DPG Mariam kaïdama sidibé persiste et signe : «Les réformes institutionnelles sont indispensable

Même s’il paraissait logique de s’attendre à une ambiance moins tendue – consensus politique oblige  -, il était difficilement imaginable qu’un débat sur un document aussi important tombe dans la platitude au point d’être instrumentalisé à des fins politiques de moyenne semelle sur fond de mandat impératif et d’exhibitionnisme. C’était manifestement le cas, lundi, lorsque le Gouvernement et l’Assemblée Nationale s’étaient retrouvés nez-à-nez, 72 heures après la présentation de la DPG, pour examiner son adéquation avec les attentes et les possibilités de sa réalisation, entre autres questionnements. Pour la circonstance, la tradition parlementaire, tel que consignée dans le règlement intérieur de l’AN, a consisté en une répartition du temps de parole entre les forces politiques au pro-rota de leur représentativité, afin qu’il en fasse usage à trois niveaux : une première vague de questions sur le contenu du document, un deuxième passage après les réponses du PM au premier passage, puis les explications de vote. Quel usage les quatorze (14) groupes parlementaires en ont-ils fait ?

– Le culte du mandat impératif et du petit-écran

Au sein des différents groupes parlementaires, la DPG de Mariam Kaïdama Sidibé aura vraisemblablement donné lieu à une farouche dispute autour du privilège et de l’opportunité de figurer parmi des intervenants forcément triés sur le volet, compte tenu d’un temps manifestement disproportionné à la taille des entités politiques de l’AN. À défaut d’être du rang de ceux qui s’illustrent périodiquement par l’interpellation de ministres, les députés se sont battus du mieux qu’ils le pouvaient pour ne pas rater une occasion d’afficher leur proximité avec la circonscription électorale d’origine. Et, à quelques encablures de la fin du quinquennat parlementaire et des consultations pour le renouvellement de la législature, les débats sur la Déclaration de Politique Générale – peut-être la dernière de l’ère ATT – auront plus inspiré des préoccupations localisées que des aspirations d’ordre général. Qui pour évoquer une route, un tronçon, une piste rurale en souffrance dans une localité, qui pour revendiquer la desserte de sa circonscription en points d’eau, sa couverture télévisuelle ou téléphonique, de l’accès de ses populations aux soins de santé, etc. Le culte du mandat impératif, de l’effort et de l’obligation d’attachement aux aspirations locales, a été par moment porté à son paroxysme au point de frôler le seuil de l’infranchissable, de l’inadmissible. C’est le cas de ce député élu à Kangaba, qui n’avait cure de ramener les questions d’intérêt national a leur plus basse dimension : le degré ethnique voire tribal de l’affichage identitaire, pour une tribune à vocation d’incarner plutôt l’unité de la nation à travers sa diversité.    

En tout état de cause, ces considérations et cette attitude de bas étage ont pu surplomber les débats plus d’une heure durant, au détriment sans doute des préoccupations essentielles partagées, avant que les échanges avec le chef du Gouvernement ne reprennent un certain envol avec l’entrée dans la danse de députés beaucoup plus nantis.

– Intransigeant sur les réformes

Toute proportion gardée, la prise en charge du débat par certains caciques de l’hémicycle aura relevé son niveau mais pas changé grand-chose à la motivation. Certaines grande préoccupations et attentes de grande portée politique ont été certes prises en compte, grâce notamment à la perspicacité de parlementaires des groupes Parena, le CNID, l’URD, l’Adéma, le RPM. Ainsi, sans préjudice de leur désormais appartenance à la majorité présidentielle, certains sujets de l’actualité brûlante ont pu avoir droit au chapitre. Y figurent, entre autres, des questions relatives aux incursions d’armées étrangères en territoire malien, à la transformation du Nord-Mali en sanctuaire de la drogue, à la déliquescence de l’école, à la persistance du phénomène de la corruption et la délinquance financière. La liste n’est pas exhaustive. Les composantes politiques de l’Assemblée, par le biais de leurs porte-voix respectifs, n’ont pas passé sous silence non plus leurs inquiétudes relativement aux consultations électorales de 2012 et référendaires ainsi qu’aux réformes institutionnelles envisagées par les hautes autorités. «Les réformes institutionnelles sont inopportune», a ainsi soutenu Me Hamidou Diabaté, au nom du PARENA, en se fondant notamment sur l’état d’impréparation des élections.

Idem pour le RPM qui, tout en s’interrogeant sur leur opportunité, a prévenu, par la voix du président du parti, IBK, que «les peuples sont devenus des acteurs majeurs de leur histoire» et ne se laisseront pas abuser, allusion faite également aux risques de connaître les mêmes dérives contestatrices que certains pays voisins, dans l’organisation des consultations électorales de 2012.             

À  toutes ces préoccupations soulevées, le Premier Ministre, Mme Cissé Mariam Kaïdama Sidibé, a apporté des réponses qui ont manifestement donné satisfaction, à en juger par les propos tenus par l’écrasante majorité des forces politiques de l’Assemblée Nationale, lors des explications de vote. Sur les réformes institutionnelles, le nouveau chef du Gouvernement s’est montré intransigeant  : elles sont indispensables ne serait-ce que pour le renforcement de la démocratie dans le pays, a-t-elle argumenté, avant de rassurer sur l’ensemble des inquiétudes relatives à la bonne tenue des élections, notamment par des engagements à privilégier le consensus dans la recherche de solutions à toutes les questions polémiques.

Cette fermeté  intervient à un moment où le processus électoral et référendaire se voit de plus en plus engluer dans l’impasse d’une réelle impréparation principalement due aux tergiversations sur le choix d’un fichier consensuel auquel pourrait se greffer les équations d’un référendum sans instruments électoraux adéquats. Est-il par exemple raisonnable de persister dans une logique de référendum pendant que les équivoques pèsent encore sur l’existence même des listes électorales ? Les non-dits d’une telle aventure hypothétique tiennent au moins au fait que l’acceptation d’une consultation référendaire sur la base du fichier s’accommodera difficilement d’une contestation d’élections générales organisées à partir du même fichier. Idem pour la loi électorale, cohérence pour cohérence.            

Sur tout un autre plan, le nouveau PM a pu délibérément esquiver d’autres questions, notamment sur le gênant dossier de l’Initiative Riz légué par son prédécesseur. Mais la dissonance n’était visiblement pas de taille à fausser la symphonie d’approbations dont la DPG a bénéficié à l’Assemblée Nationale du Mali et qui ne s’explique sans doute pas seulement par une complaisance en faveur du genre ou par le seul bouleversement de l’ancienne configuration de la représentation populaire. À défaut de pouvoir mettre la DPG à profit pour réveiller des malaises, nouvelle casquette oblige, la tribune aura tout au moins servi pour se mettre en exergue par le petit-écran, à quelques encablures des échéances électorales. C’est ce qui explique le débat soit exceptionnellement pris en compte, pour certaines entités politiques, par les candidats putatifs et non par les présidents de groupe : Ibrahim Boubacar Keïta pour le RPM, Mountaga Tall pour le CNID, par exemple.

A.Keïta

Aurore 30/06/2011