Pour un fichier électoral crédible / Le groupe des 44 devient le Gps-2012

younouhdicko

Le Républicain  ; Les 44  se constituent en parti politique. Expliquez-nous.

Younouss Hamèye Dicko ; Je pense que les partis qui étaient au départ 32 se sont constitués maintenant en un groupe qu’on appelle le Groupe des partis solidaires pour les élections de 2012. Nous nous sommes constitués en groupe pour montrer notre détermination à obtenir des élections transparentes et crédibles. Et pour obtenir une élection transparente et crédible, il faut un fichier électoral fiable. Le fichier électoral est fondamental, tout le monde reconnait que pour  avoir des élections acceptables, il faut avoir un fichier électoral fiable. Nous nous sommes rendus compte que la hâte avec laquelle l’administration voudrait mener un tas d’élections en même temps signifie qu’on ne peut avoir un fichier électoral fiable. Le Race a été décrié par toutes les voix maliennes qui sont autorisées pour cela. Donc si on veut faire les élections alors que le Ravec n’était pas prêt, sur la base du Race qui a été rejeté par tout le monde, pour nous, c’est clair on veut faire des élections bâclées pour obtenir les résultats que l’on veut parce que le fichier Race est mauvais. Nous avons déjà dit que c’était un fichier qui signifie que 71% de notre population sont des électeurs alors que nous savons que 65% de nos populations ne sont pas  à 15 ans. Il est évident que ce fichier est falsifié. C’est  l’administration elle-même qui avait avancé que depuis 3 ans, il y a au moins un million sept cent mille électeurs qui n’étaient pas bons. En toute sérénité, nous nous connaissons, nous savons qu’il y a plus de deux millions d’électeurs fictifs qui sont sur ce fichier là, parce que si vous faites un petit calcul, il y a huit millions et demi d’électeurs sur douze millions. C’est un fichier très mauvais et  nous faire voter sur ce fichier là, c’est un manque de respect, c’est pour cela que nous avons décidé de nous mettre ensemble pour obtenir un fichier propre qui permet d’élire un président propre, un député propre, des conseillers propres. Si nous  le laissions tel qu’il était, c’était pour qu’on élise qui on veut à la place de la population malienne. Voila pourquoi nous nous sommes constitués autour des 44 et aujourd’hui l’évolution des choses a fait que  nous voulons que ces 44 partis soient des partis solidaires afin que ce soit vraiment un président qui représente le Mali, qui va le gouverner, pas celui qu’on va nous donner. Nous ne voulons pas qu’on nous donne un président issu d’un mauvais fichier, ça serait donc un président fabriqué, des élections législatives fabriquées et nous voulons l’éviter pour la paix sociale dans notre pays. Voila en gros les raisons qui nous ont poussés à créer le GPS 2012.

Parmi vous il y a des partis qui ont déjà investi, ou investiront un candidat. Qu’est ce qui va se passer ?

Il ne se passera rien de ce qui était déjà prévu, vous savez, nous ne sommes pas naïfs au sein de ce groupe là,  pour penser que tous ces hommes là sont volontaires et ambitieux. On a compris que dès que vous arrivez au pouvoir, vous faites ce que vous voulez, vous ne tenez plus compte vraiment des aspirations du peuple. En plus, ce qui est une chance pour le Mali,  c’est que tous ces hommes là veulent être président de la République, et ils veulent l’être non par égoïsme mais c’est vraiment des calculs de partis politiques, d’hommes que nous connaissons. Tous ceux que nous connaissons sont des gens sérieux qui veulent être présidents de la République. Donc, nous savons qu’il y aura beaucoup de candidats parce que les gens sont candidats pour que leur parti ne meure pas. Et ça c’est politique aussi, mais ce que nous voulons faire, ce n’est pas empêcher les uns et les autres d’aller au premier tour, ce que nous voulons c’est qu’a l’issue du premier tour un d’entre nous soit  en ballotage ou si les deux en ballotage proviennent de nous, c’est encore une plus grande chance. Si l’un d’entre nous est en ballotage, nous disons à tous ces candidats investis ou qui vont être investis qu’ils votent au second tour pour celui qui est en ballotage. C’est ça notre ambition, ce n’est pas de les empêcher de tenter leurs chances au premier tour. C’est de leur donner la chance d’élire un président d’entre eux au second tour pour construire le Mali autour de lui avec une majorité de cadres, de députés et de conseillers municipaux qui sont vraiment représentatifs. Un cadre solide qui maintient la paix sociale.

Qui sera ce candidat, en avez-vous déjà une petite idée ?

C’est difficile d’en avoir une petite idée parce que tous les gens qui vont être investis sont des candidats solides. Chacun d’eux peut arriver au second tour et nous devons le soutenir. Si quelqu’un arrive au second tour, qui n’est pas issu des 44, il ne faut pas le soutenir parce qu’il ne nous a pas montré qu’il veut des élections propres et crédibles, puisqu’il ne milite pas avec nous pour un fichier fiable. Donc celui que nous allons soutenir c’est celui qui veut un fichier fiable, qui veut des élections propres et crédibles. Celui-là est un démocrate et demain quand il sera président de la République, il restera démocrate.

Votre candidat ira-t-il aux élections sur la base de l’ancien fichier ?

