MME FATOUMATA BINTOU TRAORE, PORTE-PAROLE DU CSDMF   «Un pays divisé ne peut pas relever le défi de la paix»

Depuis le 16 novembre 2019, le Conseil supérieur de la diaspora malienne de France (CSDMF) a une nouvelle équipe dirigeante. Une direction qui se distingue surtout par sa jeunesse et la présence significative de femmes dont Mme Fatoumata Bintou Traoré élue première adjointe du chargé de la communication. Dans cet entretien, elle explique sa motivation, les ambitions de son équipe, évoque la situation actuelle, la vision des Maliens de la diaspora sur la crise… Interview !

Le Matin- Quel sentiment vous anime après votre élection dans la nouvelle équipe du CSDMF ?

Fatoumata Bintou Traoré- Un sentiment de fierté que l’instance dirigeante souveraine de notre association, c’est-à-dire l’Assemblée générale, nous renouvelle leur confiance pour un nouveau mandat de 3 ans. Déjà, dans le bureau sortant, j’étais secrétaire à l’administration. Et, avec le renouvellement du bureau le 16 novembre 2019,  j’occupe le poste de secrétaire chargée de la communication et porte-parole du tout nouveau bureau. C’est une grande responsabilité que l’Assemblée générale nous confie. Un grand merci aux militants et sympathisants du CSDMF et surtout au président brillamment réélu, M. Dramé Baïdy, et au reste de l’équipe.

Quelles doivent être vos priorités ?

 Notre priorité est d’aller à la rencontre des Maliens de France. Nous sommes à la veille de l’hiver en Europe et plusieurs de nos compatriotes rencontrent des problèmes d’hébergement. Le cas le plus récent est celui des anciens résidents du célèbre foyer malien de la Rue Bara dont plus de 240 Maliens viennent d’être relogés dans un centre grâce à la Mairie de Montreuil. Le CSDMF a été présent aux côtés des Maliens de Montreuil dès les premiers jours de leur expulsion. C’est vous dire que notre grande priorité est d’assister nos compatriotes en difficulté. D’ailleurs, ce collectif des Maliens de Montreuil est représenté dans le nouveau CSDMF à travers 2 délégués.

Vous avez participé au Dialogue national inclusif. Que pensez-vous de cette initiative ?

Le CSDMF a participé à ce dialogue national inclusif en France avec une forte délégation de 6 personnes, dont moi-même, les 26-27 octobre à la mairie de Bondy. Les participants ont salué notre contribution à ce débat crucial pour l’avenir de notre pays. Ainsi, les autorités diplomatiques et consulaires viennent de nous adresser une lettre de félicitation pour notre participation de qualité à ce dialogue national inclusif au sein de la Diaspora.

Quelles ont été vos recommandations en France ?

 Plusieurs recommandations ont été formulées par la diaspora malienne de France. Nous avons par exemple jugé nécessaire l’analyse de l’environnement sécuritaire du Mali aux prismes des enjeux géopolitiques et géoéconomiques du Sahel. Tout est indispensable : le réexamen de la pertinence des différents accords (Tamanrasset de 1991, Pacte national de 1992, Accord d’Alger de 2006, Accord préliminaire de Ouagadougou du 18 juin 2013 et Accord pour la paix et la réconciliation issu  du processus d’Alger et signé à Bamako  le 15 mai et 20 juin 2015). Expliquer les causes réelles du conflit, restaurer l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire malien, éclaircir le rôle de l’armée française au Mali, voire au Sahel, promouvoir l’union et la cohésion sociale… sont aussi des recommandations formulées par les Maliens de France.

Au final, qu’attendez-vous de ce dialogue ?

 Ce qu’on attend de ce dialogue, c’est le rassemblement de tous les fils du pays de l’intérieur comme de la diaspora pour le faire sortir de cette crise multidimensionnelle. C’est le moment pour chaque Malienne et chaque Malien de se donner la main en mettant le Mali au-dessus de tout. Un pays divisé ne réussira pas la paix. Tout comme une diaspora divisée n’honore pas notre pays.

