Rébellions au Nord-Mali Les vérités de Ag Hamani

Cette conférence-débats avait la particularité d’être animée par Ahmed Mohamed Ag Hamani qui est non seulement un ancien Premier ministre, mais aussi un Touareg. Surtout à un moment où certains essayent de coller l’étiquette touareg à la rébellion. Elle était particulière aussi à cause de la qualité de l’assistance composée d’anciens Premiers ministres, d’anciens ministres, de leaders de partis politiques et d’organisations de la société civile. Il y avait aussi les représentants de la Cédéao, de la Minusma et de l’Union africaine.
C’est devant cet aréopage que le conférencier a évoqué les causes de la rébellion au Mali, avant de dégager des pistes de solution.

Par rapport aux causes des différentes rebellions qui sont toutes venues ou presque de la région de Kidal, précisément de l’Adrar des Ifoghas, le conférencier est formel : « Les différentes rebellions qu’a connues le Mali, ne sont pas une question de développement, mais plutôt une question de gouvernance ». A l’en croire, les rebellions cycliques s’expliquent par la déliquescence et l’absence de l’Etat dans certaines localités du Nord, mais aussi et surtout par la démission de la classe politique qui ferme les yeux sur l’inacceptable.

Aussi il a précisé que les rebellions ne sont pas touareg comme le pensent nombre des Maliens. Tous les Touaregs, voire la majorité des Touaregs, ne nourrissent pas et ne cautionnent pas l’idée des rebelles et des rebellions au Mali. Pour lui, il est important que l’ensemble des Maliens et la communauté internationale comprennent cela.

Le conférencier a formulé plusieurs recommandations de sortie de crise. Il a insisté sur la justice sociale et le désarmement de toutes les milices armées qui pullulent au Mali.

« Malgré leur grand nombre, je n’ai pas vu une seule milice armée au Mali combattre les jihadistes ou le MNLA. Cela veut dire que ces milices existent pour d’autres raisons que la défense de l’Etat. Elles doivent être désarmées car, elles constituent, tout comme le MNLA, une menace pour l’Etat et sa stabilité », a-t-il affirmé. Autre proposition faite par le conférencier : l’établissement de la justice. « Il n’y a pas de réconciliation sans justice. Tous les coupables dans cette crise, qu’ils soient du Nord ou du Sud, doivent être arrêtés et jugés avant de parler de réconciliation. Il n’y aura pas de réconciliation si nous continuons d’applaudir les coupables », a déclaré le conférencier.

Bannir les expressions Azawad, MNLA, HCUA
Au cours des débats, le conférencier a été complété par certains intervenants. Pour le Pr. Ali Nouhoum Diallo, ancien président de l’Assemblée nationale et président de la Comode, la croisade contre la rébellion passe par le bannissement de certaines notions dans nos discours quotidiens.

« Dans nos discours, nous devons bannir les mots Azawad, MNLA et HCUA, MAA et autres. Car, en continuant à les prononcer dans les discours officiels, nous contribuons à faire la promotion de la rébellion », a-t-il indiqué.

Tiébilé Dramé a rappelé que la résolution de cette crise passe impérativement par l’application effective de l’accord du 18 juin dernier dit Accord préliminaire de Ouagadougou. Pour lui, si la crise persiste, c’est parce les parties signataires de cet accord n’ont pas respecté leurs engagements.

Pour Choguel Kokalla Maïga, leader du parti MPR, deux pistes de solutions s’imposent : le dialogue et la force. Selon lui, la diplomatie malienne doit être plus agressive et active. « Il faut que notre diplomatie s’explique et informe les populations et les partenaires sur cette crise. Elle doit travailler à délégitimer la rébellion. Car, on a tendance à légitimer la rébellion dans ce pays en évoquant les questions de développement des régions du Nord. C’est un grand mensonge », a martelé Dr. Choguel Kokalla Maïga. Il a ajouté que l’armée qui est la colonne vertébrale d’une nation doit être formée et outillée pour faire face aux situations de rebellions.

De l’avis d’Amadou Seydou Traoré dit Amadou Djicoroni, cette crise n’est pas un conflit du Nord contre le Sud, ni d’une ethnie contre une autre comme l’expliquent une certaine presse et la communauté internationale. Il a invité les Maliens à chercher la vraie nature de cette crise et à trouver solidairement une solution interne au risque de se voir imposer une solution française ou occidentale.  Le « doyen », comme on l’appelle, a rappelé que le retour de Kidal dans le giron de l’Etat central ne peut pas attendre. « Si nous ne nous levons pas tôt, nous allons nous perdre dans les débats internes et inutiles et nous finirons par perdre Kidal », a-t-il conclu.

Ce cri de cœur d’Amadou Djicoroni semble saisi car, une grande marche de la Comode est prévue pour le 29 décembre prochain. Objectif : lancer un ultimatum aux nouvelles autorités par rapport à la situation de Kidal.

A.D.

L’ Indicateur du Renouveau 2013-12-23 12:41:33