Depuis mars, la capitale économique de la Côte d’Ivoire, Abidjan, connaît une transformation notable de son paysage urbain : des rues autrefois nommées en hommage à des personnalités françaises portent désormais des noms plus enracinés dans l’histoire et la culture locales. Cette opération de « re-nommage » s’inscrit dans une volonté politique et identitaire plus large d’africanisation de l’espace public.
La route menant de l’aéroport au centre-ville ne s’appelle plus Valéry Giscard d’Estaing, du nom de l’ancien président français, mais Félix Houphouët-Boigny, père de l’indépendance ivoirienne. De même, le boulevard de Marseille est devenu le boulevard Philippe Yacé, et celui de France a été rebaptisé en hommage à Marie-Thérèse Houphouët-Boigny, première Première Dame du pays.
Modernisation et mémoire collective
Selon Alphonse N’Guessan, responsable de l’urbanisme, cette démarche vise à moderniser le système de dénomination des rues, à un coût estimé à 17 millions de dollars, tout en répondant à un impératif identitaire : « Un nom doit refléter notre histoire, notre culture. » Ce processus, amorcé en 2021 mais visible sur le terrain depuis peu, s’étendra à 15 autres villes du pays d’ici 2030.
Les nouveaux noms sont choisis avec la participation de la société civile et des autorités traditionnelles, mettant en avant des figures ivoiriennes – politiques, artistes, sportifs, scientifiques – ou des concepts culturels.
Une tendance régionale, un positionnement particulier
La Côte d’Ivoire rejoint ainsi le Mali, le Niger et le Burkina Faso, qui ont également modifié les noms de rues pour effacer les marques de l’héritage colonial. Toutefois, à la différence de ces pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES) qui ont rompu avec la France à la suite de coups d’État, Abidjan demeure un allié stratégique de Paris. Ce repositionnement symbolique ne s’accompagne donc pas de rupture diplomatique, mais s’inscrit dans une dynamique de revalorisation nationale.
Un écho auprès de la jeunesse
Avec plus de 75 % de la population âgée de moins de 35 ans, cette réappropriation des noms de lieux répond aussi à un besoin de transmission. « Il est important pour les Africains de s’identifier au développement de la ville », explique l’urbaniste Wayiribe Ismail Ouattara. Pour Franck Hervé Mansou, technicien de 31 ans, « les noms des rues devraient appartenir à des révolutionnaires ivoiriens » afin que les jeunes sachent « qui est qui ».
Loin d’un simple changement de signalétique, ce projet traduit une volonté de réinscrire la mémoire nationale dans l’espace public. Une manière, selon les autorités, de faire en sorte que les Ivoiriens, notamment les jeunes, se reconnaissent pleinement dans les noms qu’ils croisent au quotidien.
Souhaitez-vous que je vous aide à comparer cette initiative à celles du Mali ou du Burkina Faso pour en tirer des tendances régionales plus larges ?
La rédaction
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