En tant que Malienne de la Diaspora, comment s’est passée votre intégration ?

 Très facile, simplement car je suis ressortissante d’un pays francophone. Instruite, mon intégration a été facile !

Rencontrez-vous des difficultés particulières dans votre pays d’accueil ?

 Sur une terre d’accueil, les difficultés existent toujours, surtout pour la diaspora malienne de France. Beaucoup sont sans titre de séjour, donc des « sans-papiers » comme on les appelle couramment. Il y a aussi ceux qui sont mal logés, des sans domicile fixe (SDF). Sans compter les difficultés pour nos compatriotes d’avoir un emploi … C’est dire que l’Europe n’est plus comme avant et les extrémistes pointent les migrants comme la source de leur  malheur.

Quels conseils donnerez-vous aux jeunes qui sont encore déterminés à braver le Sahara et la Méditerranée pour migrer en Europe ?

 

Le CSDMF avait initié les 6-7 avril 2018 une conférence internationale sur la migration à Bamako (Jeunesse – Migration – Développement) suite au décès de plusieurs de nos compatriotes, dont ceux de Sélikégni, dans le cercle de Bafoulabé (plus de 70 morts dont le plus âgé avait 26 ans). Un véritable drame national. L’objectif de cette conférence était de sensibiliser la jeunesse malienne du danger de la migration, des traversées périlleuses du Sahara et de la Méditerranée.

Avez-vous un message particulier pour les jeunes du Mali ?

Je demande aux jeunes du Mali de ne pas tenter cette aventure dangereuse, notamment la traversée du Sahara et de la Méditerranée. L’avenir d’un pays repose sur sa jeunesse. Et malgré que le nôtre traverse la crise la plus grave de son histoire, c’est à la jeunesse de faire en sorte que ce pays soit débout pour tous.

 

Propos recueillis par

Moussa Bolly

Une aide soignante très engagée pour soulager son prochain

 

La quarantaine éblouissante malgré cinq maternités (4 filles et 1 garçon), Mme Fatoumata Bintou Traoré (FBT) vit en France depuis janvier 2006 suite à un regroupement familial (rapprochement de conjoints). Ayant vite réussi à s’adapter à ce nouvel environnement et à cette nouvelle culture, la courageuse aide-soignante s’est engagée dans le mouvement associatif afin de pouvoir aider ses compatriotes en difficulté.

C’est ainsi que FBT est membre fondateur du Conseil supérieur de la diaspora malienne en France (le 1er octobre 2016). «Il se trouve que les pères fondateurs sont reconnus comme les principaux acteurs de la vie associative malienne en France. C’est ce qui m’a motivée à me joindre à eux pour créer le CSDMF», explique la jeune dame dont la beauté ne cesse de défier les années. Secrétaire à l’administration dans le précédent bureau, elle a été élu secrétaire à la communication, porte-parole, dans l’équipe mise en place le 16 novembre 2019 toujours sous la conduite de Baïdy Dramé.

Même si elle s’est parfaitement intégrée en France, Fatoumata n’a jamais oublié d’où elle vient. «Nous sommes en contact régulier avec le pays grâce aux réseaux sociaux et les autres moyens de communication. Et nous y séjournons fréquemment. D’une manière générale, les Maliens de la Diaspora sont très attachés au pays», souligne-t-elle.

Très sage et assez philosophe, Fatoumata Bintou Traoré partage généralement avec ses compatriotes, notamment les femmes et les jeunes, des pensées positives comme : «Nous pourrions facilement nous débrouiller dans la vie si nous laissions à chaque jour sa peine. En effet, le fardeau devient trop lourd si nous devons porter celui d’hier avec celui d’aujourd’hui et ajouter celui de demain avant que cela ne soit nécessaire».

A méditer profondément pour retrouver des repères et mieux se guider dans la vie !

M.B