Edito / Ocampo ou le juge du double standard

Au box-office, il lèvera la main droite  comme avant lui à la même place, quelques bouchers de sinistre renom. Triste destin pour l’historien crédité d’avoir fait échec à un président français -Chirac-  mais coupable d’avoir livré la bataille de trop. Pourtant, le président Ouattara aura tort de se frotter les mains. Car, en lieu et place du procès « du pouvoir ou la mort» organisé sur les lieux du crime et qui aurait été d’une valeur pédagogique certaine pour la Côte d’Ivoire et pour l’Afrique, il s’est empressé de délocaliser sa responsabilité. Une affaire Koala en sens inverse. Sauf qu’ici le déchet est tout aussi toxique qu’éloquent.

En effet, Gbagbo à  la Haye est un martyr pré-positionné alors qu’à Abidjan des vainqueurs, il pouvait rester l’ordonnateur conspué de plus d’un charnier. Et maintenant qu’il a donné Gbagbo, Ouattara, n’est-il pas obligé de faire le plus difficile, à savoir se passer de certains de ses proches recherchés par le juge Ocampo ? Celui-ci, il est vrai, ne s’échinera pas à les réclamer, ne se gênant plus de passer pour la petite main médiatisée des courroux sélectifs de Paris, Londres ou Washington. La plus grande faiblesse du procès Gbagbo résidera en ceci : ce n’est pas que Gbagbo soit innocent mais qu’Ocampo ne soit plus crédible. Il ne veut pas de Seif El Islam chez lui mais l’ancien homme fort d’Abidjan, il le veut.

Il veut le génocidaire El Beshir mais fait tout pour ne pas l’avoir en rendant public  un mandat d’arrêt qu’il aurait dû taire pour l’efficacité. Il appelle tous les médias du monde pour le procès de Lubanga mais il refuse de donner à ses juges les documents exigés. Il fait un raid à Nairobi et roule les mécaniques devant Kibaki et Raila. Puis plus rien. Il monte sur ses grands chevaux et promet deux procès internationaux retentissants, l’un contre Israël sur les massacres de Gaza, l’autre contre les Farc et leurs collusions mafieuses. De l’épate pur jus! L’Afrique qui adore Messi ne pleurera le juge argentin qui n’a plus que quelques petits mois encore à son poste. Il s’en moque sûrement.

Adam Thiam

Le Républicain 01/12/2011