Jeunes et déjà entrepreneurs : la success story du Pajm

Du beau monde à  Ségou ce vendredi 17 juin : car en plus de deux personnalités citées, il y avait le chef de l’Exécutif régional, le Pdg de la Banque Malienne de Solidarité et son équipe, le représentant du Fonds Auto-Renouvelable pour l’Emploi (Fare) ainsi que l’équipe du Projet d’Appui à la Jeunesse Malienne (Pajm). Fruit du partenariat Ministère de la Jeunesse et des Sports du Mali et Coopération française, le Pajm est un projet à trois composantes dont « Jeunesse et entrepreunariat »qui a démarré en 2008 pour quatre ans. Il coûte 2 millions d’Euros et il est un des résultats concrets du 23è sommer Afrique-France tenu à Bamako en 2005 et où la jeunesse avait fortement interpellé les chefs d’Etats de cette communauté devant  un Jacques Chirac ému aux larmes.

Les Chiffres et les faits

L’objectif du Pajm, au départ, est « de former 550 jeunes à la création d’entreprises et d’accompagner financièrement 300 jeunes ». Le projet est parti très vite sur les hypothèses hautes : à savoir que deux tiers des entreprises financées survivent et que le taux de remboursement atteigne la barre des 90%. Un pari fou quand on connaît les normes usuelles et le contexte socioéconomique. Pourtant,  le taux de remboursement annuel moyen est de 74% et en matière de création d’entreprise, « ce ratio est plus que satisfaisant » selon les cadres de la Bms.

Aujourd’hui, le montant global des emprunts auprès du projet est de 510 000 000 Cfa. En mai 2011, indiquent les documents du programme « 2310 dossiers étaient déposés, 555 promoteurs admis en formation et 301 dossiers avaient bénéficié de prêts ».  Ce sont 13% des dossiers déposés et 54% des postulants formés qui ont reçu un prêt. Un dossier sur quatre est déposé par les femmes qui représentent le tiers des admissions en formation et en approbation de prêt! Et les deux-tiers de ces femmes ont moins de trente ans et leurs projets sont moins coûteux que ceux des hommes.

Les deux-tiers des prêts sont inférieurs à 2 000 000 Cfa. En gros, le commerce constitue plus de la moitié des activités financée et il est suivi de l’artisanat (30%) et d’assez loin par l’agriculture (12%) et les services (6%). L’évaluation à mi-parcours du projet a permis de réaliser qu’une entreprise crée en moyenne deux emplois directs, que le taux de remboursement actuel (74%) est une performance et que les entrepreneurs formés sont plus agressifs dans la recherche de marchés. Hélas, poursuivent les évaluateurs : la formation ne résout pas tous les problèmes de comptabilité et de gestion. Et puis, les ventes à crédit prennent de l’importance et ce n’est pas toujours bon pour la trésorerie des entreprises.

L’ascenseur républicain, clé du succès

Le Pajm opère sur l’ensemble du territoire malien à raison d’une vingtaine de projets par Région administrative du pays et dans le district de Bamako.  Le projet implique plusieurs partenariats : d’abord le Fare : c’est lui qui reçoit du partenaire français le financement  et qui garantit l’activité; ensuite la Bms où est logé le fonds de garantie du Fare ;  puis, le Ministère de la Jeunesse et des Sports, à travers sa direction nationale et le binôme assistant technique français et son homologue malien et enfin l’opérateur sur le terrain, (Entreprise 4 E Conform).

Ce sont les représentants de ces différentes institutions qui se retrouvent dans le Comité  de crédit présidé par le Fare et se réunissant après chaque séance de formation pour octroyer le  crédit et chaque mois pour suivre le remboursement des prêts et les difficultés éventuelles rencontrées par les créateurs d’entreprise ».

Le succès du Pajm est attribué d’abord à sa méthodologie qui repose sur 3 piliers. Premier pilier : personne ne bénéficie du prêt sans avoir pris part à la formation à l’entreprenariat dispensée par le projet. Cette formation renforce la confiance du futur promoteur en lui-même et elle permet déjà, à ce stade, d’évaluer les forces et les faiblesses des postulants.

Deuxième pilier : l’accompagnement et le conseil : y compris dans le choix de l’emplacement, le décaissement des prêts et la mise en place des outils de gestion. Troisième pilier : les conditions du prêt et le suivi : un apport personnel de 5%  du montant du prêt est requis, le prêt est accordé pour 24 mois, le taux d’intérêt est de 10%. Le Pajm ne cherche pas à étouffer l’emprunteur mais celui doit comprendre qu’il s’agit d’un emprunt et parfois la peur du gendarme a joué.

Les bénéficiaires interviewés du projet sont formels : ils ne connaissaient personne, ils ont entendu parler du projet et ils ont postulé pour la formation. Après, ceux qui ont été retenus ont reçu le prêt. Le mérite est le seul critère : les parties prenantes sont toutes d’accord pour le dire. Et à aucun moment, « le ministre de la Jeunesse -à l’époque, Hamane Niang- n’est intervenu pour recommander quelqu’un ».

Une fois que le mérite a joué, le reste est une question d’encadrement. L’existence d’un opérateur de proximité, à savoir 4 E Conform, a énormément aidé reconnaît-on unanimement. Mais bien sûr, le binôme Eta malien-Coopération française  a bien fonctionné qui ne subit aucune pression pour faire son travail. Le Fare et la BMS montrent également un très grand enthousiasme pour le projet au point que la BMS, selon son premier responsable, promet de poursuivre ce projet quoiqu’il arrive.

Adam Thiam

Envoyé  spécial à Ségou

Le Républicain 21/06/2011