TRENTE DE CARRIERE POUR OUMOU SANGARE La diva du Wassoulou a lancé la célébration de ses noces de perle par Bamako

Mélancolie ou joviale porteuse d’espoir, sa voix a porté le Mali sur toutes les scènes du monde. Et pour fêter ses trente ans de carrière, Oumou Sangaré a offert à ses fans un concert gratuit le 29 décembre 2018 à la Tour d’Afrique de Bamako.  Et déjà, le 1er décembre, elle a avait débuté cette symbolique célébration par une soirée-gala VIP au Sheraton Hôtel de la capitale. Devant des invités de marque (sommités du monde de la culture, amis et parents, membres du gouvernement…) la Diva du Wassoulou avait soufflé les bougies de ses 30 ans de carrière. Trois décennies au sommet de avec un succès qui n’a cessé de croitre avec les albums et les tournées.

 

Diva du Wassoulou, elle est l’un des «Ambassadeurs» célèbres du Mali aussi bien à l’intérieur que sur la scène internationale. Comme Ali Farka Touré (paix à son âme), Salif Kéita, Habib Koité, Boubacar Traoré «Kar Kar», Amadou et Mariam, Cheick Tidiane Seck, le Mali est aujourd’hui identifié au talent et à la notoriété de Oumou Sangaré à travers le monde.

En trente de constance dans le showbiz, elle a mérité le titre des critiques de musique : la Diva ! Ce n’est donc pas fortuit qu’elle ait été une tête d’affiche du label anglais, Word Circuit, avant de tenter une nouvelle aventure plus aboutie avec label No Format pour son dernier opus.

De «Moussolou» (1989) à «Mogoya» (2017),  Oumou Sangaré s’est faite une place au soleil avec 10 albums. Des opus aux accents funk ou rock, mais qui ne renient en rien la tradition musicale du Wassoulou voire du Mali. «Le Wassoulou est composé de peuls, de Malinkés et de Bambaras. C’est donc le brassage de ces trois cultures extrêmement riches qui fait sa beauté», souligné Oumou Dily.

Un adage du pays dit qu’une chanson n’est belle que par le sens, le message véhiculé. Même si elle ne revendique pas forcément une étiquette de féministe, Oumou Sangaré est un artiste engagé. Engagée pour l’émancipation de la femme pour avoir été témoin à l’enfance du calvaire vécu par sa propre maman, Minata (Aminata) Diakité.

«Mon  inspiration vient de la femme africaine car sa situation m’inspire beaucoup. J’ai été touchée par mon enfance dure, j’ai beaucoup souffert à cet âge, ce qui m’a aussi inspirée dans la vie. Je pense qu’on doit être tous fiers de la femme africaine d’aujourd’hui», déclare Oumou Sangaré.

«Au moins, nous les femmes, nous sommes là. Nous sommes présentes partout pour montrer au reste du monde qu’on peut compter sur nous dans notre société et qu’on est assez intelligentes pour  accompagner et être aux cotés de nos hommes et que nos pays désormais peuvent compter sur nous», poursuit-elle.

Et d’ajouter, «dans mes chansons, je dénonce ce qui ne va pas. Je dis ce qui me dérange et ce qui dérange toutes les femmes. Je dénonce avec force le mariage précoce par exemple. Il faut laisser les filles mûrir avant de se marier. Comme je dénonce les mariages d’intérêt, car mon but est de laisser à la femme de faire son choix. On peut l’assister mais on ne doit pas la traiter comme un objet, une marchandise».

Et la Diva peut être fière de son parcours, de son œuvre émancipatrice. «J’ai réussi à réveiller des consciences. Nous les femmes, on est restées très longtemps derrière les hommes. Venez maintenant au même rang qu’eux. Eux aussi, ils ont besoin de nous. C’est ensemble qu’on peut se développer», défend-t-elle le plus souvent dans les nombreuses interviews accordée à la presse.

Pour l’enfant de Daoudabougou, «on chante d’abord pour essayer de changer les choses qui ne plaisent pas dans la vie. En plus, un artiste est un messager, car il n’est pas donné à tout le monde d’être devant des centaines de personnes pour chanter».

