CRISE AU NORD / CLASSE POLITIQUE / Dioncounda Traoré : « Oui à l’intérim, mais non à la transition »

 

Dioncounda Traoré a retracé l’évolution de la crise du nord depuis l’attaque le 17 janvier 2012, du camp militaire et l’unité méhariste de Ménaka, par des hommes armés se réclamant du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), suivie de celle des garnisons de Tessalit et d’Aguelhok le 18 janvier, ainsi que des combats les 19 et 20 janvier entre des membres des forces armées nationales et des combattants rebelles dans le secteur d’Aguelhok. « Le camp militaire de cette localité a de nouveau été attaqué le 24 janvier.

Des exécutions sommaires de militaires faits prisonniers ont eu lieu à la suite de cette attaque. Une centaine de victimes auraient été dénombrées ». Les hostilités atteindront la garnison d’Andéramboukane (cercle de Ménaka), puis Léré (cercle de Niafunké), Tinzawaten. La manifestation d’épouses et d’enfants de militaires et des violences exercées à Kati sur les propriétés et domiciles de citoyens appartenant à la communauté Kel Tamasheq ont été évoquées par Dioncounda Traoré. Outre Kati, ces manifestations se sont étendues le 2 février à Bamako où de groupes de jeunes ont brûlé des pneus, posé des barricades, pillé des biens privés.

Plusieurs compatriotes d’origine Touareg ont reçu des menaces, prélude d’un départ de nombre citoyens, cadres et personnalités touarègues et arabes vers l’intérieur et l’extérieur du pays. (Lire Introduction du document « Initiative des partis politiques pour la paix et la stabilité au Mali », contenant des actions urgentes. Au cours de cette conférence de presse le document de « plan d’action pour la paix et la stabilité au mali », proposé par la classe politique, a été présenté par Choguel Maïga.

« L’heure est grave, l’essentiel est menacé » Dioncounda Traoré a insisté sur les motivations du collectif, qui est de s’impliquer pour sauver l’essentiel, à savoir l’intégrité territoriale, l’unité nationale, la démocratie, la République qui sont menacées. Mais pour tout cela, il faut que des armes se taisent pour que des élections se tiennent dans des conditions optimales, pour ne pas priver une partie de la nation, des citoyens, de leurs droits vote et que dans certaines régions les élections puissent se tenir dans le calme et la sérénité. Il faut créer des conditions pour le retour des refugiés dans leurs localités respectives pour que les élections puissent être les plus crédibles et transparentes possibles. Notre objectif premier, c’est de créer des conditions pour que les élections se tiennent à date constitutionnelles échues. Les élections sont effectivement la préoccupation majeure de beaucoup de Maliens.

Cependant « le peuple malien est angoissé, l’intégrité de son territoire est menacée, l’unité nationale est menacée … ». L’heure est grave, l’intégrité territoriale est menacée, l’unité nationale est menacée, la démocratie, la République sont menacées, c’est l’essentiel qu’il faut conserver, selon le Pr Dioncounda Traoré. Pour lui, la tenue des élections, en respectant les échéances, est également une préoccupation première du Président Amadou Toumani Touré qui le leur a dit. Il reste à tous d’agir comme si des élections vont se tenir à des dates constitutionnelles normales. Le collectif des partis va agir pour faire taire les armes et créer les conditions de la tenue d’élections paisibles et propres. « Nous nous refusons d’envisager que les élections ne se tiennent pas car si elles ne se tiennent pas tout peut se passer, tout est possible», selon lui. C’est dire que la période que nous traversons est extrêmement grave. Pour Dioncounda Traoré, des juristes sont en train de réfléchir à la question.

En ce qui concerne les négociations envisagées dans le cadre d’un dialogue prévu par le plan d’action, le collectif n’exclut personne : tous les contacts nécessaires seront pris, y compris ceux des rebelles. C’est essentiellement la classe politique qui va le faire, car si le gouvernement et le président de la République sont disposés pour le dialogue et le cessez-le feu, l’Etat malien ne reconnais pas les rebelles. Le conférencier n’a pas éludé la question sur l’hypothèse où l’élection présidentielle ne sera pas tenue. Dioncounda se refuse toute éventualité de diriger une transition au motif qu’il est le président de l’Assemblée nationale. Le mandat du président de l’Assemblée et celui du président de la République ne sont tellement éloignés, le premier s’en va le 8 juin et le second le 10 août.

Evoquant les scenarii dont une prorogation du mandat d’ATT, Dioncounda se montre très préoccupé, car selon lui, « tout peut en sortir, même un coup d’Etat peut en sortir. Et cela peut nous conduire à une transition de deux ans, nous ramener à la case départ, dans des conditions qui sont infiniment moins bonnes qu’en 1991. Nous avons le devoir aujourd’hui de nous battre pour que cela n’arrive pas. Nous nous battrons pour que ces élections aient lieu » Pour ce qui le concerne, le président de l’Assemblée nationale a refusé de prêter le flanc quand il sera question de le désigner comme président d’une l’hypothétique ou éventuelle transition. « Une transition n’est pas mon affaire. L’intérim oui, mais la transition, ce n’est pas moi ».

B. Daou

Le Républicain 17/02/2012