RELATION COMMERCIALE SINO-MALIENNE: La balance est toujours déséquilibrée pour le Mali malgré la suppression des droits de douane

Le Conseil d’État chinois a déclaré le 6 décembre 2023 (par voie de communiqué) que, à partir du 25 décembre, 98 % des produits taxables en provenance de l’Angola, de la Gambie, de la République démocratique du Congo, de Madagascar, du Mali et de la Mauritanie seront exemptés de droits de douane à l’entrée en Chine. Pour des économistes, la portée de cette mesure sera très limitée pour l’économie malienne d’autant que plus notre pays exporte peu vers la Chine et, dans la plupart des cas, ces exportations sont à l’actif des entreprises chinoises. 

 Le Conseil d’État chinois a déclaré le 6 décembre dernier que 98 % des produits taxables en provenance de l’Angola, de la Gambie, de la République démocratique du Congo, de Madagascar, du Mali et de la Mauritanie seront exemptés de droits de douane à l’entrée en Chine partir du 25 décembre 2023. Pour cette institution, «cette mesure vise à incarner l’esprit d’amitié et de coopération entre la Chine et l’Afrique et à faciliter la construction d’une communauté d’avenir partagé sino-africaine de haute qualité».

Et, selon le communiqué, l’étape suivante serait pour l’Empire du milieu d’étendre son «traitement tarifaire» zéro à tous les pays les moins développés avec lesquels elle a établi des relations diplomatiques. Toutefois, de nombreux économistes pensent que la portée de cette mesure sera très limitée pour l’économie malienne d’autant plus que notre pays exporte peu vers la Chine et, dans la plupart des cas, ces exportations sont à l’actif des Chinois ou de leurs entreprises.

Malgré une «interdiction de l’exportation de bois» en vigueur, a dénoncé l’Agence d’investigation environnementale (EIA) en mai 2022, les exportations vers la Chine se sont poursuivies. Selon les enquêteurs de cette agence, plus de 5 500 conteneurs remplis de kosso (bois de rose) ont été exportés vers la Chine via notre pays de mai 2020 à mars 2022. «De 2017 à 2012, la Chine a importé du continent un demi-million de kosso, d’une valeur d’environ 220 millions de dollars (près de 133 837 748 000 F CFA)», a-t-elle constaté. Selon  de nombreux observateurs, «ce commerce a déjà causé d’énormes impacts écologiques, économiques et sociaux négatifs dans les pays d’origine». 

La majeure partie de cette exploitation forestière abusive (qui n’apporte aucun profit économique à nos pays) a lieu dans des zones protégées telles que des réserves forestières, donc en violation du code forestier malien. Il faut rappeler que le bois de rose provenait principalement de l’Asie du sud-est. Mais ces forêts étant saturées, les négociants chinois se sont tournés vers l’Afrique de l’ouest, notamment le Mali. Certains interlocuteurs craignent surtout que la Chine ne réclame aux pays bénéficiaires la réciprocité de cette mesure (suppression des droits de douane) qui sera totalement contreproductive pour nos économies nationales. 

Eviter d’être un déversoir des produits chinois

«Je suppose qu’on ne doit pas faire pareil avec eux sinon cela va entraîner le déficit de  la balance commerciale des Etats bénéficiaires», souligne un économiste.  Pour lui, comme pour de nombreux observateurs, «il faut absolument que les Etats africains maintiennent les droits de douane des produits chinois entrant sinon ils seront un déversoir pour les produits chinois et cela va tuer les initiatives africaines». Selon des statistiques, c’est à partir de 2000 que le commerce entre la Chine et le Mali a pris un tournant décisif avec la consolidation des échanges entre les deux pays. Le commerce bilatéral a évolué de manière exponentielle entre les deux Etats devenus de «véritables partenaires».

La situation s’est améliorée considérablement pour le Mali à partir de 2004 date à partir de laquelle notre pays a réalisé régulièrement plus de 34,782 millions de dollars (environ 21 159 747 958 F CFA) de chiffre d’affaires annuel avec la République populaire de Chine. Si le Mali trouve ainsi des opportunités chez son partenaire, de la même manière la Chine arrive à s’implanter solidement dans notre pays. Ce qui lui permet d’écouler un gros volume de marchandises et de récupérer jusqu’à plus de 86,95 millions de dollars en 2005. 

Pour certains observateurs, «le commerce sino-malien est une lame à double tranchant car le Mali arrive certes à gagner de nouveaux marchés, à saisir des opportunités dans le cadre du processus de mondialisation, à augmenter ses exportations et à relancer sa croissance. Mais, en sens inverse, les importations chinoises provoquent la disparition de pans entiers de l’économie et engendrent le chômage, tuent en partie les initiatives économiques du pays». Par ailleurs, ont-ils souligné, les conditions techniques optimum n’étant pas réunies pour garantir aux entreprises  maliennes une certaine productivité et par delà de la compétitivité, il va de soi que le commerce chinois via la mondialisation n’est pas totalement profitable.

En effet, ont indiqué nos interlocuteurs, «la prolifération des marchandises bon marché en provenance de la Chine, n’est pas de nature à créer chez les potentiels hommes d’affaires maliens  le goût du risque et à se lancer dans les investissements». En réalité, il se pose pour eux «la cruciale question de la compétitivité». Ayant ainsi peur d’affronter les entrepreneurs chinois sur leur propre marché, disent des économistes, «ils préfèrent plutôt acheter des produits chinois et les revendre que d’investir».

Ainsi, n’ayant pas encore trouvé de solution aux caprices de l’Europe en matière économique, se trouve ouverte une autre voie d’étouffement pour l’avenir économique du Mali. Et comme pour s’en repentir et réparer l’injustice, la solution pour la Chine elle-même, consiste à consentir des efforts substantiels en matière d’aide et d’exemption de taxes sur les importations en provenance du Mali qui, en réalité, profite surtout aux Chinois installés au Mali ou à leurs entreprises.

Naby