Chine Populaire: A l’avant-garde du progrès

Depuis les années 1980, l’homme fort du pays à l’époque, Deng Xiao Ping, avait exhorté ses compatriotes à « s’enrichir et à s’ouvrir au monde ». Du coup,  la Chine s’était fixé une ambition : supplanter le Japon et les deux Corées, et dans dix ou quinze ans, « manger les Etats-Unis et l’Europe ».

Une agriculture à multiples histoires !

De l’an 1100 à l’an 1 600, les cultures vivrières traditionnelles suffisaient  à nourrir la population. Les parcelles cultivées produisaient deux récoltes par an. Mais entre le 17è et la fin du 18è siècle, la famine chassa les paysans de leurs fiefs agricoles ; et ils furent sauvés de justesse par des cultures (autres que leur riz) importés du Nouveau Monde. C’est ainsi que le maïs américain fit son entrée en Chine dès l’an 1550. Et à la fin du 19è siècle, les patates douces et autres tubercules et produits maraîchers envahirent les terres chinoises. En 1 900 déjà, la Chine en devint le plus grand producteur mondial : 95% de la nourriture chinoise reste encore d’origine végétale.

Chaque région était régie par une élite agricole représentant le pouvoir impérial. Aussi, le moindre délit des paysans était sauvagement réprimé ; mais en cas de disette, ledit pouvoir venait à la rescousse des populations. Mais l’accélération démographique entraîna une migration monstre des populations et une exploitation féroce des plaines, des montagnes et même des steppes les plus arides.

L’impact démographique et dynastique !

Dès 1 770 déjà, le nombre des Chinois avait déjà atteint…130 millions d’âmes ! En 1850, ils étaient 450 millions ; et en 2007, ils sont au nombre de…1,3 milliards ! Cette démographie fulgurante contraint l’Etat à instaurer, en 2007, un diktat à ne pas violer : désormais, chaque couple n’aura droit qu’à…un seul enfant. En fait, cette démographie « séculaire » a été favorisée par l’irruption (après la dynastie des Ming)  des conquérants Ching de Mandchourie qui avaient accumulé deux siècles de domination sur la Chine !

D’ailleurs, le Tibet et Taïwan étaient les seules provinces à ne pas avoir subi ni leur autorité, ni même celle des dynasties successives. L’empereur Ching chassa les paysans autochtones et les remplaça par des étrangers avides de terre et de culture. Ensuite, pour détourner l’attention des populations, les seigneurs Ching incitèrent les paysans à accuser ces étrangers comme étant responsables de la crise sociale qui s’annonçait. Et pourtant, les Ching étaient eux-mêmes des étrangers, des usurpateurs de surcroît. C’est cette crise sociale qui entraîna de vastes mouvements de révoltes paysannes qui balayèrent peu à peu l’avènement du socialisme maoïste.

Le « big bang » économique !

Du temps de Mao Tsé  Toung, faire du commerce, même dérisoire, était passible…de mort sans jugement. Mais de nos jours, le buste sculpté de Mao est lui-même bradé au marché noir : c’est tout dire…L’histoire de Mao est indissociable de celle de la Chine, certes, mais elle n’empêche pas les Chinois de chercher aujourd’hui à « rattraper le temps perdu » tout en « tirant le bon grain de l’ivraie » communiste. Le véritable changement d’alliance entre le parti communiste et le peuple s’est opéré en 1990. En effet, c’est à partir de cette date que les Chinois ont commencé à obtenir la liberté de « sortir » (d’aller à l’extérieur) et d’exercer  des activités libérales à l’étranger, surtout en Afrique.

Grâce au feu vert du parti, et surtout du Président réformateur Deng Xiao Ping (très coriace dans ses prises de décision) plus rien ne s’oppose à la frénésie progressiste des entrepreneurs chinois. Dès lors, toutes les initiatives économiques, culturelles, agricoles ou autres sont fortement encouragées avec, à la clé, des slogans du parti, bien sûr. Aussi, les initiateurs en étaient reconnaissants au Président,  eux qui injectaient très souvent de l’argent dans le parti en signe d’allégeance et de gratitude. Ainsi, aussi bien les entrepreneurs privés que l’économie du marché sont admis dans le parti. En fait, l’actuelle politique communiste chinoise consiste à changer la méthode de distribution des richesses : le développement économique doit se substituer à la « lutte des classes » prônée par Mao Tsé Toung.

