La crise énergétique au Mali connaît un nouvel épisode inquiétant. Après les scandales liés au vol de carburant destiné aux groupes électrogènes et à l’acquisition controversée de nouveaux équipements, c’est désormais une question de dettes impayées qui met la Société Énergie du Mali (EDM-SA) sous le feu des projecteurs.
Dans une lettre officielle datée du 25 avril 2025 (n°00199-DG-SG-DF-SOGEM), la Société de gestion de l’énergie de Manantali (SOGEM), organe régional de production énergétique, tire la sonnette d’alarme. L’organisme, basé au sein de l’Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sénégal (OMVS), exige de la société EDM-SA le paiement immédiat d’une ardoise dépassant les 54 milliards de F CFA.
Le ton de la correspondance est sans équivoque. Le directeur général de la SOGEM, le Mauritanien Mohamed Mahmoud Ould Sidi Elimine, n’a pas mâché ses mots. Il rappelle que les installations actuelles ont été financées grâce à des crédits contractés par les États membres — le Mali, la Mauritanie et le Sénégal — pour plusieurs centaines de milliards de francs CFA. Face à ce contexte, il dénonce le comportement d’EDM-SA, qualifié de « partenaire, client et collègue », mais qui met aujourd’hui en péril la pérennité du système énergétique régional.
Dans sa lettre, le directeur général va jusqu’à parler de « question de vie ou de mort » pour les installations. Il appelle la société malienne à faire preuve de responsabilité afin d’éviter une issue « funeste » dont l’histoire pourrait retenir le nom d’EDM-SA comme principal fautif. « Cela ne peut plus attendre », insiste-t-il.
Pourtant, il y a peu, les usagers commençaient à saluer les efforts d’EDM-SA dans l’amélioration de la fourniture d’électricité. Mais cette nouvelle alerte vient raviver les inquiétudes persistantes sur la gouvernance, la transparence et la viabilité du secteur énergétique national. Un proverbe bambara résume bien la situation : « La fourmi ne peut pas abandonner ses habitudes », en d’autres termes, les vieux démons semblent toujours rôder.
Un acteur clé menacé
Créée en 1997, la SOGEM a été conçue pour piloter le Projet Énergie de Manantali au bénéfice des trois États membres de l’OMVS. Aujourd’hui, elle joue un rôle stratégique dans le développement du secteur énergétique sous-régional. Sa filiale, la SEMAF-SA, exploite notamment les complexes hydroélectriques de Manantali, de Félou et de Gouina, ainsi qu’un important réseau de transport haute tension.
La dette contractée par EDM-SA ne concerne donc pas un simple prestataire, mais un acteur clé dont dépend une large part de l’approvisionnement électrique dans la sous-région. En cas de défaut persistant, les conséquences pourraient être dramatiques, tant pour le Mali que pour ses voisins.
Le gouvernement malien osera-t-il prendre ses responsabilités face à cette mise en demeure ? La survie du réseau énergétique interconnecté en dépend.
La rédaction
Diasporaction.