point de provoquer des batailles de tranchées dans le cadre généralisé de guerre fratricide. Les joutes pour les primaires furent en effet lancées sur un fond de polémique et d’instabilité politique au sein de l’Adéma-Pasj qui mit du temps à se trouver un candidat unanimement accepté car celle de Soumaila Cissé, grand vainqueur des primaires, sera combattue de  l’intérieur avec une virulence quasi extrême. On connaît la suite.

En 2006, quand l’Adéma décide de soutenir la « candidature probable » du président sortant Amadou Toumani Touré à l’élection présidentielle  de 2007, Soumeylou Boubèye Maïga annonce son souhait de se présenter et fonde l’association « Convergence 2007 » qui regroupe les Associations des Amis de Soumeylou Boubèye Maiga (ASMA). Ce comportement de l’ancien Directeur de la SE et non moins ancien ministre de la défense sera jugé politiquement indiscipliné par le comité exécutif du parti ; ce qui lui vaudra d’être exclu des rangs de la formation lors de la conférence nationale des 24 et 25 février 2007.

Soumeylou faisait alors valoir qu’un parti digne de ce nom, de surcroît l’Adema-Pasj qui a remporté les premières élections pluralistes du Mali d’après-26 mars (tant pour les législatives que pour la présidentielle), a vocation à conquérir le pouvoir pour mettre en application son projet de société et non à se contenter d’accompagner un indépendant, fût-il le héros du 26 mars ! Il ne fera pas que de la figuration puisqu’au premier tour de l’élection présidentielle, le 29 avril, il arrivera en 6e position avec 1,46 % des voix.

Même si le président sortant, Amadou Toumani Touré, est réélu, le score réalisé par Soumeylou apparut honorable. Sacrifiant toujours à sa logique, l’ancien ministre de la défense ne baisse pas les bras. Avec les autres candidats de l’opposition regroupés au sein du Front pour la Démocratie et la République (Fdr) comme Ibrahim Boubacar Keïta, Mamadou Bakary Sangaré et Tiébilé Dramé, Soumeylou conteste les résultats du scrutin qu’il juge entaché de fraudes et dépose un recours devant la Cour constitutionnelle qui le rejette.

L’ombre du passé

La Ruche ne semble pas avoir encore soldé toutes les situations nées en 2002 en son sein. L’on constate, en effet, moult luttes de jactance sur fond de positionnement pour la prochaine présidentielle. Tout se passe comme si les leçons du passé ont été apprises mais non assimilées. L’ombre d’hier plane tant sur les plans de bataille pour demain au point que nul ne peut jurer que le parti de l’abeille solitaire pourra faire l’économie des déchirements qui profilent déjà à l’horizon. L’Adema-Pasj, doit-on aujourd’hui se demander, a-t-elle grandi depuis qu’elle a exercé le pouvoir ? Le parti résistera-t-il aux épreuves du temps en gérant toujours ses échéances par des divisions internes ? Difficile de répondre aux différentes questions pour l’heure.

Mais l’on peut légitimement se poser aujourd’hui des questions sur la maturité politique des cadres de la Ruche, voire sur leur loyauté vis-à-vis d’eux-mêmes et vis-à-vis de leurs militants. Pourtant, le parti regorge de têtes politiques valables parce que suffisamment aguerries. Des hommes comme Pr. Ali Nouhoum Diallo sont trop agrippés sur les principes pour se laisser manipuler pour des convoitises opportunistes. Mais combien peuvent encore résister à l’appel des sirènes des tentations multiformes et globales ?