« Pour arriver au communisme, il faut d’abord commencer par le supprimer », déclarait l’ancien Président Deng Xiao Ping : il savait de quoi il parlait pour avoir connu très jeune la prison, le bannissement et son éviction du parti sous le règne de Mao. Et Deng Xiao Ping, d’ajouter : « Toute méthode est neutre. Tout dépend du système dans lequel on l’applique ». Sa déclaration après le massacre des étudiants de Tienanmen le 4 juin 1989 s’inscrivait dans le même ordre d’idée : « S’il faut tuer 200 personnes pour sauver 220 ans de paix, cela en vaut la peine » c’est dire que pour l’ex-premier des Chinois, « peu importe que le chat soit noir ou gris, l’essentiel est qu’il attrape la souris ».

Les comités de quartiers du temps de Mao Tsé Toung  avaient ainsi cédé la place aux comités des…propriétaires immobiliers. Dans toutes les sociétés, le culte de la solidarité est loué et pratiqué. Le slogan en vogue : « Plongez-vous dans votre méthode de travail, et vous découvrirez une nouvelle vie ! ».  On aide ainsi les meilleurs employés à se perfectionner : cours du soir, recherche et équipement de leurs logements, etc. Et le tout est pris en charge par l’entreprise contre remboursement par tranches. La seule la menace qui plane, c’est que l’éventualité d’une grève et la notion de syndicat ne sont pas envisagées parce que tout simplement ignorées.

Une société de pointe, décidée à tout réussir !

La société TCL est la branche chinoise Thompson de la télévision et de la téléphonie mobile. Première multinationale « rouge » créée en 1981, elle fabrique plus de 4 000 téléviseurs par jour ! Son PDG, affectueusement appelé Monsieur Li, siège au parti en dépit de son jeune âge (48 ans). C’est l’un des hommes les plus influents de la planète. En 1997, l’Etat l’a laissé gérer l’entreprise, avec des objectifs à atteindre. S’il échoue, il paye une amende. Telle est la politique de production initiée par l’Etat et applicable à tout entrepreneur de ce gabarit. Si TCL réussit le pari de la conquête du monde, les autres entreprises seront « privatisées ». Encore faut-il que le mot soit juste, le parti ayant toujours l’œil et son mot à dire sur sa gestion.

A TCL, les objectifs sont affichés au tableau que les travailleurs doivent atteindre sous peine d’être virés. Pour payer leur loyer, 10 euros sont mensuellement défalqués sur leurs salaires. Des recruteurs de TCL écument les campagnes à la recherche d’ouvrières : des filles de 18 à 20 ans qui gagnent ainsi 1 000 euros par mois. De nos jours, les grandes sociétés chinoises se livrent une bataille féroce pour le recrutement des élites au sein des universités, souvent un à deux ans avant la fin de leurs études. L’Etat s’étant presque désengagé de ce domaine, presque tous les établissements scolaires (l’éducation en général) sont financés par les multinationales chinoises.

Le boum culturel !

Il y a 44 ans, une fille pouvait être arrêtée et molestée par les Gardes rouges pour avoir osé…être belle, même naturellement. Maquillages et cheveux teintés étaient interdits ! Il y 11 ans, encore, un concours de beauté était impensable voir impossible en Chine. Aujourd’hui, cela se fait bel et bien et même sous l’œil indulgent et bienveillant des dignitaires du régime. A Pékin et Changhaï, il existe des concours dits « Miss Bistouri » Pour avoir le droit d’y participer, les candidates se soumettent à des douloureuses opérations chirurgicales : élongation des jambes, remodelage du visage, de la poitrine, des seins, des hanches…Le coût de l’opération variant entre 800 et 2 000 euros, les cliniques spécialisées dans ce genre d’opération engrangent ainsi un pactole de plus de 3 milliards d’euros par an (ces chiffres datent de 2007) ! Mais pour ces jeunes chinoises, aucune torture physique n’est assez coûteuse face à cette obsession de ressembler à une occidentale !

Ainsi, au pays du « Grand Timonier » (Mao Tsé Toung) la langue de l’Oncle Sam (l’anglais américain) est devenue une véritable vogue, voire une folie : en 2007 déjà, plus de 450 millions de Chinois l’apprennent tous frais payés. Dès lors, on est loin de la Chine communiste, d’une Chine raide, stricte et ringarde de la « glorieuse ère » du Timonier vénéré, Mao Tsé Toung. Néanmoins, les pays du Tiers Monde doivent s’inspirer de l’expérience enrichissante de la Chine, du moins si leurs autorités veulent bien sortir de l’ornière. Ce n’est pas impossible lorsqu’on sait que pour y parvenir, la Chine a mis des décennies et qu’il y a 54 ans, les populations asiatiques se contentaient d’un bol de riz par jour et par personne. C’est dire que vouloir, c’est pouvoir.

Par Oumar  Diawara « Le Viator »

Le Coq 08/07/2011