A propos de la révision constitutionnelle, ce lundi : Jusqu’où ira le Parena ?

Dioncounda Traoré  a convoqué le ban et l’arrière ban de l’Assemblée nationale, ce lundi pour voter le projet de révision constitutionnelle auquel Att tient comme à la prunelle de ses yeux. Les « derniers réglages » par les émissaires du président de la République permettent déjà d’anticiper un vote massif pour le projet. « Nous n’avions pas été suffisamment briefés », déclare un des députés qui, lors de l’audition d’il y a deux semaines  maltraitèrent le  ministre Daba Diawara, le pilote de la réforme. A l’origine de la défiance du parlementaire et de la demi-douzaine de ses homologues qui n’y allèrent pas ce jour avec le dos de la cuillère : des « problèmes de fond graves » et « l’inopportunité » de l’initiative à moins d’un an du départ d’un président frappé par la limite constitutionnelle.

Depuis, certains des « problèmes de fond graves » ont fait l’objet d’amendements et plus d’un grognon a été convaincu de l’opportunité de la réforme. Avec  le quart des députés, l’Adema sera d’un grand appui pour le président. Un de ses ténors, Ali Nouhoun Diallo, dix ans président du parlement sous Alpha Oumar Konaré, est résolument opposé à la réforme qui, en faisant la part trop belle au président de la République au détriment du Premier ministre, est purement et simplement un attentat contre la politique partisane. Pour lui, ce n’est plus à Att mais à son successeur d’initier la réforme.

Vers le oui massif      

Il peut bien avoir prêché  dans le désert, un environnement connu pour le ressortissant du Gourma qu’il est. Car l’appareil du parti, à commencer par son président, Dioncounda Traoré au perchoir depuis 2007, ne l’entend pas de cette oreille : « l’Adema fait partie de la majorité présidentielle et elle accompagnera le président. Point-barre », rappelle un cacique de ce parti.

 

 

Une position qui vaudra pour l’Urd de Soumaila Cissé, la deuxième force parlementaire du pays avec une trentaine de députés. Idem pour le Pdes de Ahmed Diané Séméga, troisième force du parlement et son suivant direct, le Rpm de Ibrahim Boubacar Kéita qui a réaffirmé sa loyauté vis-à-vis du président à son congrès du week-end dernier.  Le Cnid de Me Mountaga Tall ainsi que le Mpr de Choguel Maïga ont la même position.  « Le coup de pouce d’un président à un candidat a la même force qu’un obus », croit pouvoir expliquer un observateur.

Loyauté ?  C’est le mot le plus utilisé à l’hémicycle et dans les Etats-majors des partis depuis que l’affaire du fichier électoral et de la réforme constitutionnelle, agitées justement par l’agitateur d’idées qu’est le Parena de Tiebilé Dramé, tirèrent les partis de leur torpeur, voici trois mois. Le terme se rapporte aux partis de gouvernement qui sont pour ou contre la révision constitutionnelle. Autant dire le seul Parena. Comme en 2001 où il est monté en flèche contre la réforme que Konaré, sur le départ, voulait proposer, le Parena a déclenché les hostilités contre l’initiative du président Touré dès avril dernier.

Sa position alors était de forme : le parti du bélier blanc préfère que le gouvernement se concentre à la préparation de bonnes élections, après avoir attiré l’attention de la classe politique sur l’inexistence à cette date d’un fichier électoral fiable. Qui pour lui ne pouvait être que biométrique, comme promis par le président en 2009, et ce avec d’autant plus d’arguments que  la Dge, instance chargée des élections avait, elle-même, dénoncé les graves lacunes du fichier sortant dans un  de ses rapports confidentiels.

Le casse-tête Parena      

Une chose à la fois, préconise le Parena pour qui  l’obligation constitutionnelle n’est pas la constitution révisée mais l’élection à date due en 2012. Votant la Déclaration de politique générale de la première femme Premier ministre, en juin,  les camarades de Tiebilé Dramé ont dit oui mais ont appelé le président à abandonner  toute révision de la constitution. Motifs : le temps pour bien faire n’existe plus, constate le Parena et si le projet est voté en l’état, le futur « président sera un empereur », pourfend Tiebilé Dramé. Ce président aura, en tout cas, « plus de pouvoir que le roi du Maroc » renchérit  Soumana Sacko, l’ancien Premier ministre de transition qui fut le premier, en 2009, à s’insurger publiquement contre l’idée de la réforme.

Sacko n’avait pas de parti à l’époque et il ne fait pas partie de la mouvance présidentielle comme Tiebilé Dramé depuis mars dernier. Il lui est par conséquent plus facile à lui et à Oumar Mariko, leader de la Sadi, seul parti d’opposition au Parlement d’animer le front du refus que menacent de renforcer, maintenant, plusieurs organisations de la société civile : des Ong, des regroupements citoyens ainsi que les deux grandes centrales du pays, l’Untm et la Cstm.

Ce lundi, le Parena franchira-t-il, alors le rubicond en votant non ? Impossible à cette distance d’y répondre. Sur la question, le parti cultive un silence absolu et invite seulement d’attendre lundi. Mais quand son attention est attirée sur le oui  du Parena à la Dpg dont la révision constitutionnelle était un des points, Tiebilé Dramé se contente de dire que son parti s’est toujours démarqué de la révision constitutionnelle.  Très peu de doute cependant : Att ne manquera pas de prendre un non pour de la défiance. Et de la part d’un parti de gouvernement, ça pourrait se payer cash.          

Adam Thiam.

Le Republicain 29/07/2011