Bilan du CSCRP 2007-2011 Des défis herculéens à relever

Un tour à la Cellule Technique CSLP, nous a permis de savoir que la revue à mi-parcours du CSCRP 2007-2011 a montré qu’en dépit d’un contexte défavorable marqué notamment par l’impact des crises successives, sur la période 2007-2009, la croissance de l’économie malienne a atteint 4,6%. Ce niveau de croissance réalisé dans un environnement économique international difficile, est sans doute le signe de l’impact positif des mesures prises par le Gouvernement pour faire face aux crises.

Il ressort que le taux de croissance du Produit Intérieur Brut (PIB) a été de 4,3% en 2007, 5,0% en 2008 et 4,5% en 2009. La croissance s’est maintenue à un niveau plus élevé que celui observé à l’échelle de l’UEMOA (3,3% en 2007, 3,7% en 2008 et 2,9% en 2009). L’inflation a été maîtrisée dans les limites fixées par les critères de convergence de l’UEMOA. En matière de pauvreté monétaire, l’incidence de la pauvreté monétaire est estimée à 43,7% en 2009 soit une baisse de 3,4 points par rapport aux 47,4% de 2006.

Depuis près d’une décennie, notre pays enregistre dans la sous-région ouest africaine de bonnes performances, particulièrement dans le domaine macro-économique. De 2002, année de départ de la première génération (2002-2006) du Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (CSLP), à 2010 (à un an de l’échéance du CSLP 2è génération ou Cadre stratégique pour la croissance et la réduction de la pauvreté CSCRP), le taux moyen de croissance économique tourne autour de 5 %. Sur la même période sur la base des enquêtes et études réalisées, la pauvreté enregistre un recul aussi bien en milieu rural qu’urbain. Cette évolution s’est traduite par une amélioration continue des conditions de vie des populations telle qu’elle ressort de l’évolution des indicateurs socio-économiques.

Microfinance et réduction de la pauvreté féminine

La lutte contre la pauvreté constitue une préoccupation nationale depuis plus d’une décennie. A ce titre, la stratégie de lutte contre la pauvreté au Mali fonde un grand espoir sur le secteur de la microfinance. Son développement  est inscrit parmi les actions prioritaires du CSCRP. Le gouvernement du Mali, à travers le CSCRP 2007-2011 accorde désormais une plus grande importance à la promotion de la microfinance comme un instrument de lutte contre la pauvreté.

Selon  l’analyse du Bulletin Statistique sur la Femme et l’Enfant au Mali, produit en  2009 sur la base des statistiques fournies par la Cellule de Contrôle et de Surveillance du Système Financier Décentralisé, il ressort une augmentation des bénéficiaires de microcrédit. En 2006, on note  330 000 Hommes soit 55% contre 270 000 Femmes soit 45%, pour la période 2009, il y a 530 000 Hommes soit 54,1% contre 450 000 Femmes soit 45,9%.

Malgré les progrès enregistrés dans le secteur de la micro finance à travers les organismes d’épargne et de crédit, l’accès aux services financiers reste encore limité pour les femmes, entravant du coup un véritable entreprenariat féminin.

Face à cette contrainte, des défis restent à relever à savoir l’amélioration de l’accès des populations démunies notamment les femmes aux services financiers de proximité et le développement des produits financiers innovants et adaptés aux besoins de ces couches les plus défavorisées de la population.  

Renforcer les  capacités  économiques des femmes

Après plus de trois ans de mise en œuvre, le CSCRP 2007-2011, est encore mal connu des acteurs locaux qui doivent non seulement contribuer à sa mise en œuvre, mais également à son suivi quotidien et à son évaluation régulière.  Cela se ressent particulièrement chez les femmes rurales qui sont  majoritairement des forces  de production. Au Mali, les femmes constituent près de 60 % de la force de production agricole et produisent environ 80 % des denrées alimentaires. Malgré cette place prépondérante dans la production, les femmes rurales ont longtemps été négligées dans le processus de développement.