 

Une enfance bercée par la chanson pour une carrière précoce

La Malienne est également une panafricaine convaincue. «Personnellement,  je ne  suis pas d’accord quand on nous dit que l’Afrique est pauvre, la richesse est en nous, c’est dans la culture. Je trouve qu’en Afrique on a ça, on est très riche en culture et on peut réussir et faire avancer les choses», défend-t-elle.

Oumou Sangaré est née dans la musique pour avoir eu une mère star dans le Wassoulou, et qu’elle suivait dans ces baptêmes et mariages. «C’est à l’âge de douze treize ans que j’ai commencé à chanter pour gagner de l’argent, parce qu’il y avait des jours où on ne trouvait pas de quoi manger. Et, petit à petit, j’ai continué à chanter jusqu’à ce que les choses aient changé. Heureusement, j’ai connu le succès dès mon premier album», racontait-elle récemment à des confrères au Maroc.

Mais, depuis la maternelle, elle faisait le show pour ses camarades d’âge. «J’ai donné mon tout premier concert à l’âge de cinq ans devant trois mille personnes au Stade Omnisports Modibo Kéita de Bamako. J’étais tellement petite qu’on était obligé de poser une table au milieu de la scène et de me donner le micro là-haut pour que je puisse chanter», rappelle la star du showbiz. Et a 16 ans, elle a fait sa première tournée avec le groupe «Djoliba percussions».

A 18 ans, elle enregistre son premier album en 1987 avec le producteur sénégalais feu Ibrahima Sylla (Syllart Production). Celui-ci attend plus d’un an (1989) avant de sortir la cassette «Moussolou» qui connut aussitôt un succès fulgurant. En une semaine, plus de 100 000 cassettes ont été vendue seulement au Mali. Et grâce au monstre sacré du blues, feu Ali Farka Touré, que Oumou Sangaré a ensuite signé ensuite avec le label anglais World Circuit. A 21 ans, elle devint une star que s’arrache depuis le showbiz mondial.

Ainsi, depuis 1990, elle se produit sur les plus grandes et mythiques scènes du monde (Opéra de Sydney, Central Park de New York, Opéra de la Monnaie à Bruxelles, Queen Elisabeth Hall ; des Festivals comme celui de Roskilde ou d’Essaouira au Maroc… Tous les grands festivals des Pays-Bas…).

Ambassadrice de la FOA depuis 2003, Prix de l’Unesco en 2001 et Commandeur des Arts et Lettres de la République française en 1998, la Diva a aussi participé à la bande originale du film «Beloved» (1998) avec Oprah Winfrey dans le rôle principal. Sans compter des duos avec des stars mondiales comme Alicia Keys dans «Fallin».

 

De la scène aux affaires avec un relatif succès

Artiste, personnage public aux prises de position engagées Oumou Sangaré s’est également lancée dans les affaires, notamment dans l’hôtellerie dès le début des années 2000. En 2010, elle avait aussi lancé sa marque de véhicule «OumouSang» et une compagnie de taxis avec des véhicules neufs importés de Chine. Cette expérience a fait long feu.

«Mogoya», nouvel album de la chanteuse Oumou Sangaré. Tout comme l’hôtel qui est loin d’être une référence pour la qualité des services. Certainement un problème de management. Comme quoi, le talent n’ouvre pas les portes de la réussite dans tous les domaines.

N’empêche que Oumou Sangaré est une diva adulée dans le showbiz. Et c’est ça le plus important pour une artiste qui revendique aujourd’hui 30 ans de carrière et autant d’années de succès ! C’est fantastique !

Moussa Bolly

 

Les nouvelles sonorités de «Mogoya»

Après 8 ans (Seya en 2009) de silence En 2017, Oumou Sangaré est revenue dans les bacs avec un nouvel album, «Mogoya» (Humanisme ou Humanité). La Diva du Wassoulou y parle des rapports humains, rend hommage à sa mère Minata (Aminata) Diakité, exhorte la diaspora à revenir au bercail contribuer à l’œuvre de construction nationale….

Selon l’artiste, l’opus a été conçu et produit entre Stockholm (Suède) et Paris (France) avec la contribution du collectif de musiciens français A.L.B.E.R.T.(Vincent Taurelle, Ludovic Bruni et Vincent Taeger), et la participation du légendaire batteur Tony Allen.

L’œuvre a été accueillie par les critiques comme un album très moderne. «Quand j’ai écouté le résultat final, je me suis d’abord dit : Qu’est-ce que c’est que ça ? !  Puis, au fur et à mesure, j’ai beaucoup aimé», confessé Oumou Sangaré à des confrères de la presse internationale.

