Mot de la semaine : Défis

Mali Mopti

 

A chaque jour suffit sa peine. Après la première rébellion touareg qui date de 1963-1964 et  l’invasion islamo-jihadiste qui s’est propagée dans tout le Sahel à partir de 2012, nous assistons aujourd’hui à des conflits communautaires qui s’installent au centre du Mali. Si les affrontements  entre paysans sédentaires et éleveurs nomades sont vieux comme le monde, le choc sanglant et répétitif entre communautés est un nouveau type de conflit. En effet, à  Koro, dans la région de Mopti, les Peuls et les Dogons s’entretuent  sous le regard indifférent des forces du G5 Sahel, de Barkhane et de la MINUSMA, et celui impuissant des forces armées du Mali. La question que beaucoup d’observateurs se posent est celle de savoir pourquoi assiste-t-on maintenant à tant de tueries entre deux communautés qui ont toujours vécu en parfaite harmonie sur un même espace ? Pour rappel, le week-end  dernier ce fut une véritable chasse à l’homme entre Dogons et Peuls à Koro, avec un bilan faisant état d’au moins 27 morts et provoquant au sein de l’opinion nationale une indignation qui conduit d’ailleurs à s’interroger si l’Etat existe encore. Ce spectacle effroyable survient après le discours plein d’espoirs tenu par le Premier Ministre Soumeylou Boubèye Maiga, lors de sa tournée en cinquième région. Sur un ton ferme voire martial, il y avait promis de stabiliser le centre du pays, engageant ainsi son gouvernement et les forces armées du Mali dans le chantier de la « reconquête » du centre. Son discours avait été pourtant suivi d’actes avec le démantèlement de certaines bases jihadistes. Mais, malheureusement, cette reprise de l’initiative par les FAMA après le beau discours du PM,  a été contrarié avec la destruction par les rebelles de tout le matériel de chantier du barrage de Djenné et aussi par le regain des affrontements très meurtriers entre Peuls et Dogons près de Koro. D’agressions en représailles, nous risquerons d’assister à une exacerbation de ce conflit communautaire aux conséquences désastreuses. A quatre mois  des élections, le gouvernement pourra-t-il tenir promesse ? Aujourd’hui, plus d’un observateur semble sceptique sur la tenue dans les bonnes conditions des élections présidentielles et législatives, à cause de la reprise de la violence, au nord et au centre.

Quatre mois à peine nous séparent des élections que tout le monde admet comme incontournables. Il nous faut les tenir coûte que coûte, alors que les défis semblent loin de faiblir, malgré les efforts incommensurables entrepris en faveur de l’équipement et de la mise en condition des forces de défense et de sécurité. N’est-il pas temps de questionner la stratégie adoptée jusqu’ici ou de revoir le diagnostic ?

Youssouf Sissoko