Haïti: sommes-nous devenus insensibles?

MICHELLE SETLAKWE, DÉPUTÉE DE MONT-ROYAL–OUTREMONT ET MADWA-NIKA CADET, DÉPUTÉE DE BOURASSA-SAUVÉ

Samedi, 8 avril 2023 00:00MISE

Haïti n’en est pas à sa première crise. Son histoire est à la fois inspirante, triomphale et désastreuse. Les crises passées, et les mesures d’aide, ont laissé des cicatrices.

Nous voulons bien éviter de reproduire les erreurs du passé, mais comment pouvons-nous demeurer passifs devant un peuple qui souffre autant, le menant inéluctablement à un exode grandissant ?

Qu’ils se débrouillent eux-mêmes ! On en a assez fait ! Le peu qu’on puisse faire ici ne servira pas à grand-chose de toute façon ! La crise est profonde et les criminels sont devenus maîtres ! De telles réactions pullulent et traduisent un sentiment de lassitude, voire une forme d’insensibilité.

Nous nous inscrivons en faux face à ces réactions.

Aide demandée

La crise est complexe et elle est sécuritaire avant tout, interpellant le gouvernement fédéral, nous le concédons.

Nous vous entendons alors vous demander : que peut faire le Québec dans un contexte où la loi et l’ordre n’existent plus ?

Pensons à la population qui souffre, impuissante devant un tel régime de terreur. Participons aux efforts afin de leur venir en aide directement.

Le Québec a la légitimité de prêter main forte à Haïti à l’intérieur de ses champs de compétences. En tant que membre de la Francophonie, et considérant les liens qui nous unissent à Haïti depuis plus de 75 ans, le Québec peut – et doit – faire partie de la solution.

Enjeux

Il existe une longue histoire d’immigration haïtienne au Québec, ayant donné lieu à une importante diaspora concentrée dans la région métropolitaine, vivant encore dans l’angoisse.

À la suite d’échanges avec des représentants de la diaspora, nos collègues et nous estimons que le Québec peut jouer un rôle utile, notamment sur les enjeux suivants:

1- Les flambées de violence, en particulier les violences sexuelles, touchent particulièrement les femmes. Un soutien au réseau de partenaires de l’Association québécoise des organismes de coopération internationale pourrait faire une différence sur le terrain.

2- Le climat de terreur qui s’est installé empêche des enfants d’aller à l’école, les privant d’un droit fondamental. L’éducation numérique, domaine dans lequel le Québec possède une expertise, permet d’accompagner des jeunes haïtiens à distance. Une aide pourrait être fournie via le Groupe de réflexion pour une nouvelle Haïti, par exemple.

3- Le Québec doit appuyer le fédéral et contribuer financièrement dans l’effort multinational qui s’organise. Pensons aux besoins alimentaires, en eau potable et en matériel médical.

En plus d’avoir fait adopter à l’unanimité une motion de soutien à l’Assemblée nationale le 30 mars, en tant que porte-parole en matière de relations internationales et de la francophonie, j’ai transmis une lettre à la ministre Biron, au ministère des Relations internationales et de la francophonie, lui proposant de poser des gestes en ce sens. Nous espérons qu’elle en sera inspirée et qu’elle agira rapidement.

Haïti est en danger. Prêtons-lui assistance.