L’on entend déjà dire que le parti rouge et blanc doit aller au bout de son soutien à Amadou Toumani Touré en ne s’opposant nullement à l’avenir politique qu’il aura tracé pour lui-même et pour son camp. En clair, l’Adéma-Pasj doit s’efforcer de sentir les souffles (son inspiration et son expiration) de l’actuel président de la République, c’est-à-dire prendre garde de ne pas contrarier ses plans. Comme Ali Nouhoum Diallo, Pr. Dioncounda Traoré ne voit pas son parti souscrire à la volonté d’ATT. Il l’a dit haut et fort, et il ne ménage point son énergie pour que l’Adéma-Pasj joue sa propre partition dans toutes les échéances à venir. Mais les candidatures, sérieuses ou farfelues quant à la présidentielle de 2O12, font surface déjà. On sait néanmoins que toutes ne sont pas libres des pesanteurs de Koulouba. Celles-ci ne se feront donc pas prier pour affaiblir le futur candidat du Pasj.

En somme, pour la course au choix du candidat pour la présidentielle de 2012, il est reproché au Pr. Dioncounda Traoré de vouloir emboiter les pas à Boubèye en commanditant la création des associations pour soutenir sa candidature. Reproche justifié par le lancement, le dimanche 09 janvier 2011 à Bougouni, des activités de la Coordination des forces vives pour le soutien à la candidature du Professeur Dioncounda Traoré (CFSDT). Ce mouvement, aux dires de son Président, Issa Mariko, regroupe des dizaines d’associations à travers le Mali. Il a pour objectif principal, la mobilisation et la sensibilisation des Maliennes et Maliens pour le soutien à la candidature du Professeur Dioncounda Traoré pour l’élection présidentielle de 2012 en vue de lui assurer une victoire éclatante et sans bavure.

Pires sourds

Il est reproché  à un autre prétendant, Ibrahima N’diaye dit Iba, de commanditer des articles de presse qui le présentent comme le candidat idéal de l’ADEMA à la présidentielle de 2012.

Quant à  Sékou Diakité, un autre haut cadre de la Ruche et non moins ministre du développement social, de la solidarité et des personnes âgées, ses ambitions sont à peine dévoilées qu’il fait l’objet de virulentes attaques dans la presse. L’on comprend qu’il crie à un complot politique concernant les campagnes médiatiques qui lui reprochent d’avoir passé un marché douteux pour l’acquisition d’un serveur informatique pour le compte de l’Assurance maladie obligatoire et le Régime d’assistance médicale.

Selon les défenseurs du ministre, cette campagne médiatique qui risque de tenir en haleine le landerneau politique pour de longues semaines, procède d’un plan mûrement et minutieusement élaboré. Avec comme objectif principal : la mise à mort préventive d’un adversaire potentiellement dangereux à la course pour la présidentielle de 2012. Ce qui reste à prouver. Le ministre Diakité a lui-même déclaré lors de sa conférence de presse : « Je ne serai l’agneau sacrificiel de personne ». C’est pour dire que le ministre s’inscrit dans la même logique d’une manœuvre politique orchestrée contre sa personne.

Les principaux candidats surprendront-ils les sceptiques en créant la cohésion au sortir des primaires qui   le choix du candidat pour la grande joie du peuple Adema ? Dans tous les cas, la cohésion y va pour la survie de la Ruche qui, en cas d’une nouvelle fissure, survivra difficilement tant les lambeaux seront difficiles à coller. Conscients de cela, certains militants, soucieux de l’avenir du parti historique, commencent à lancer des cris de cœur.

N’tji Coulibaly, militant Adema en commune III du District de Bamako écrivait dans les colonnes du journal «Le Prétoire » : «…je lance un cri du cœur à tous les leaders de l’Adema et particulièrement au Comité Exécutif afin qu’en marge des critères qui vont être adoptés, qu’il soit joint un code de bonne conduite auquel vont adhérer tous les candidats et membres du CE. Ce code mentionnera, entre autres, l’obligation de mener non seulement une campagne interne civilisée, mais également, celui de respecter le choix final opéré par un soutien franc et ferme à l’heureux candidat retenu… ». Reste à espérer qu’il ne parle pas à ceux qui ne veulent pas entendre. Pires sourds.

Moussa Touré.

Le National 55 14/01/2011