MALI-CHINE Une excellence diplomatique entachée par des opérateurs privés qui pillent les richesses maliennes

Autant les relations institutionnelles entre le Mali et la Chine sont mutuellement avantageuses, autant le comportement des hommes d’affaires de l’Empire du milieu dans notre pays est exécrable. C’est dans une totale illégalité qu’ils pillent nos richesses et exploitent nos ressources humaines sans aucun égard pour nos législations et les engagements communs. Et cela parce qu’ils sont assurés de l’impunité que leur procure leur pouvoir de corruption. Le coup de semonce du ministre Moussa Alassane Diallo (ministre de l’Industrie et du Commerce) à Sukula et N-Sukula annonce-il enfin une prise de conscience du gouvernement pour mettre fin à cette exploitation scandaleuse de nos richesses et de nos ressources ?

«Si au niveau étatique les relations sino-maliennes sont au beau fixe, force est de reconnaître que l’image de la Chine aux yeux des Maliens est de plus en plus écornée à cause du comportement de nombreux opérateurs privés chinois et surtout de l’exploitation controversée des richesses du pays d’accueil. Et à la longue, cela va beaucoup peser négativement sur les relations institutionnelles» ! C’est ce que nous a confié il y a quelques mois un analyste économique. A son avis, il est donc «temps non seulement de trouver une solution idoine à ce problème de visa refusé aux opérateurs économiques, mais aussi de veiller à ce que les Chinois qui viennent au Mali s’inscrivent dans la stricte légalité dans toutes leurs activités, respectent les populations et l’environnement».

De plus en plus nombreux au Mali, comme dans beaucoup de pays africains, les Chinois se comportent comme en territoire conquis en exploitant à leur guise tout ce qui les intéresse comme richesses ou opportunités d’affaires. Ils se comportent en vrais prédateurs qui pillent (le plus souvent en toute illégalité) nos richesses et ressources. De l’or au bois, en passant par le commerce général, les Chinois ont aujourd’hui la mainmise sur une grande partie de notre secteur économique. Malheureusement, cela n’apporte presque rien à notre économie puisque si ce n’est pas l’or, le bois… qui sont frauduleusement exportés en Chine, les bénéfices commerciaux réalisés sur place sont rapatriés. Le hic, c’est que nous devons gérer les conséquences écologiques et socio-économiques de ce pillage organisé le plus souvent avec des cadres du pays, des élus locaux et même des notabilités.

«Ce n’est pas seulement l’or que les Chinois recherchent à Kéniéba ou dans de nombreuses localités maliennes, ils coupent aussi les arbres et les expédient en Chine…», a une fois dénoncé Karamoko Doumbia, président de l’Union des comptoirs et raffinerie d’or du Mali (UCROM), dans une déclaration à la presse. Et cela aux dépens des paysans. «Un orpailleur n’a pas d’état d’âme, quand il veut votre champ, il l’aura et les Chinois en abusent», déplore M. Doumbia.

Des «prédateurs» qui font pire que les colons

«Dans certaines zones du Mandé et de Kéniéba, les Chinois se comportent pire que les colons. Conscients de l’attraction de l’argent sur certaines autorités administratives et communales ainsi que sur certaines notabilités, ils exploitent non seulement les richesses de façon illégale, mais se rendent aussi coupables de nombreuses exactions sur ceux qui leur tiennent tête», dénonce un élu local.

Ironie du sort, à cause en partie des Chinois, la Falémé (affluent du fleuve Sénégal) n’est presque plus une source de vie, mais de mort car polluée par l’orpaillage. Les riverains ne cessent de rappeler aux autorités maliennes et sénégalaises que «la situation du fleuve est devenue un problème très sérieux. Le cours du fleuve est occupé par les chercheurs d’or qui ont rendu l’eau complètement polluée. Il y a le dragage pratiqué par des locaux mais aussi des Maliens et autres Burkinabé. Pire encore, il y a les Chinois installés dans la zone qui participent davantage à la détérioration de la Falémé».

Même à un niveau supérieur, il nous est revenu de constater que les Chinois ne tiennent presque jamais leurs engagements car assurés de toujours pouvoir corrompre leurs interlocuteurs maliens afin de mieux les (engagements) contourner. La récente sortie du ministre de l’Industrie et du Commerce contre la gestion scandaleuse de Sukala Et N-Sukala l’atteste. A l’issue d’une visite sur place, le ministre Moussa Alassane Diallo a peint un tableau sombre de la gestion de ces deux unités de production sucrière aux dépens du Mali, du Trésor public.

A la fin de sa visite, le ministre de l’Industrie et du Commerce a eu du mal à contenir sa colère «proportionnelle au désastre financier que sont devenues Sukala et N-Sukala». Ainsi, tous les bons principes de gestion administrative et financière sont foulés au pied au niveau des deux sociétés. Et cela aux dépens du Mali. Ce qui fait que, au lieu d’être des fleurons de la longue chaîne de coopération sino-malienne, ces deux unités industrielles symbolisent malheureusement un gouffre financier pour l’Etat. Avant cette sortie de Moussa A. Diallo, les travailleurs maliens des deux unités ont fréquemment interpellé les autorités maliennes par rapport aux violations de leurs droits, des abus et humiliations qu’ils u subissent… Personne n’a levé le petit doigt pour les défendre.

Ce qui est rassurant, c’est que le ministre Diallo n’entend pas laisser passer l’occasion de restaurer l’autorité de l’Etat dans le monde industriel et du commerce. Concernant les deux unités sucrières, il a d’ores et déjà annoncé des mesures fortes de restructuration (tenue d’une session du conseil d’administration avec l’appui de son collègue de l’Economie et des Finances), le redressement fiscal, le paiement des taxes dues à l’Etat… Les responsables des deux unités industrielles savent aujourd’hui que l’épée de Damoclès est suspendue sur leurs têtes.

Tout comme ceux qui ont la charge de veiller à la stricte mise en œuvre des recommandations et des instructions du ministre de l’Industrie et du Commerce. Fidèles à leur habitude, nos «partenaires d’affaires» (???) vont tout faire pour les corrompre pour passer outre. Résisteront-ils à la tentation ? Le ministre Moussa Diallo doit y veiller scrupuleusement s’il aspire réellement à sauvegarder les intérêts de notre pays.

Banquier chevronné et fin connaisseur des milieux d’affaires maliens, la colère de Moussa A. Diallo n’avait rien d’être feinte. Elle celle d’un cadre responsable qui réalisé comment son pays est floué par des partenaires. Aujourd’hui, sans lui tresser des lauriers de complaisance, il est celui qui peut mettre fin à cette situation de pillage économique et de réellement relancer le processus d’industrialisation du Mali au grand bonheur des Maliens. A condition bien sûr qu’on lui laisse les coudées franches pour nettoyer ces écuries d’Augias. Ce qui est aussi un passage obligé pour asseoir notre souveraineté économique.

Naby