FSD-COFOP-ADEMA Association Une alliance dos au mur ?

La grande marche populaire de protestation et de résistance contre ceux qu’ils ont appelé « la répression, la violation de la Constitution, les dérives anti-démocratiques et autocratiques, les projets de découpage territorial et de déstabilisation du Mali et l’insécurité », initiée par les responsables du Front pour la Sauvegarde de la Démocratie (FSD), de la Coalition des Forces Patriotes (COFOP) et de l’ADEMA-Association pour le samedi 8 décembre a été finalement empêchée suite à une décision d’interdiction du gouverneur du District de toutes manifestations et activités politiques dans certaines parties sensibles de la ville de Bamako. Comme conséquences, il y a eu quelques échauffourées entre manifestants et forces de l’ordre.
Les responsables du Front pour la Sauvegarde de la Démocratie (FSD), de la Coalition des Forces Patriotes (COFOP) et de l’ADEMA-Association entendaient ainsi protester contre la répression sur fond de violences policières de leur meeting du 16 novembre dernier, mais aussi dénoncer certaines situations comme la dégradation de la situation au centre du Mali ; la division et à la déstabilisation du pays par les projets de « découpage territorial » ; la cherté de la vie et les difficultés financières de l’Etat ; l’incapacité des autorités à relever les défis ; l’insouciance d’Etat… Une marche qu’ils voulaient inclusive et qui s’annonçait redoutable, comme nous l’avions souligné dans nos précédentes éditions, compte tenu de leur détermination à braver l’interdiction du gouverneur, et aussi du fait que nul ne savait quelle allait être la réaction du gouvernement face à ladite marche. C’est donc voyant de risques réels de débordement, voire d’affrontements entre maliens que le Cardinal Jean Zerbo et le guide d’Ançardine, Chérif Ousmane Madani Haidara, en compagnie des représentants des familles fondatrices de Bamako avaient rencontré Soumaila Cissé pour lui faire part de leur souci d’apaisement de la situation, notamment sur le plan politique, seul gage, pour eux, de faire face aux périls qui planent sur notre pays. Ainsi souhaitaient-ils que Soumaila Cissé et ses partisans annulent leur marche du 8 décembre. Une demande rejetée ! Dès lors, il fallait s’attendre à ce que les choses tournent au vinaigre. Ainsi les quelques manifestants qui ont voulu forcer les barrages mis en place par les forces de l’ordre ont été gazés et tabassés.
Quelle marge de manœuvre pour l’alliance ?
En attendant la réaction des responsables des alliés de l’opposition, tout semble indiquer qu’ils ne disposent plus d’une grande marge de manœuvre pour la poursuite de leurs actions, le gouvernement ayant décidé de s’assumer, quoiqu’il advienne, pour mettre fin à une longue série de manifestations et de perturbations à Bamako, surtout que nous sommes dans une situation particulière, l’état d’urgence oblige ! Une situation qui inquiète beaucoup de nos compatriotes qui pensent que l’état d’urgence ne devrait pas justifier la confiscation des libertés démocratiques. Surtout que pour beaucoup, le principe de l’état d’urgence n’est généralement pas sorti par le régime que pour empêcher ses opposants de s’exprimer. Sur ce registre, la CNDH s’insurge contre l’arrêté n°57/GDB.CAB du 04 décembre 2018 du Gouverneur du District de Bamako interdisant les manifestations publiques sur certains lieux et itinéraires, tout en rappelant que la liberté de manifester pacifiquement sans troubler l’ordre public participe à l’exercice démocratique et constitue un droit fondamental des Droits de l’Homme. Pour la CHDH, il résulte de cette décision que même en période d’état d’urgence, toute restriction à ces Droits de l’Homme doit satisfaire les conditions de nécessité et de proportionnalité. Or, regrette la CNDH, jusqu’ici, les interdictions de manifestations publiques ont davantage généré de troubles qu’elles n’ont contribué à les prévenir.
En conséquence, la CNDH : condamne toute violation du droit à la liberté de manifester ;  appelle le Gouvernement à l’observance de ce droit constitutionnel ; invite les forces politiques et les organisations de la société civile désireuses d’entreprendre des manifestations publiques dans les zones et itinéraires concernés à inscrire leurs actes dans la légalité, en usant plutôt des voies de recours prévues par la réglementation en vigueur ; exhorte l’ensemble des forces vives à créer et maintenir un climat politique apaisé dans l’intérêt supérieur de la nation malienne. Cela, pour la simple raison que la prévention des troubles, porteurs de violations des droits humains, est une responsabilité partagée.
En définitive, si les leaders de l’alliance FSD-COFOP-ADEMA Association devraient camper sur leur position, et pareillement pour le gouvernement, on va forcement assister à une dégradation continue du climat politique déjà tendu, toute chose qui va davantage desservir le Mali. Aussi, il serait souhaitable que les deux camps d’en face mettent la balle à terre et fassent des concessions, de part et d’autre, pour essayer de dépasser ce cap. A défaut, le Président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita, doit reprendre les choses en main et s’ériger en médiateur national pour une réelle décrispation politique. Surtout que le camp d’en face a déjà fait savoir qu’il est ouvert au dialogue. Qu’est-ce qui empêche donc le capitaine du bateau Mali d’agir et de faire en sorte que notre pays ne chavire pas ?
Salif Diallo