Avocat aux Barreaux de Paris : Opinion d’un avocat

Le Colonel Assimi Goïta est désormais le seul commandant à bord du navire de la transition au Mali

La trahison d’Assimi GOITA 

« Ce n’est pas le doute qui rend fou, mais la certitude et le Mali est ma certitude » 

C’est l’histoire de la trahison de la Transition, notre Transition, celle qui devrait conduire le Mali sur le droit chemin des nations émergentes.

Hélas !

Les sauveurs annoncés sont en passe de devenir des fossoyeurs confirmés.

Et vous, Colonel Assimi GOITA, je vous désigne comme le seul et unique responsable de tout ce qui s’est passé et de tout ce qui va advenir. 

La seule cartouche qui vous reste, oubliez tout, ni la sécurisation du centre et du Nord Mali, ni les réformes des textes fondamentaux de l’Etat, ni plus rien ne doit encore mobiliser votre ardeur, la seule chose qui vaille et nous importe aujourd’hui : organiser des élections transparentes et allez-vous-en ! 

Retourner à vos fonctions sacrales, vous êtes autant disqualifié que ceux que vous venez de disqualifier alors qu’ils ont été parés, par votre volonté, de l’onction de la reconnaissance de la communauté internationale à laquelle le Mali appartient.

Pour si peu, une question de divergence dans l’ordonnancement des priorités de la transition, dont les leviers vous appartiennent, vous prenez la responsabilité de replonger le pays dans une crise institutionnelle qui ruine son image.

Vous utilisez l’avion de chasse contre vos marionnettes en carton alors qu’il vous suffit tout simplement de les recadrer publiquement, devant la nation toute entière. 

Quand vous êtes venu, le 18 août 2020, pour mettre fin au laisser-aller et au laisser-faire érigés en mode de gouvernance sous IBK, vous nous aviez promis une république exemplaire.

Vous nous aviez promis une démocratie participative et inclusive qui ne laisse personne au bord de la route.

Vous nous aviez parlé de l’amour de la patrie qui sera inscrite au fronton du ciel malien et surtout la reconstruction d’une armée de mission.

En bon soldat et homme d’honneur, vous nous aviez également promis une transparence dans la gestion des affaires de l’État.

Et puis, vous êtes parti en chevauchant avec des hommes de paille. 

Aujourd’hui, au lieu de la transparence promise, nous assistons à une forme de « transperçance » morbide de nos institutions au gré des intérêts dont vous êtes seul juge… Au lieu de proposer aux Maliens une autre vision objective et crédible d’accès aux fonctions publiques, nous assistons à une militarisation à outrance de toutes les parois de l’administration publique.

Qui n’a pas souri en lisant ces internautes qui s’en donnent à cœur joie « Urgent ! Un colonel nommé pour gérer la grande mosquée de Bamako ».

Le CNSP, pourtant dissous par décret présidentiel, n’a jamais été autant fort et présent que ce 25 mai 2021. 

Mais en même temps, toute la République est unanime y compris vous-même dans votre communiqué du 25 mai 2021 que le pays est mal gouverné en 09 mois, sous votre suprême “’sus” présidence.

Le népotisme a toujours guidé vos choix. Bah N’DAW comme Président de la transition est votre trouvaille à vous seul.

Le Premier ministre Moctar OUANE et l’ensemble de son gouvernement n’étaient que des personnes recommandées sur fond de calculs politico-religieux sans aucun égard pour l’intérêt du pays. 

Leur échec est votre échec

Vous avez déjà fini avec la réforme et la relecture des textes fondamentaux de l’État pour les 100 prochaines années.

Où est la place d’intervention que vous avez réservée aux différents ordres professionnels aguerris dans ce dispositif ?

Je ne parle pas des individus nommés, mais je veux parler des organisations émettant un avis commun, les universitaires du Mali, les ordres des notaires, des avocats, huissiers, magistrats, les experts comptables, les patrons du Mali, pourvoyeurs d’emplois et payeurs d’impôt, les commerçants, les associations paysannes, les artisans ?

Où sont-ils ?

Ces experts dont l’avis compte plus que tout. 

Nous voyons en définitive que tout ce qui vous a guidé en ces moments cruciaux de la vie de la république n’était pas la recherche de l’inclusivité, la seule vertu à laquelle croient les Maliens.