Il n’y a pas d’ancien fichier, justement je crois que si vous suivez notre processus nous avons demandé un fichier fiable et consensuel. La plupart de nos propositions ont été théoriquement retenues pour obtenir un fichier fiable. Mais rien de définitif n’est arrêté, parce qu’il y a la révision qui a  commencé le premier octobre pour finir en fin décembre. Donc nous attendons que les produits du ministère de l’Administration territoriale et des collectivités locales et de la Dge nous reviennent pour qu’on vérifie si l’ensemble des propositions que nous avons faites sont retenues pour rendre le fichier fiable. Donc le fichier qui va venir ne sera pas le fichier Race. Il n’est pas le fichier Ravec pour lequel nous options. Avant, on nous avait dit qu’on abandonne le Ravec parce qu’il n’y avait pas d’argent. Ce qui est totalement faux. D’abord il y a eu l’argent du Ravec et en tant que tel, personne ne nous a dit ce qu’il est devenu. Ensuite, nous savons que les partenaires techniques et financiers étaient prêts à mettre de l’argent pour que le fichier électoral soit bien fait. Et ceux qui militaient pour le Race et qui avaient dit que c’est par manque d’argent, cet argument a été battu en brèche. Après, le deuxième argument c’est de nous dire : il y a des Maliens en Côte d’Ivoire et la Côte d’ivoire était en guerre et ils n’ont pas pu être recensés dans le Ravec. On ne va pas hypothéquer les élections du Mali parce qu’il y a eu une guerre en Côte d’Ivoire. Les Ivoiriens font des élections avec leur guerre, ce n’est  pas nous  qui ne ferions pas d’élection ? Quand est-ce qu’on va le faire. Il s’est trouvé que précisément aujourd’hui, si vous avez lu hier un journal de la place, il a été dit que les 4450 cahiers du recensement des Maliens en Côte d’Ivoire ont disparu de l’ambassade du Mali à Abidjan. Mais à Bouaké qui est un autre consulat, tout ce passe très bien et que sur 336 600 âmes 70.942 sont électeurs. Ça signifie que 21 % de cette population sont des électeurs. Ce qui correspond parfaitement, parce qu’au le Mali, le nombre d’électeurs  est inférieur à 35 %.   C’est-à-dire que si l’administration nous amène le Race pour faire les élections, c’est de la provocation, mais ce n’est pas qu’on refuse d’y aller. Vous ne pouvez pas amener un cadavre et obliger les gens à le bouffer.  On ne le mangera pas. Donc, le Race ne reviendra pas, parce que si on rejette toutes les propositions que nous avons faites, on prend la responsabilité de tous les désordres à l’issue de ces élections ou pendant ces élections. Donc le gouvernement ne peut pas ramener ça. C’est un suicide.

Quelle analyse faites – vous du paysage politique ?

L’analyse est très simple. L’analyse est une conclusion, il s’agit d’un paysage particulièrement brouillé, détruit. C’est-à-dire que le paysage n’est pas construit avec une certaine raison, avec un besoin de qualification et un besoin de sortir élégamment de ces problèmes. Vous voyez, ils sont tellement nombreux en même temps, il y a une fin de mandat dont on ne peut parler du paysage politique. C’est un paysage politique extrêmement trouble et on a même l’impression qu’on fait exprès de le troubler. Parce que ce n’est pas logique de mettre autant de problèmes en même temps et  vouloir en trouver la solution. Dans les quelques mois qui restent, c’est créer des problèmes au pays, mais notre regroupement ne s’occupe que du fichier électoral, car nous pensons que tout cela dépend du fichier électoral. S’agissant des réformes institutionnelles, chaque parti a sa position sur la question. Elles ne sont pas discutées. Au sein du Gps, le code de la famille est en discussion au niveau des initiés et on verra bien ce que les populations vont dire. Souvent, j’entends parler des religieux. Il ne s’agit pas des religieux dans cette affaire. Il s’agit du Malien parce que la culture malienne, les coutumes du Mali se trouvent au sein de la population. Il se trouve que la population est à 97,5% musulmane. Donc ce sont des confusions. C’est un problème de chaque famille malienne. Donc je pense que dans toutes les lois que l’on doit faire, on doit tenir compte des aspirations du peuple. Comparer le peuple malien aux peuples occidentaux est une erreur. Le développement de notre pays n’est pas encore là. Il y a des choses qui choquent ici et qui ne choquent pas ailleurs. En tout cas, même si cela choque, ce n’est pas la même ampleur. Je pense que les accords qui ont été signés avec l’Untm dépassent 2012. On ne sait pas qui va régler ça après. C’est facile de dire que l’Etat est une continuité mais il est important de se limiter au temps qu’on gère, pas au temps  que gèrent les autres. Je pense que tout cela mis bout à bout constitue un bouillon dont on ne sait pas quelle soupe va sortir.

Et le problème de la Ceni ?

Le problème de la Ceni, c’est exactement la même chose, notre groupe ne discute pas des problèmes de la Ceni mais nous pensons que pour avoir des élections fiables et transparentes, il faut une Ceni crédible. C’est mon point de vue et pas celui du groupe. La Ceni doit contenir l’opposition, nous ne pouvons pas faire la Ceni sans l’opposition. Le monsieur qui représente l’opposition dans la Ceni est semble t-il, hors de l’opposition. Aucune opposition ne le reconnait, donc il n’est pas de l’opposition. Tous les partis politiques qui sont réunis, ce sont eux qui sont de l’opposition. Comment se fait-il qu’il a été nommé dans la Ceni pour représenter des gens qui ne le reconnaissent pas ? Ce n’est pas normal non plus. Ce sont des méthodes d’un autre temps. On ne fabrique pas une opposition, l’opposition doit exister. Et c’est en son sein qu’on tire celui qui la représente. Il faut que la Ceni soit crédible et représentative.      

Propos recueillis par Baba Dembélé

Le Républicain 13/10/2011