Le G7 se penche sur la crise alimentaire

Sommet du G7 au château Elmau, en Allemagne

Les dirigeants des pays riches tentent de faciliter la reprise des exportations de céréales d’Ukraine, par voie maritime et terrestre. Les dirigeants du G7 sont réunis jusqu’à mardi midi [28.6.] en Allemagne, au château d’Elmau, en Bavière.

Parmi les thèmes au cœur de leurs discussions : les céréales bloquées en Ukraine, à cause de la guerre. Ces exportations de blé, notamment, qui sont empêchées, créent des pénuries et accentuent encore les crises alimentaires dans les pays les plus pauvres. Pour y remédier, le G7 a entamé des négociations afin de faciliter les exportations ukrainiennes.

La famine menace 

Les dirigeants des pays riches se penchent sur la famine qui guette les populations les plus vulnérables, notamment en Afrique de l’Est. Cinq pays émergents ont été invités à assister au sommet en Bavière, parmi lesquels l’Inde, l’Afrique du Sud et le Sénégal.

Il y a quelques jours, Antonio Guterres, le Secrétaire général des Nations unies, a rappelé les affres des changements climatiques, aggravés par la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine :

« Selon le Programme alimentaire mondial, au cours des deux dernières années, le nombre de personnes souffrant d’insécurité alimentaire grave dans le monde a plus que doublé pour atteindre 276 millions. Il existe un risque réel que de multiples famines soient déclarées en 2022. Et 2023 pourrait être encore pire. »

Les pays les premiers touchés risquent d’être l’Ethiopie, le Nigéria, le Soudan du Sud, le Yémen, l’Afghanistan et la Somalie.

Les pays pauvres ont du mal à s’approvisionner en céréales, en huile de tournesol ukrainiens mais aussi en fertilisants en provenance de Russie, ce qui aggrave les risques d’insécurité alimentaire.

Partenariat en énergie

Ce constat sombre est partagé par le G7 qui promet une aide alimentaire et énergétique plus importante aux pays les plus vulnérables. Ils leur proposent notamment des partenariats sur l’énergie. Macky Sall devrait aborder la question des gisements de gaz et de pétrole découverts au large de son pays et qui pourraient présenter une partie de l’alternative aux livraisons russes dont dépend l’Allemagne.

Faire sortir les céréales d’Ukraine

Olaf Scholz, le chancelier allemand, déclarait ce matin à la télévision : « Nous nous efforçons, avec le Secrétaire général des Nations unies, de permettre de faire sortir des céréales d’Ukraine. Des négociations ont lieu actuellement jour et nuit. »

L’Onu et des Etats européens, parmi lesquels l’Allemagne, la Pologne et la Roumanie, travaillent à  des solutions alternatives pour le transport des céréales par voie terrestre – un défi qui implique l’adaptation des voies ferrées.

L’Union européenne et les Nations unies travaillent sur une sorte de passage sécurisé négocié pour débloquer les ports ukrainiens et permettre la circulation des navires sur la mer Noire. Environ 20 millions de tonnes de céréales ukrainiennes sont actuellement bloquées dans les silos. En temps de paix, l’Ukraine exporte jusqu’á cinq millions de tonnes de céréales par mois.

Pour l’instant, la Russie n’a pas donné son aval sur la circulation des marchandises. Le G7, comme l’Otan, jouent la carte de la pression à défaut de persuasion.

Olaf Scholz, l’hôte de la rencontre, espèrait faire la démonstration d’Eune politique concertée des démocraties mondiales » – surtout face à Moscou et Pékin.
Egalement à l’agenda des discussions : les changements climatiques et la crise économique liée à la pandémie de Covid-19 et à la guerre en Ukraine.

Olaf Scholz a déclaré en amont de la rencontre que – je cite – « les démocraties du futur se trouvent en Asie et en Afrique ».

Zelensky réclame de nouvelles sanctions contre la Russie

Pendant ce temps, les bombardements se poursuivent en Ukraine. Des missiles ont été envoyés dans la région d’Odessa qui ont touché au moins six personnes. Un missile russe a également frappé aujourd’hui un centre commercial qui a pris feu, dans le centre de l’Ukraine. Pour l’heure, un gouverneur local évoque 10 morts et une quarantaine de blessés.

Volodymyr Zelensky est intervenu au sommet du G7 par visioconférence. Il réclame aussi aux dirigeants réunis, la livraison d’un système de défense antiaérien ainsi qu’une aide financière pour la reconstruction de son pays. Et demande aux pays riches de tout faire pour que la guerre cesse d’ici la fin de l’année.

« Une césure profonde »

Le G7 accorde à l’Ukraine une aide financière qui pourra aller jusqu’à 28 milliards d’euros pour combler son déficit et assurer les services publics. Le document publié dans la journée ne précise pas s’il s’agit de subventions ou de crédits. Olaf Scholz a déclaré lundi soir :

« Nous avons tous assuré que nous continuerons à soutenir l’Ukraine dans sa défense contre la Russie. Ce qui est clair, c’est que cette guerre est une césure profonde dans les relations internationales. Plus tôt, j’ai très consciemment appelé cela un « tournant », parce qu’à compter de l’attaque de la Russie sur l’Ukraine, toutes les règles, tous les accords que nous avons passés les uns avec les autres sur la façon dont coopèrent des États ont été brisés. En particulier l’accord selon lequel les frontières ne doivent pas être déplacées par la force. » Quant aux nouvelles sanctions décrétées par le G7 contre la Russie, elles touchent essentiellement à la production d’équipements militaires et aux chaînes d’approvisionnement. Le chancelier allemand estime que les relations avec les Russie ne pourront plus redevenir comme avant la guerre en Ukraine.

Protestation anti-G7

Mais le sommet du G7 est aussi critiqué. Quelques dizaines de manifestants ont protesté en Bavière pour réclamer la refonte complète du système économique mondial. Ils critiquent notamment les effets néfastes du capitalisme sur l’environnement et l’aggravation des inégalités.

A Paris, des militants écologistes et altermondialistes se sont aussi réunis, devant le siège du Fonds monétaire international, pour réclamer aux dirigeants des pays riches d’annuler la dette des pays du Sud. Zita, militante du mouvement Extinction Rebellion, explique :

« Aujourd’hui les pays du Sud, qui sont les plus vulnérables face aux conséquences du dérèglement climatique, et qui sont les derniers responsables de ce dérèglement climatique, se retrouvent complètement asphyxiés par une dette externe phénoménale.(…) Les taux d’intérêts que les pays du Sud ont de la part du FMI et de la Banque mondiale sont tout à fait exorbitants, puisque justement vulnérables aux conséquences du dérèglement climatique. Ils sont obligés d’extraire des ressources des énergies fossiles pour rembourser cette dette. Ces ressources aggravent le dérèglement climatique, et aujourd’hui la logique nous exhorte de sortir des énergies fossiles. On voit bien que l’on se retrouve dans une situation complètement bloquée, on est dans une impasse. Sachant qu’en plus les conséquences du dérèglement climatique, ce sont les pays du Nord qui en sont responsables. »

Sandrine Blanchard

Source: dw.com