L’ARMEE A MOPTI : Moral d’acier pour la reconquête du territoire

Jeudi 19 juillet 2012. Au petit matin, les populations de Mopti se réveillent comme d’habitude. Sur l’axe principal qui traverse Sévaré pour aller à Gao, les klaxons des cars déchirent le silence. Les boutiques ouvrent lentement, et les vendeuses de beignets et autres victuailles pour le petit-déjeuner, se bousculent aux abords de la route.

Il est vrai que le rythme de la ville a changé, et que le train de vie n’est plus le même que les années d’avant la crise du Nord, où le tourisme fonctionnait normalement, et où les hôtels et restaurants tournaient à plein régime.

Dans les heures qui ont suivi l’offensive des pseudos rebelles indépendantistes du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) et des islamistes d’Ançar Eddine sur Kidal, Gao et Tombouctou, les habitants de Mopti se demandaient s’ils allaient tombés eux aussi sous la domination des bandits armés.

 

Remobilisation des troupes

Aujourd’hui, Mopti est devenue la ligne de la résistance militaire contre les envahisseurs. Le commandement du PC Opérationnel (transféré de Gao) travaille d’arrache-pied pour « laver l’affront », nous rapporte une source militaire digne de foi.

Dans les différents camps militaires (armée de terre, de l’air et l’escadron de la gendarmerie), les regroupements se font dans la plus grande discipline, sous le regard vigilant des officiers du commandement.

Dans les rues de Mopti et de Sévaré, le ballet des véhicules militaires est visible toute la journée. Et la population s’y est habituée. Ici, on sait que le pays est en guerre, mais ce défilé des véhicules militaires est loin de traduire les images qui nous proviennent de la Somalie ou de la République démocratique du Congo.

« Le Mali ne sera jamais la Somali », prédit habitant. Il explique que les ennemis du Mali l’ont conduit en guerre. « Nous vivons ici dans la plus grande tranquillité, même si certaines personnes ont contribué à créer la psychose après la chute de Gao et de Tombouctou. Nous voyons ces militaires tous les jours, ils sont là pour notre sécurité, nous les faisons toujours confiance malgré le moment difficile que armée traverse », nous explique ce gérant de restaurant à Sévaré sur la route de Gao.

Pour lui, si les banques et les touristes ont quitté la ville depuis trois mois, beaucoup de populations ont rejoint ces derniers temps leurs domiciles. En clair, explique notre interlocuteur, le retour à la quiétude se fait progressivement.

 

« Laver l’affront »

Dans le Foyer de l’armée de l’air, très fréquenté par les militaires, peu de gens acceptent d’aborder le sujet du Nord avec nous. Mais ce soir du 19 juillet, un voisin de table dont nous venons de faire la connaissance, est formel : « L’armée va venger l’affront du Nord ». Notre interlocuteur qui n’a jamais voulu nous dévoiler sa profession, était en fait un jeune sous-officier de l’armée de l’air en mutation à Mopti après le coup d’Etat du 22 mars.

Comme lui, ils sont plusieurs centaines d’éléments des forces armées à se déployer à Mopti. Sans doute en attendant la décision politique d’attaquer. « Des villas fermées toute la journée à Sévaré sont en fait en location aux militaires », nous confie cette source, qui est convaincue que le travail à l’ombre se poursuit avant la montée au front.

On connait les nuits très mouvementées à Sévaré, mais depuis quelques temps les « coins branchés » ont baissé relativement d’intensité. Cependant, les foyers de l’armée restent l’une des principales attractions. Ici, on bavarde très peu, surtout s’il s’agit d’aborder la question de la guerre au Nord. Un sous-officier de l’armée de terre nous explique dans l’anonymat que les politiques ont tout dit sur l’armée après le coup d’Etat et la chute de Kidal, Gao et Tombouctou. Mais, rassure-t-il, le temps donnera raison à l’armée. C’est-à-dire ? Avons-nous demandé à notre interlocuteur, qui ne fera pas d’autres commentaires.

A Mopti, si l’armée ne dit pas exactement ce qu’elle fait pour préparer la riposte (ce qui est bien normal), tout porte à croire que les manœuvres sont en cours pour préparer la guerre. Et on comprend le retour à Bamako du colonel-major El hadj Gamou du Niger depuis le coup d’Etat, sur demande du ministre de la Défense et des Anciens combattants, le colonel-major Yamoussa Camara.

A l’entrée de la ville de Mopti, les éléments des services de sécurité sont en position et contrôlent les entrées et les sorties de tous les véhicules. Ici, rien n’est laissé au hasard. A quelques kilomètres de là, au « Camp des jeunes de Soufroulaye » (à 15 km de Sévaré), le mouvement d’auto-défense du Nord « Ganga-Koy » (force d’appui à l’armée) est en plein entraîinement. Sur les visages, la volonté de se battre contre l’ennemi est lisible. Mais quand est-ce que les pouvoirs politiques donneront l’ordre de lancer l’assaut ?

Issa Fakaba Sissoko

Envoyé spécial à Mopti

L’Indicateur du Renouveau