Choix du fichier pour les élections de 2012: Les germes de la contestation

 

En commun accord avec la classe politique, le ministère de l’Administration territoriale et des Collectivités locales avait mis en place une commission d’experts chargée de proposer un fichier consensuel sur la base duquel doivent se tenir les élections de 2012.

En fait, il s’agissait de faire le choix entre le fichier issu du Ravec (Recensement administratif à vocation d’état civil) et le Race (Recensement administratif à caractère électoral) amélioré. Composée des représentants des partis politiques, de l’administration et de la société civile, la commission a livré ses résultats où la deuxième option (le Race amélioré) a été retenue. «L’exécution du projet Race se poursuit. Son état d’avancement ne permet pas, à ce jour, d’en extraire un fichier électoral pour la tenue des élections générales de 2012, dans le respect des délais constitutionnels. Le fichier électoral existant, issu du Race quant à lui, comporte des insuffisances», ont relevé des membres de la commission d’experts. Mais ce n’est pas sans la désapprobation de la classe politique dont la majorité souhaitait le Ravec.

Au cours de la réunion du Cadre de concertation avec les partis politiques, le mardi 5 juillet dernier au Gouvernorat du district où elle a été mise au courant, les échanges ont été houleux et sont déjà à l’image de la contestation à laquelle il faudra s’attendre au lendemain des joutes électorales de 2012.

Pour le Pr. Younouss Hamèye Dicko du RDS, le chef du projet Ravec doit  rendre compte à la Nation malienne. «Il n’a pas dit pourquoi le travail du Ravec n’est pas terminé. Des milliards  y ont été injectés. On nous a fait nourrir d’espoirs, puis aujourd’hui, on vient nous raconter, après un travail de touriste et de visites guidées des experts que nous avons mandatés, que le Ravec n’est plus possible. Nous prenons acte du rapport des experts tout en désapprouvant fortement la manière dont ce rapport a été rendu public. Nous sommes déçus de voir comment ce travail a été détourné de son objectif».

Pour d’autres intervenants, on parle de «Fichier électoral consensuel (Fec)» qui n’est pas le Race mais le Race amélioré. Comment améliorer le Race si ce n’est pas en y intégrant des données biométriques? Ceci rejoint la recommandation du Comité d’experts relative à la garantie de l’identification correcte des électeurs. Mamaye Kassogué des Pur et du Pari, Abdoulaye Amadou Sy des Pur et du Mplus-Ramata ont abondé dans le même sens. «Dire que le Ravec ne sera pas achevé dans le délai constitutionnel, je n’y crois pas, quand on sait que nos experts étaient partis en tourisme dans la mesure où ils n’étaient pas autorisés à entrer en possession des données, ils ne pouvaient même pas toucher à un clavier d’ordinateur …», dira M. Kassogué.

Pour Choguel Maïga du MPR, il est nécessaire que le Comité remette aux représentants des partis politiques son rapport intégral. Les problèmes politiques, surtout dans un contexte électoral, a-t-il indiqué, sont des problèmes de confiance. Lorsqu’il n’y a pas de confiance entre les partis politiques et le Gouvernement, même si on nous dit la vérité, on se posera la question de savoir ce que l’interlocuteur a derrière la tête. «Nous prenons acte du choix des experts avec la confiance instaurée par le Gouvernement grâce au dialogue du cadre de concertation. Il faut à présent un suivi permanent du reste du processus. On sait désormais qu’il est matériellement impossible d’organiser les élections dans le délai constitutionnel avec un fichier issu du Ravec. Il faut maintenant recenser toutes les méthodes de fraudes des élections et y trouver des parades; toujours dans un cadre de concertations permanent», a-t-il indiqué.

Ceux-ci ne sont pas les seuls, car même Madani Tall, conseiller aux affaires économiques du président ATT et également président du parti ADM (Avenir-Développement du Mali), avait eu à exprimer ses préoccupations par rapport au choix du Race qu’il considère comme source de constations. « Rien ne doit être de trop pour un fichier à base du Ravec. Pensez-vous que des partis politiques comme le Cnid, le Parena, Sadi, Rpm, Urd…sachant bien que le Race est un facteur de fraude, vont accepter les résultats des élections de 2012 ? Ne semons pas dès à présent les graines de la contestation », avait-il averti au cours d’un entretien avec la presse. C’est dire que depuis maintenant, ce sont les germes de la contestation des élections de 2012 qui sont lancées.

 

Abdoulaye Diakité

L’ Indicateur Renouveau 08/07/2011