LE VIN EST TIRÉ PAR LA CEDEAO ET L’UEMOA : Il faut maintenant se donner la main et resserrer les rangs pour relever le Mali

«Les dignes Maliens resteront sereins. Et les autres vont penser et imaginer toutes les stratégies pour déstabiliser le Mali» ! Telle est la réaction de notre confrère et doyen Abdoul Karim Dramé après la publication des communiqués finaux des sommets extraordinaires de l’Uémoa et de la Cédéao annonçant des sanctions lourdes contre le Mali. Ceux qui appelaient de tous leurs vœux des sanctions contre le Mali, parce qu’ils ont intérêts à ce que le pays aille à des élections précipitées, ont aussitôt commencé à jubiler sur les réseaux sociaux.

Les sanctions sont donc là… Il s’agit, entre autres, du retrait de tous les ambassadeurs des pays membres de l’Union monétaire ouest africaine (UEMOA), de la fermeture des frontières du Mali avec les Etats membres de l’UEMOA, de la suspension des transactions avec les pays membre de la Cédéao, gel des avoir du Mali auprès de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest (BCEAO), fin de l’aide financière…  S’ajoutant à celles déjà en vigueur, ces sanctions ont un effet immédiat. Et selon les valets de la France, elles seront allégées progressivement en fonction des «progrès réalisés dans la mise en oeuvre du chronogramme».

Mais, ceux qui jubilent oublient sans doute qu’ils seront aussi touchés d’une manière ou d’une manière par ces sanctions. Quant à leur effectivité, nous pensons que seules les mesures financières peuvent réellement impacter négativement notre quotidien. Quant à la fermeture des frontières, elle fera, sans doute, sourire les populations frontalières qui doivent prendre les dirigeants ouest-africains pour des amuseurs de galerie. Nos frontières sont si poreuses et l’intégration socioéconomique est telle que nous attendons de voir comment ADO et ses complices vont procéder pour empêcher les déplacements et les flux des marchandises (le trafic marchandises y est déjà très développé même quand les frontières sont ouvertes).

Ne leur faisons pas le plaisir de braquer le peuple contre les dirigeants de la Transition

Tout porte à croire que ces sanctions ne visent pas à affecter les Maliens, mais à affaiblir les autorités de la transition en cherchant à pousser le peuple à s’insurger contre elles. Autrement, si nous sommes unis derrière nos autorités, elles (sanctions) peuvent être contre-productives. C’est plus que jamais le moment de leur apporter un soutien sans faille, inconditionnel. Nous devons resserrer les rangs derrière nos autorités de la transition.

Certes, ça va être difficile, voire très difficile… Mais nous nous en sortirons. Il faut se dire que d’autres peuples (Cuba, Venezuela…) ont vécu pire avant nous et ils sont aujourd’hui fiers d’avoir tenu face au rouleau compresseur de l’impérialisme occidental et de ses valets sous-régionaux qui ont aidé leurs oppresseurs à vouloir les étouffer sur les plans diplomatiques et économiques. Nous avons montré au monde entier que nous sommes un peuple résilient. Ce n’est donc pas le moment de céder à la panique. Il faut faire prévaloir aujourd’hui des valeurs qui ont toujours fait notre force en tant que peuple : solidarité, fraternité et unité !

Les dirigeants de la Cédéao nous en veulent parce que, avant tout scrutin, nous voulons la sécurité, une bonne constitution pour préparer de bonnes élections et éviter les crises post-électorales qui ne pourront qu’engendrer une nouvelle crise.
Ce que nous souhaitons pour notre pays est légitime parce qu’il y va de sa stabilité à l’avenir.

Soyons résilients en se rappelant que les épreuves font partie du destin des grands peuples. Veillons surtout à ce que tous les politiciens qui ont appelé à ces sanctions de tous leurs vœux ne puissent plus jamais avoir la moindre opportunité d’influencer la gouvernance de notre pays.

Les sanctions sont lourdes, mais ne surprennent pas puisqu’elles traduisent l’ambiance entre Bamako et Paris. Il n’y pas de doute que ces sanctions ont édictées par la France et ont été portées par Alassane Dramane Ouattara, Mohamed Bazoum, Roch Marc Christian Kaboré, et relativement Macky Sall. Sinon pourquoi organisé un sommet précipité de l’UEMOA dans un pays qui n’est pas membre ?

Un chronogramme raisonnable pour apaiser les plus sceptiques sur la volonté réelle des militaires

Elles prouvent en tout cas que les dirigeants de ces deux organisations ne comprennent rien au problème malien où ils ont d’autres préoccupations que les intérêts de notre peuple. La Cédéao a ainsi réitéré son appel aux autorités de transition à se «concentrer sur des activités visant à un retour rapide à l’ordre constitutionnel et à reporter les réformes clés aux institutions élues légitimes à mettre en place après les élections».

Sauf que ces «institutions élues légitimes» ont plutôt énormément contribué à plonger ce pays dans cette crise multidimensionnelle qui fait que les démagogues de la sous-région pensent avoir le droit de décider de notre avenir à notre place. Cela fait trente que le pays bascule progressivement vers le chaos. Il faut être réaliste. Nous avons cédé à la pression de la Cédéao en 2012 et nous payons les pots cassés aujourd’hui.

Et d’Alpha Oumar Konaré à Ibrahim Boubacar Kéita «IBK» en passant par le regretté Amadou Toumani Touré «ATT», tous les présidents élus du Mali ont tenté (plus ou moins avec sincérité) de procéder aux réformes dont il est essentiellement question aujourd’hui. Qu’est-ce qui prouve que le prochain président de la République «démocratiquement» élu aura les coudées franches pour le faire ?

Ce que la Cédéao oublie ou fait semblant d’oublier, c’est que les institutions auxquelles elle fait allusion sont héritées d’une période transitoire (26 mars 1991-8 juin 1992). Autant y procédé maintenant, quel que soit le prix à payer.

Ce que nous pouvons et devons leur concéder, c’est de leur proposer un chronogramme raisonnable qui pourra apaiser des Maliens qui sont encore plus sceptiques sur la volonté réelle des militaires d’assainir le pays avant de passer la main. Un an par exemple ! On pourra au moins faire la révision constitutionnelle, revoir la Charte des partis et s’entendre sur un organe unique de gestion des élections tout en préparant sérieusement la présidentielle !

Moussa Bolly