AFRIQUE : La démocratie est-elle une réalité ?

La honte est si grande que les démocrates africains se demandent si l’Afrique n’est pas en train de reculer à pas de géant vers les temps de la préhistoire ou de l’antiquité. Pour gérer la crise post-électorale en Côte d’Ivoire, il est impensable, pour des Présidents comme Robert Mugabe du Zimbabwe, Pedro Pirez du Cap Vert, José Eduardo Dos Santos de l’Angola, Yuweri Museveni de l’Ouganda ou Yahaya Jameh de la Gambie, de voter contre le coup d’Etat électoral d’un camarade de leur clan : Laurent Koudou Gbagbo.

Dans ces pays, il n’y jamais eu de démocratie. Peut-être, ce sera pour demain ? Sans la démocratie, certaines personnes n’allaient jamais porter le titre de Président de la République dans certains pays africains. Au Ghana, John Atta Mills doit remercier le Capitaine d’Aviation John Jerry Rawlyngs, car si ce dernier n’avait pas instauré la démocratie, il aurait été difficile, voire impossible, pour un John Atta Mills, de s’asseoir sur le fauteuil présidentiel. Il en est de même pour le Dr. Thomas Boni Yayi du Bénin, Ernest B. Koroma de la Sierra Leone, Maître Abdoulaye Wade du Sénégal, Jacob Zuma de l’Afrique du Sud, le Pr. Alpha Condé de la Guinée Conakry. A cette liste, on peut ajouter les Généraux Présidents Mohamed Ould Abdel Aziz de la Mauritanie et Amadou Toumani Touré du Mali, dont le cas est un peu particulier.

Le maintien de Laurent Gbagbo au pouvoir, contre la volonté du peuple ivoirien et des démocrates africains, ne pourrait qu’arranger les affaires de ces assoiffés de pouvoir qui tiennent à tout prix conserver leurs sièges présidentiels. En Afrique, les Présidents sont très nombreux à soutenir le putschiste Laurent Gbagbo, mais en coulisse. Et aucun d’eux n’a engrangé moins de dix ans au pouvoir.

Ils sont là, encore là, toujours là !

Ils, c’est José Eduardo Dos Santos de l’Angola, Robert Mugabe du Zimbabwe, Idris Deby Itno du Tchad, Yahaya Jameh de la Gambie, François Bozizé de la Centrafrique, Theodoro Obiang N’Guema Bazogo de la Guinée Equatoriale, Abdel Aziz Bouteflika de l’Algérie, Mouammar El Kadhafi de la Libye, Mohamed Hosni Moubarak de l’Egypte, Dénis Sassou N’Guesso du Congo Brazzaville et Blaise Compaoré du Burkina Faso. Le cas de ce dernier est quelque peu particulier. Après avoir pris le pouvoir suite à un coup d’Etat, Blaise Compaoré est parvenu à instaurer, dans son pays, la démocratie et des élections présidentielles. Même si ces élections sont loin d’avoir été transparentes, elles ont quand même été organisées de façon régulière.

La démocratie africaine ne mérite pas un tel sort !

Et si on optait pour la solution militaire pour déloger Laurent Gbagbo de la Présidence de la République de Côte d’Ivoire. Et si on donnait raison à Raïla Odinga, victime du même scénario ? Et si on laissait Goodluck Jonathan du Nigeria et Ernest B. Koroma de la Sierra Leone aller au bout de leur logique ? Et si l’opinion internationale était passée à la vitesse supérieure ? Et si Ban Ki Moon ordonnait l’utilisation de la force légitime ? Et si la France, les Etats-Unis, la Grande Bretagne et les autres grandes puissances prenaient leurs responsabilités, à travers les  forces de l’ONU-CI et la force française « Licorne »? Et si, et si…

Autant de possibilités, éventualités ou autres solutions qui s’offrent à l’opinion internationale pour faire respecter la voix du peuple et de la démocratie en Côte d’Ivoire. Ce qui paraît, c’est qu’en retardant l’échéance de son départ, Laurent Gbagbo ne peut que renforcer davantage son arsenal de guerre et recruter du coup d’autres mercenaires, en plus des premiers venus d’Angola et du Libéria.

Trois victimes : la première est nationale, la deuxième et la troisième concernent la sous région

La première victime de la crise post-électorale en Côte d’Ivoire est bel et bien la population ivoirienne qui en souffre énormément. En plus de la crise économique, cette population est victime de la barbarie hors pair qu’elle subit tous les jours de la part de Simone Ehivet Gbagbo, « la tueuse » et super chef de « L’escadron de la mort ». Les Ivoiriens craignent les balles des mercenaires libériens et angolais ; ils craignent également l’attitude de ce Général d’armée répondant au nom du « lâche » Philippe Mangouh.

La deuxième victime s’appelle la sous région qui souffre énormément de cette crise. Economiquement, rien ne va plus dans certains pays voisins de la Côte d’Ivoire, notamment au Mali, au Burkina Faso et au Niger, tous des pays enclavés et n’ayant aucun accès à la mer. La troisième victime : les étrangers africains vivant en Côte d’Ivoire et qui sont les plus grandes victimes de la crise post-électorale ivoirienne, qui meurent par centaines sous les coups des canons de Laurent Gbagbo, de sa femme Simone Ehivet et de ses mercenaires et gardes déloyaux.

Chaque jour, des ressortissants africains tombent par dizaines sous les balles de la Garde de Gbagbo avec à leur tête un « habitant du Cabanon » (Gbagbo) et des milices acquis à sa solde. Avec tout le scénario qui entoure cette crise, il sera très difficile, voire impossible que Laurent Gbagbo quitte le pouvoir.

Le slogan qui serait utilisé dans les locaux de l’Union africaine par certains Chefs d’Etat en place est : « Soutenons Gbagbo pour conserver nous aussi nos fauteuils. Tant pis pour Alassane Dramane Ouattara ; tant pis pour la démocratie en Afrique ; tant pis pour les démocrates africains ; tant pis pour l’ONU-CI, l’ONU, l’Union européenne ; tant pis pour  les Nations Unies ; tant pis pour la France et les Etats-Unis ; tant pis pour Goodluck Jonathan et la CEDEAO ».

En enterrant la démocratie en Afrique, l’UA vient d’entériner le coup d’Etat électoral de Laurent Gbagbo. En conclusion, l’on semble de part et d’autre s’apprêter à accueillir de nouveau l’avènement des hommes en uniforme à la tête de nos Etats.

Par Zhao Ahmed A. Bamba

Le Coq 31/01/2011