Situation sociopolitique malienne Ce qu’en pense le président du parti Mali Dambé

Je propose la création et la mise sur pied immédiate d’une Commission Vérité et Réconciliation couvrant la période 1992 à 2012. Il faut absolument tirer les leçons de la gouvernance de notre pays durant ces 20 dernières années. L’erreur serait de passer sous silence les erreurs commises et les comportements déviants au cours des 20 ans de pratiques démocratiques.
L’enseignement à tirer, c’est comprendre les raisons de l’affaiblissement de l’Etat et l’arrêt brutal du processus démocratique en cours au Mali le 22 mars 2012. Pour ce faire la Commission Vérité et Réconciliation doit entendre les anciens et actuels dirigeants du Mali, les responsables politiques et administratifs ainsi que la Société civile sur des sujets comme :

1. La gouvernance politique et la pratique démocratique à partir du 18 juin 1992, date de prestation de serment du 1er président démocratiquement élu, au coup d’Etat du 22 mars 2012. De l’avis de ceux qui ont été aux affaires quelles sont les raisons de l’affaiblissement de notre démocratie et de l’effritement progressif de l’Etat, quelles ont été leurs responsabilités respectives dans cette situation ?
2. La corruption et le détournement des fonds publics. Pourquoi un tel système a prospéré dans un pays pauvre ? Qui en ont profité et comment fonctionne ce système qui a appauvri l’Etat et enrichi certains dirigeants et certains citoyens ?
3. La faillite de l’école publique et la baisse du niveau de nos élèves et étudiants. Comment ceux qui ont eu en charge le secteur de l’éducation ainsi que les enseignants et les parents d’élèves expliquent-ils une telle déconfiture ?
4. La politique de l’emploi dans notre pays. Comment s’opère le recrutement dans la fonction publique ? Pourquoi il n’a pas été possible d’appliquer le principe ‘l’homme qu’il faut à la place qu’il faut’. Qui sont à l’origine des filières de corruption lors des concours de recrutement dans la fonction publique ?
5. La situation désastreuse de l’armée malienne. Quel était le budget alloué aux forces armées et l’utilisation réelle de ces fonds ? Comment s’opérait le paiement des primes ? Comment se faisaient les recrutements ces dernières années ? Quels étaient les types de formation de nos militaires, ces formations étaient-elles adaptées ? Comment était la vie du soldat, pourquoi une telle précarité ? Peut-on encore vivre une situation de coup d’Etat ?

Il faut absolument que ceux qui ont été aux responsabilités viennent s’expliquer devant le peuple malien sur ces différents sujets. L’objectif, c’est de pardonner mais on ne peut pas faire si mal à son pays et que l’on passe sous silence de tels comportements au nom d’un apaisement social qui n’est que de façade, car tant que les différents responsables ne viennent pas s’expliquer et demander le pardon du peuple malien, le climat social ne saurait se calmer durablement.

Je demande solennellement aux autorités de la transition de mettre en place cette Commission Vérité et Réconciliation pour permettre le retour définitif de la paix sociale avec le pardon du peuple malien aux responsables de la faillite intellectuelle et morale de notre pays. Le Mali a besoin d’un nouveau départ avec une nouvelle gouvernance où l’impunité n’a plus sa place. Tous les citoyens doivent être égaux devant la justice et tout dirigeant ou responsable qui viole la loi doit répondre devant la justice comme n’importe quel citoyen.

Si nous ne sommes pas justes, Dieu notre Seigneur n’aura pas pitié de notre pays et nous ne rentrerons pas dans sa Grâce. Nous devons lutter contre l’injustice dans notre pays et donner de l’espoir à nos compatriotes qui la subissent tous les jours. Si nous sommes des vrais croyants commençons par craindre Dieu et arrêtons nos comportements indignes et surtout l’injustice.
La Commission Vérité  et Réconciliation pourrait démontrer aux citoyens que désormais tout dirigeant malien peut être contraint à s’expliquer sur ses agissements au moment où il était aux responsabilités. Ceux qui se sont honteusement et illicitement enrichis sur le dos des pauvres et au préjudice de l’Etat s’expliqueront et demanderont pardon au peuple malien. Ce sera le début du Mali nouveau dont nous rêvons tous ».

Me Tidiani Guindo, avocat et économiste
Président de Mali Dambé

L’ Indicateur Du renouveau 23/10/2012