Cette première collaboration avec le label No Format  a produit un changement jugé positif par les critiques. «Il y a toujours les instruments traditionnels, mais il y a un petit plus pour faire bouger la jeunesse, africaine notamment. Il y a beaucoup de gens dans cet album, mais je crois que le plus important reste mon frère Tony Allen, qui est un monument de la musique africaine et a beaucoup travaillé avec Fela Kuti. C’est un homme qui n’a pas d’âge quand il joue. Quand j’ai commencé cet album, je me suis dit que nous pourrions faire quelque chose. Et il a fait des miracles», a reconnu Oumou Sangaré lors d’une conférence de presse à Bamako.

C’est donc un album atypique qui vient s’ajouter à une prestigieuse discographie riche de Moussolou (Syllart Production, 1988), Ko Sira (1993), Worotan (1996), Laban (2001), «CAN 2002» (2002), Oumou (2003), Strange fruit (2006), Seya (2009), Bi Furu (2011) et Mogoya sorti en 2017 !

M.B

 

Un moment privilégié pour la reconnaissance

 

La célébration des trente ans de carrière Oumou Sangaré a été un moment privilégié de reconnaissance. Reconnaissance de la star à ses fans, à son pays, à ses racines auxquelles est profondément attachées pour ne pas perdre son âme dans la tempête du succès discographique et médiatique.

«C’est l’occasion pour moi de remercier mon pays qui m’a bien éduquée et qui m’a permise de sillonner le monde. J’ai toujours dit que ce sont les Maliens qui ont fait de moi ce que je suis aujourd’hui. C’est ici que j’ai eu confiance en moi avant d’aller exprimer mon talent ailleurs», a déclaré Oumou Sangaré lors de la conférence de presse qui a précédé le concert de la Tour de l’Afrique.

«Les Maliens étaient là pendant mes moments difficiles. C’est pourquoi, je continue à dire merci à mes nombreux fans», a confié Oumou Sangaré. C’est pourquoi, la star avait invité pour l’occasion tous les musiciens de l’extérieur et ceux avec qui j’ai commencé sa carrière.

Et elle se plait beaucoup dans son rôle d’Ambassadrice qu’elle prend comme un privilège. «Même quand ça ne va pas dans mon pays, je souris pour montrer aux autres que ça va. La preuve, quand j’écrivais ma chanson Malignalé, c’était avec des larmes. Mais, je l’ai fait pour inciter à revenir ceux qui ont quitté notre pays à cause de la crise», a confié Oumou Sangaré aux journalistes.

Lors du Gala VIP, le secrétaire général du ministère de la Culture a remercié Oumou Sangaré pour tout ce qu’elle a fait pour la culture malienne. «Nous sommes ici ce soir pour vous témoigner de la reconnaissance du peuple dont vous avez transporté la culture avec fierté au-delà de nos frontières. Vous êtes une fierté pour tout le Mali», a-t-il déclaré.

Au nom des ressortissants de Wassoulou, de Bougouni, de Kolondiéba, Pr. Tiémoko Sangaré (président de l’Adéma-Pasj et ministre de la Défense et des Anciens combattants) a remercié Oumou Sangaré pour avoir «porté très haut, pendant trente ans, les couleurs du Mali sur le plan culturel».

Plusieurs artistes et cantatrices comme Ami Koïta, Nampé Sadio, Paye Camara, l’humoriste Kanté… ont également ont témoigné et rendu hommage à la diva du Wassoulou. Quant au Black Bouddha, Cheick Tidiane Seck, il a offert un tableau à Oumou Sangaré pour l’occasion.

«J’aime de tout mon cœur le Mali. L’une des richesses du Mali est sa culture. Sur le plan culturel, nous n’avons rien à envier aux autres. Nous continuerons à  défendre le Mali partout où nous y rendrons», s’est engagée l’Ambassadrice.

Lors de cette soirée VIP, Oumou Sangaré a repris, en live certaines de ses chansons, les grands succès notamment, au grand bonheur des fans. Pour immortaliser ses trente ans de carrière, Oumou Sangaré donnera trente concerts dans différentes villes à travers le monde ! Et c’est Bamako qui a naturellement donné le ton des festivités !

M.B