Mois de ramadan : Jeûne et allaitement

Le jeûne n’est pas obligatoire pour  les femmes allaitantes. Mais souvent, elles ne souhaitent pas se retrouver  à faire seules le jeûne après le sevrage. Si le Coran a permis aux femmes qui allaitent de repousser le jeûne, c’est parce que leur condition médicale fait qu’elles ont besoin d’un apport calorique régulier, chose que ne leur permettrait pas le jeûne classique. C’est un dur dilemme pour toutes les femmes musulmanes qui allaitent parce que ce peut être épuisant pour elles. Cette flexibilité des textes religieux peut ou non être prise en compte en fonction de la façon dont la religion est perçue, et certaines personnes pourront décider de jeûner même si cela met leur santé ou leur vie en danger.

S’il existe des données sur l’impact du jeûne sur la santé des personnes malades, ou sur l’enfant, il n’en existe guère sur son impact chez la mère allaitante. Le but du  jeûne est une pratique courante chez les mères allaitantes musulmanes, et cela doit être pris en compte. Dans les populations de bon niveau socio-économique, la baisse de la sécrétion lactée que le jeûne pourra induire n’aura pas de conséquences trop importantes sur la santé infantile. Mais dans les populations économiquement défavorisées, une baisse de la lactation pourra favoriser la malnutrition infantile. Par ailleurs, le jeûne modifie les rythmes circadiens (augmentation du sommeil diurne, perte de concentration, augmentation de l’irritabilité et du risque d’accidents).

L’impact du jeûne sur les interactions entre la mère et son enfant serait intéressant à étudier. Médecins et érudits déconseillent unanimement l’observation du jeûne à la femme qui ne se sent pas bien. Il est recommandé à tout individu inapte au jeûne pour cause de maladie ou de voyage de payer ultérieurement sa dette, selon les règles de l’islam. Les femmes qui allaitent  entre dans cette  catégorie. Une étude menée par les médecins du service de pédiatrie de l’hôpital Gabriel Touré   montre  que les macronutriments ne sont pas trop touchés par un jeûne; par contre, il y a des différences au niveau des micronutriments, type magnésium, zinc, potassium. Enfin, la composition ionique et l’os molalité du lait maternel peut changer en raison de l’interruption d’apport liquidien. Il est peu probable que le jeûne ait un impact négatif sur le bébé. La femme allaitante sentira les effets du jeûne et le besoin de le rompre, bien avant que la production de lait ne soit affectée.

Mais l’âge du bébé est le critère principal. En effet, si le bébé est un nourrisson de quelques semaines, nourri qu’au sein, ou un jeune enfant de 1 an qui prend des repas solides en journée et seulement une tétée le soir, la situation est très différente.  Le lait n’est jamais exactement le même, sa nature dépend par exemple de ce que la mère mange et des besoins du bébé. Le taux de matière grasse présent dans le lait peut baisser pendant le jeûne. Un petit bébé pourrait alors réclamer plus souvent le sein car une tétée ne lui donne pas la quantité de matière grasse dont il a besoin. Pour les bébés plus âgés qui prennent aussi des repas solides, une telle différence ne devrait pas les affecter.

Les études montrent qu’un jeûne de 20 heures n’a pas d’effet remarquable sur la quantité de lait produite par les femmes. Il faut néanmoins noter que lors de cette étude, les femmes ont été autorisées à boire de l’eau pendant le jeûne. Il semblerait donc que le corps compense le manque de nourriture ou de liquide en puisant dans ses réserves d’énergie. Une femme allaitante dès le premier jour du Ramadan, saura la soif due à l’allaitement. Les signes de déshydratation sont: la soif, les urines plus sombres et plus odorantes,  les vertiges, la fatigue, l’évanouissement,  les maux de tête ou d’autres douleurs.

Quand une femme allaitante repère certains de ces signes, elle doit rompre le jeûne en buvant de l’eau et en se reposant. Après une demi-heure de repos, si elle se sent toujours mal, il est prudent de contacter un médecin. Selon le docteur Kamissoko du CSCOM de Sogoniko, les femmes qui allaitent parviennent toujours à produire une quantité de lait suffisante pendant le jeûne. Mais le pourcentage de matière grasse dans le lait est susceptible de diminuer. Une conséquence possible : le bébé pourrait avoir faim plus souvent et réclamer donc plus le sein. Ainsi à la rupture du jeun, les femmes allaitantes doivent boire beaucoup d’eau et aussi le matin avant de commencer une nouvelle journée de jeun. Il faut qu’elles boivent au moins 8 à 12 verres d’eau, de lait ou de jus de fruit par jour. Leur organisme a besoin de recevoir des calories d’aliments solides. Elles doivent ingérer entre 400 et 500 calories supplémentaires par jour.

ADIARATOU SANGARE

Le Républicain 04/08/2011