REGULATION DE LA FILIERE RIZ: Pour les achats institutionnels, priorité à la production nationale

L’Interprofession filière riz a organisé lundi dernier à l’Azalaï Grand hôtel de Bamako une conférence de presse sur la définition d’une stratégie de régulation des importations de riz au Mali. Cette conférence était placée sous la présidence de Mahamadou Namory Kéita, chargé de programme à la Direction nationale de l’agriculture, en présence du président de la Plateforme nationale riz, Faliry Bolly, du représentant de l’Ong VECO West Africa, Bréhima Dembélé et du coordinateur de l’Association malienne pour la sécurité et la souveraineté alimentaire (AMASSA-Afrique Verte), Mohamed Haïdara.

Au Mali, le riz demeure le principal produit agricole de base en termes de volume avec une production qui dépasse 2 millions de tonnes de paddy (riz non décortiqué) ces 5 dernières années. « Notre pays dispose de tous les atouts pour être le grenier de l’Afrique de l’ouest en riz puisque son potentiel productif est très faiblement exploité », a indiqué Faliry Bolly.
Les effets de la crise de 2008 ont davantage montré la place qu’occupe le riz dans les systèmes alimentaires des populations de la sous-région ouest-africaine ainsi que son caractère stratégique au plan politique et économique.

Pour le cas du Mali, on peut citer l’initiative riz comme l’une des stratégies mises en place dans ce sens. La Plateforme des producteurs de riz du Mali (PNPR-M) avec ses partenaires, ont réalisé plusieurs études, visites d’échange, concertations et analyses, qui ont permis d’avoir une vision partagée des problématiques clés liées en amont et en aval à la production rizicole. En dépit des performances, la production nationale n’arrive pas à couvrir totalement les besoins de consommation de la population en riz. Par exemple, pour la période de 2008-2013 les besoins de consommation ont été couverts en moyenne à 93%. En effet, les engagements de l’Etat depuis la crise de 2008 n’ont cessé de marquer un pas important dans la progression de la production du riz. Aujourd’hui, celle-ci se chiffre à 2.811.049 tonnes, soit 31,36% de la production céréalière 2016-2017, plaçant le Mali au 2ème rang des producteurs en Afrique de l’ouest après le Nigeria. La filière riz demeure une opportunité à saisir de par son statut stratégique pour le peuple malien, plaide Faliry Bolly.

Le Mali applique le Tarif extérieur commun (TEC) de l’UEMOA, adoptée en 2000. Il représente le plus bas tarif dans les pays africains pour les importations de riz. Ce tarif ne permet pas la protection de la production nationale et par conséquent représente un risque majeur d’accroître la concurrence sur les marchés domestiques pour le riz, de décourager les investissements dans les filières domestiques, d’affaiblir l’engagement des acteurs, notamment les producteurs et anéanti ainsi la dynamique amorcée depuis 2008.
En effet, malgré les statistiques et les analyses indiquant la projection de l’autosuffisance en riz blanc (93%) pour le Mali, les importations de riz blanc n’ont pas connu une baisse significative en fonction de la production. Au contraire, elles ont connu une remontée sensible et sont estimées à 184.371 tonnes entre 2012 et 2016 correspondant environ 18% de la production nationale. Ces importations ont souvent menacé l’écoulement de la production nationale, selon le président de la Plateforme.

Pendant la période 2006-2010 concernée par l’étude, le gouvernement a exonéré pour plus de 20 milliards de F CFA d’importation de riz. Ce montant aurait mieux servi s’il était réinvesti dans le tissu économique. Il aurait servi à non seulement avoir plus de maîtrise de l’eau au niveau des différents systèmes de production rizicole, mais aussi à assurer l’approvisionnement en intrants agricoles (semences améliorées et engrais) et faciliter l’accès au marché pour la commercialisation du riz local, a analysé le conférencier Bolly.

Forts de ce constat, les producteurs de riz, leurs organisations et leurs alliés saluent l’engagement de l’Etat dans sa volonté à œuvrer au développement de la filière riz, sans laquelle, les politiques de sécurité alimentaire ne peuvent qu’être vaines. Ils exhortent par conséquent le gouvernement à mettre rapidement en place une politique intelligente basée sur quatre leviers que sont la rationalisation des importations de riz en fonction d’une bonne évaluation de la production nationale et des besoins nationaux. Ils recommandent le contrôle et le contingentement des importations par l’instauration de quotas permettant de coupler les achats locaux de riz avec les importations, des facilités de paiement à accorder aux importateurs de riz pour effectuer des achats locaux de riz. Ils souhaitent surtout la généralisation et l’effectivité de la priorité accordée au riz national dans les achats institutionnels.
Mamadou DOLO
dolo@journalinfosept.com