La tension monte à Bamako. Une manifestation organisée samedi 3 mai par plusieurs partis politiques et organisations de la société civile a été violemment dispersée par les forces de l’ordre. Les protestataires dénonçaient les recommandations issues des récentes consultations nationales, visant notamment la dissolution des partis politiques.
À l’appel de l’Initiative des partis politiques pour la charte (Ipac), plusieurs centaines de personnes s’étaient réunies devant le Palais de la Culture pour réclamer le respect de la Constitution et protester contre ce qu’elles considèrent comme une dérive autoritaire du régime de transition. Mais la marche a rapidement été bloquée par un important dispositif sécuritaire. La police a fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser la foule, alors que des slogans hostiles à la junte militaire étaient scandés.
Une transition contestée
Cette manifestation intervient dans un contexte politique tendu, après les recommandations controversées des Forces vives de la nation, réunies fin avril à Bamako. Au terme de deux jours de consultations, ces assises ont proposé d’installer le général Assimi Goïta à la tête du pays en tant que Président de la République pour un mandat de cinq ans renouvelable, aligné sur les pratiques des autres régimes militaires de l’Alliance des États du Sahel (AES).
Autre recommandation phare : la dissolution pure et simple de tous les partis politiques. Les participants ont proposé de revoir de fond en comble la charte des partis, en rendant leur création beaucoup plus restrictive — notamment avec l’instauration d’une caution de 100 millions de FCFA, un âge minimal de 25 ans et maximal de 75 ans pour les dirigeants, et l’obligation d’avoir une implantation nationale.
Une opposition muselée
Ces mesures, dénoncées comme liberticides par l’opposition, visent selon leurs auteurs à « assainir » le paysage politique. Elles s’accompagnent d’autres recommandations telles que la suppression du financement public des partis, l’interdiction pour les chefs traditionnels et religieux de se présenter aux élections, ou encore la suspension des scrutins tant que le pays ne sera pas « pacifié ».
La suppression du poste de chef de file de l’opposition est également envisagée, les ressources allouées à cette fonction devant être réorientées vers des projets de développement. Un audit des fonds publics déjà utilisés à cet effet a aussi été proposé.
La classe politique a boycotté ces consultations, dénonçant un processus biaisé et contraire aux principes démocratiques. La dispersion musclée de la marche de samedi ne devrait pas apaiser le climat, alors que les tensions entre les autorités de transition et les partis politiques vont crescendo.