A ce propos, la présidente de la Fédération Nationale des femmes Rurales du Mali (FENAFER), Mme Sirébara Fatoumata  Diallo, a  regretté le déficit d’appropriation du CSCRP avant de mettre l’accent sur l’approche communautaire. En ce sens que les réelles  préoccupations  des  femmes ne sont discutées  pas en leur présence.

Elle pense qu’au-delà de la mise du CSCRP, le sort  des femmes rurales demeure peu enviable : « malgré leur rôle majeur dans la vie de leurs familles et de leurs sociétés, celles-ci participent peu aux affaires de la cité et ne jouissent pas de tous les droits civiques, économiques et politiques. Les femmes rurales contribuent activement au développement socio-économique de la zone, malgré des moyens rudimentaires ».

Fort préoccupée, la patronne des femmes rurales demande aux décideurs d’améliorer les moyens de production des paysannes, faciliter l’accès et le contrôle des femmes à  la terre et à l’équipement et renforcer les  capacités  économiques des femmes.

Sans couper l’herbe sous les pieds de la présidente de la FENAFER, la secrétaire permanente de la Coordination des Associations et ONG Féminines du Mali (CAFO), Mme Kouyaté Goundo Sissoko,  s’est réjouie de l’appropriation du CSCRP par sa Coordination. Selon elle, le fait d’intégrer la Politique Nationale Genre est un acquis. Toutefois, elle n’a pas manqué de souligner que beaucoup de défis restent à relever pour parvenir à la réduction de la pauvreté féminine. Il s’agira pour elle d’améliorer les conditions de vie des femmes rurales qui tirent l’essentiel de leurs revenus dans la cueillette des ressources naturelles. Ce qui passe par des actions axées sur l’alphabétisation, l’accès aux soins de santé et aux ressources financières.

S’y ajoute le renforcement  du pouvoir économique des femmes qui évoluent majoritairement dans le secteur informel. A ce sujet,  la secrétaire permanente de la CAFO, insiste sur la nécessité  de développer l’entreprenariat féminin  tout en facilitant l’accès au microcrédit et en renforçant les capacités afin de gestion efficace et efficiente des fonds alloués.  

Malgré ces résultats encourageants, le pays reste confronté à un certain nombre de défis et  de faiblesses qu’il convient de relever et corriger pour assurer une croissance forte réductrice de pauvreté, à savoir  des défis environnementaux majeurs tels la dégradation des sols et du couvert végétal, la désertification, l’ensablement du fleuve Niger, la pénurie en eau, la perte de la biodiversité, le changement climatique ;  la forte pression démographique dont les effets se traduisent par une pression de plus en plus insoutenable sur les ressources de production, ainsi que par une accélération de la demande intérieure en matière de nutrition, d’alimentation en eau potable, de santé, d’éducation, de formation et d’emploi des jeunes ; le défi de l’atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement d’ici 2015.

Par ailleurs, la croissance reste encore en deçà des objectifs de 7 % affichés nécessaires à obtenir une réduction soutenue de la pauvreté. En cela, Sékouba Diarra, coordonateur de la Cellule Technique du CSLP, pense que la pauvreté, sous toutes ses formes, constitue le défi majeur auquel notre pays est confronté à l’instar de nombre de pays d’Afrique. Le défi reste encore grand en matière de développement humain, notamment dans les domaines de l’éducation, la santé, la nutrition, l’accès aux infrastructures de base (transports, énergie et télécommunication) et de la préservation de la paix et de la sécurité.

Aussi, il convient de promouvoir l’égalité de sexes et l’autonomisation des femmes. En plus, les appuis attendus des partenaires au développement au Mali devraient être  ciblés de manière à avoir des impacts rapides sur les conditions de vie des populations pauvres notamment les femmes.

Mahamane Maïga

Le Scorpion 15/06/2011