Edito / De la patate chaude au bébé-éprouvette

Car les mosquées fréquentées par nos concitoyens communiquent mieux que le gouvernement et elles mobilisent infiniment plus que les organisations de la société civile. Dont celles qui tiennent, mot pour mot, aux résolutions du Caire 1994 et de Beijing 1995 accusent, en off bien sûr, l’assemblée d’avoir capitulé devant les forces conservatrices du pays.

Capitulation? Du perchoir, Dioncounda Traoré s’en défend, invoquant un processus participatif ouvert à toutes les sensibilités, de longues séances d’écoute et de concertation entre le parlement et les parties prenantes. Y compris le gouvernement dont des députés ont dénoncé la logique d’atermoiement. Puisqu’après cinquante un amendements, plusieurs reformulations pour la clarté et quelques abandons, la copie a pris quelques libertés avec l’original ? Et puisqu’on pressent un accueil tiède du nouveau projet par la communauté internationale? Tout comme. Voici pourquoi, Ibrahim Boubacar Kéita, à la clôture des travaux,  insistera sur le respect des valeurs de civilisation du Mali qui ne saurait, pour le rayonnement qui fut le sien, tolérer la camisole de force.

C’est aussi pourquoi Me Mountaga Tall, radieux, redira la nécessité de mieux comprendre le concept de laïcité que le nouveau projet, pour lui, ne remet pas en cause quoiqu’issu, largement mais exclusivement de concertations suivies avec les organisations islamiques. De la patate chaude qui lui fut envoyée en août 2009, le parlement a fait son bébé, pour reprendre les mots de son président. Un bébé-éprouvette résultant, en effet, d’apports variés et multiples. Il ressemble à tout le monde donc. Reste à voir s’il rassemblera tout le monde.

Adam Thiam

Le Républicain 05/12/2011