Vous aviez institué, en tout cas, jusqu’à maintenant, un véritable État de connivence que je dénonce ici.

Une connivence pour la promotion d’un clan au détriment d’un autre, une connivence autour de certains personnages ubuesques pour le maintien des rentes et des largesses inconsidérées de l’État providence.

Être ministre dans un gouvernement en temps de crise ou être Président ou vice-président d’un organe législatif comme le CNT dans le Mali d’aujourd’hui doit être considéré comme le couronnement d’une carrière au service de la nation, d’un parcours mérité et surtout d’un savoir-faire.

Mais nommer pour récompenser ou plaire dans le Mali d’aujourd’hui donne des insomnies à tout patriote.

Le constat d’aujourd’hui est un crève-cœur, le pays est totalement paralysé, divisé et incontrôlable.

Les hommes que vous aviez librement choisis ont échoué.

C’était prévisible, heureusement que le remaniement ministériel a mal tourné, sinon qu’allait-il advenir de l’État de connivence ?

Dieu seul sait. 

Et vous voulez faire, paraît-il, l’exact inverse de la posture des 9 premiers mois de la transition, reconstruire avec l’ennemi d’hier le M5RFP. Vous vous apprêtez, paraît-il, encore à choisir dans la pure connivence de circonstance un Premier ministre des rangs du M5RFP.

Ainsi soit-il !

C’est un mouvement que j’ai suivi et dont les acteurs ont forcé mon admiration par la constance de leurs discours dans le combat. 

Sachez-le, cher Colonel Goita, ce que la République du Mali vous demande, c’est de faire avec des hommes qui ont une expérience dans la pratique de l’administration publique.

Le Mali est dans le Top 10 des plus grands pays de la planète, son administration exige d’avoir de la maestria et une certaine envergure.

Jetez à la poubelle tous ces plaisantins qui ne pensent qu’à se réaliser personnellement en pleine tempête.

Vous n’avez plus droit à l’erreur.

Le peuple est fatigué et il vous demandera des comptes un jour.

Vous connaissez, peut-être, l’histoire amérindienne du petit colibri qui voulait éteindre seul un incendie de la forêt avec quelques gouttes d’eau de son bec.

On le prenait pour un fou.

Mais le colibri répond : “Je sais, mais je fais ma part.”

Moi aussi, je fais ma part en m’adressant à vous parce que je ne peux pas regarder, impassible, le Mali brûler sans faire ma part. 

Sachez que l’autorité militaire de par sa nature reste indéfiniment sous les ordres de l’autorité politique.

C’est la forme d’exercice du pouvoir qui convient au monde moderne dans lequel nous vivons.

On a, tous, rêvé des Sankara pour changer irrévocablement le Malien d’aujourd’hui contre son plein gré.

Mais il faut l’admettre, le temps des Sankara est définitivement révolu, l’or brut se fait rare. Trouvez-nous les ressources pour nous sortir rapidement de ce trou dans lequel vous nous aviez mis.

Commencez par réduire le train de vie de l’État à tous les niveaux, arrêtez avec ces voyages inutiles pour des animateurs d’une transition, mettez de l’ordre à nos frontières, dans nos villes et surtout dans la circulation routière et dans nos services publics.

Protégez nos ressources naturelles, on est en train de piller le pays, il ne revient pas à la transition d’attribuer des permis miniers pour quelques raisons que ce soit.

Au contraire, la transition doit être un grand moment pour faire le point et poser les jalons d’une meilleure gouvernance pour le futur. 

Pour cela, il vous faut appeler à l’aide, l’État est un mammouth. Il faut vous entourer de ceux qui savent faire bouger le mammouth pour le peu de temps qui vous reste pour rentrer dans l’histoire.

Vous devez demander un moratoire social, mobiliser les jeunes autour des actions de salubrité nationale.

Mettez l’intérêt de la nation au-dessus des postes ministériels futiles et fétides. 

Votre communiqué justifiant cet énième coup d’état savamment relooké en “mise hors de leurs prérogatives” n’a convaincu personne surtout pas la communauté internationale.

Vous êtes désormais sur le banc des accusés de l’histoire.

Nous ne pouvons accepter de descendre encore plus bas, dans la latrine des nations. 

Tous mes vœux vous accompagnent. 

A bon entendeur, s’aligne ! 

Me Alassane Aldior DIOP

Source: La Mutation