Mali: manifestation et mausolées détruits avant une réunion sur la reconquête du Nord.


Selon des témoins joints par l’AFP à Tombouctou (nord-ouest), les islamistes ont commencé à détruire jeudi après-midi à coups de « pioches et d’autres outils » des mausolées de Kabara, un quartier du sud de cette ville historique où ils avaient déjà démoli des sanctuaires similaires en juillet.

En juillet, les islamistes d’Ansar Dine (Défenseurs de l’islam), groupe armé qui contrôle Tombouctou avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), avaient suscité un tollé en détruisant des mausolées en terre dans l’enceinte de la plus grande mosquée de la ville, classée patrimoine mondial en péril.

Quelques jours auparavant, ils avaient détruit sept des seize mausolées de Tombouctou et brisé la porte sacrée de la mosquée Sidi Yahia.

Ansar Dine, Aqmi et le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), qui occupent le nord du Mali depuis plus de six mois, prônent la charia (loi islamique), dont ils ont une interprétation rigoriste.

Ils considèrent la vénération des saints comme « de l’idolâtrie » et, au nom de la charia, commettent de nombreuses exactions.

Ces nouvelles destructions sont intervenues à la veille d’une réunion internationale de haut niveau à Bamako, destinée à peaufiner une stratégie de reconquête militaire du nord du Mali dont le principe est acquis.

Le 12 octobre, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté une résolution préparant le déploiement d’une force militaire internationale de quelque 3.000 hommes au Mali, donnant 45 jours à la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) pour préciser ses plans.

Les pays de la Cédéao, seuls prévus pour envoyer des troupes au Mali, devront ainsi commencer à fournir « leurs grandes lignes stratégiques » en vue de l’intervention soutenue par l’ONU, l’Union européenne (UE) et l’Union africaine et, sur le plan logistique, par des pays comme la France et les Etats-Unis, selon des sources diplomatiques occidentales.

Parmi les participants à la réunion, sont notamment annoncés la nouvelle présidente de la Commission de l’UA, Nkosazana Dlamini-Zuma, l’envoyé spécial de l’ONU au Sahel, Romano Prodi, le président nigérian Goodluck Jonathan aux côtés du président malien par intérim Dioncounda Traoré.

La France espère que la rencontre permettra « de progresser dans la planification d’une intervention africaine au Mali », a indiqué jeudi son ministère des Affaires étrangères.

Jeudi matin, environ 2.000 personnes répondant à l’appel d’une coalition soutenant les auteurs du coup d’Etat militaire du 22 mars au Mali ont marché à Bamako, sans incident, pour exprimer leur soutien à l’armée malienne et contre l’envoi d’une force armée étrangère au Mali.

« Non à la confiscation de notre souveraineté nationale », « Vive l’armée malienne », ont notamment scandé les manifestants, comprenant en grande partie des fidèles d’un chef religieux musulman malien, Mohamedou Ould Cheikh Hamallah Haïdara.

En visite à Paris, des élus originaires du nord du Mali ont de leur côté appelé à une intervention militaire « urgente », ce qu’avaient également réclamé une semaine auparavant à Bamako quelque 10.000 personnes lors d’une manifestation.

« Nous crions: ça s’enlise, faites vite! Ils (les islamistes armés dans le Nord) ont tous les moyens pour endoctriner la population: par peur, par conviction, par la force ou par l’argent », a déclaré à la presse El Hadj Baba Haïdara, député de Tombouctou et président du Collectif des élus du nord du Mali.

A Niamey, le président nigérien Mahamadou Issoufou et son homologue nigérian Goodluck Jonathan, se sont accordés « sur la nécessité d’aider le Mali à recouvrer son intégrité territoriale » et ont salué la résolution du Conseil de sécurité de l’ONU adoptée le 12 octobre, « étape importante en vue de la constitution d’une force militaire internationale devant aider le Mali à reconquérir les régions occupées du nord du pays ».

A Conakry, le ministre guinéen délégué chargé de la Défense, Abdoul Kabélé Camara, a affirmé jeudi à l’AFP que la Guinée était prête à remettre aux autorités maliennes des armes achetées par le régime du président Amadou Toumani Touré avant son renversement le 22 mars, et qui sont bloquées depuis fin juillet dans son pays, par lequel elles transitaient. « Mais nous attendons toujours le feu vert de la Cédéao » pour ce faire, a-t-il précisé.