RECONNAISSANCE DU SONINKE COMME LANGUE PAR L’UNESCO Une victoire posthume de feu Diadié Soumaré

«En ces moments symboliques, je pense et fais des dou’as (bénédictions) pour feu Diadié Soumaré. Merci à toi pour l’accompagnement et d’y avoir cru. Alhamdoulillahi (Dieu merci), le 25 septembre est désormais décrété par l’Unesco comme la Journée mondiale de la langue soninké. Merci à l’APS d’avoir porté ce dossier devant l’ensemble du monde» ! La Reconnaissance est de Ousmane Bocar Diagana, président de l’APS, du Festival international de Soninké (FISO) et de la Confédération internationale des Associations Soninké (CIAS) qui ont porté le dossier de cette belle reconnaissance.

En effet, la décision prise le 13 octobre 2023 à l’unanimité à l’Unesco est une victoire posthume du regretté père fondateur de l’APS arraché à notre affection le 23 juin à l’âge de 74 ans. Ancien président de l’APS et figure emblématique de la communauté malienne voire africaine de France, l’illustre disparu a presque consacré toute sa vie à la promotion de la culture, de l’identité soninké à travers des initiatives comme le FISO.

Né vers 1945 dans une famille de marabouts à Souéna Soumaré (village situé dans la région de Kayes au nord-ouest de Bamako), Diadié avait débarqué à Marseille (France) le 24 décembre 1962 à 18 ans… «Je ne savais ni lire, ni compter, encore moins écrire en français. Je connaissais juste l’arabe que j’ai appris à l’école coranique», avait-il souvent l’habitude de confier aux médias. Ouvrier dans une fonderie, il a été approché dès 1963 par le curé Robert maréchal pour suivre des cours du soir de français. En 1965, il obtient le certificat d’étude, commence une formation de comptable et obtient un Certificat d’aptitude professionnel (CAP) en 1969. Ce parchemin lui a permis d’obtenir un poste d’aide-comptable dans une entreprise de distribution de pièces d’automobiles. Mais, il ne s’arrêta pas en si bon chemin.

En 1971, il a obtenu le Brevet de technicien en comptabilité qui lui a permis d’intégrer le groupe de transport international Danzas comme comptable en 1972. Sa soif d’apprendre se poursuit jusqu’à ce qu’il intègre le prestigieux cercle des experts-comptables au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) à Paris où il est sorti diplômé en 1981. Au-delà de cette passion de se forger un destin, Diadié a toujours été un homme très engagé pour les autres et pour sa communauté. C’est ainsi qu’il a collaboré avec la Fondation Abbé Pierre. Il a présidé le Groupe de recherche et de réalisations pour le développement rural (GRDR/Migration-Citoyenneté-Développement) de 1994 à 1997. Il s’agit d’une association internationale de solidarité de droit français qui intervenait en Afrique de l’ouest (Mali, Sénégal, Mauritanie, Guinée-Bissau) et en France. C’est par la suite que le regretté Diadié a fondé et présidé le Haut conseil des Maliens de France de 1997 à 2008.

Il fut aussi Secrétaire général de l’Association Gidimaxa Jikke, une organisation qui offre la possibilité d’apprendre à lire, écrire, à parler le français et à se former à l’informatique. Infatigable militant de la cause des migrants, il s’est engagé sans relâche pour la cause des sans-papiers et des SDF. Il a œuvré toute sa vie pour l’inclusion des Maliens en France et la promotion de projets humains et sociaux entre sa patrie et son pays d’adoption. Selon de nombreux témoignages suite à son décès en juin 2019, «grâce au solide réseau associatif et politique qu’il est parvenu à constituer en France, Diadié a contribué à la concrétisation de nombreux projets pour le Mali, comme la construction de logements sociaux dans la région de Kayes en partenariat avec la Fondation Abbé Pierre».

Membre fondateur du Conseil des sages des Maliens de France, Diadié Soumaré restera dans les mémoires comme l’un des piliers de la diaspora malienne en France. On comprend alors aisément que la nation l’ait décoré Officier de l’ordre national à titre posthume. De son vivant, il avait été élevé en 2001 au rang de Chevalier de l’ordre national. La décision de l’Unesco de célébrer le soninké comme langue chaque année le 25 septembre est sans doute le meilleur hommage que l’on pouvait aussi lui rendre quatre ans après sa disparition !

Moussa Bolly