URBANISATION EN AFRIQUE DE L’OUEST

Selon la Banque mondiale, ses défis freinent les opportunités de croissance à Bamako,Conakry et Niamey

Le Groupe de la Banque mondiale a publié le mercredi 20 juin 2018 un rapport, intitulé «les
défis de l’urbanisation en Afrique de l’ouest». Ce rapport semestriel parle des défis de
l’urbanisation rapide et désordonnée en Guinée, Mali, Niger et au Tchad, notamment dans
les capitales. Le lancement de ce rapport a été l’occasion pour les responsables de la
Banque mondiale d’échanger sur les grandes questions de développement et de susciter le
débat autour des options clés de politiques macroéconomiques et budgétaires destinées à
soutenir la réduction de la pauvreté. Une vidéoconférence, organisée simultanément à
Bamako, Conakry, N’Djamena et Niamey a été animée par Madame Soukeyna Kane, la
directrice des opérations de la Banque mondiale pour le Mali, le Tchad, la Guinée et le
Niger.
Selon ce rapport, alors que les villes d’Afrique de l’ouest font face à des flux migratoires
importants, concernant les jeunes, elles doivent relever de nombreux défis associés à cette
urbanisation rapide et s’atteler à la création d’économies compétitives et à la fourniture de
services urbains de qualité.
En se penchant en particulier sur les trois capitales Bamako, Niamey et Conakry, le
document réfléchit à la manière dont les villes pourraient exploiter et développer leur
potentiel en matière de productivité et de croissance inclusive. Ces trois villes contribuent
significativement à l’économie nationale. Ainsi, Bamako contribue à 34% au PIB du Mali,
Conakry et Niamey à environ 27% au PIB de la Guinée et Niger. Par ailleurs, note Madame
Soukeyna Kane, la population de ce capitales augmente plus rapidement que partout ailleurs
dans le monde. Et, l’explosion démographique des jeunes pourrait de ce fait transformer en
dividende démographique –les villes profitant d’une croissance temporaire de la population
en âge de travailler pour employer les jeunes de manière productive- ou en catastrophe
démographique, accompagnée d’instabilité urbaine si les villes ne répondent pas à ces
aspirations. «Malgré leur importance pour leur économie nationale, Bamako, Niamey et
Conakry ne sont pas de véritables moteurs de croissance et de prestation de services
efficaces » souligne Meskerem Brhane, responsable programmes d’urbanisation de la
Banque mondiale dans ces pays et co-auteur du rapport. Car, selon elle, aucune de ces trois
capitales ne parvient à accroitre sa compétitivité ni à garantir des services urbains à ses
habitants. La productivité du travail y reste faible par rapport à la moyenne de quinze villes
d’Afrique subsaharienne et stagne depuis une quinzaine d’années. Plus inquiétant encore,
note Madame Soukeyna Kane, la prestation de services urbains en Guinée, au Mali et au
Niger continue d’être inférieure à la moyenne dans la sous-région et ne semble pas prête à
rattraper celle des autres pays subsahariens. Ainsi, le rapport indique que la ville de Niamey
est assez concentrée autour de son centre-ville. En revanche, Bamako présente une forme
urbaine très fragmentée. Quant à la ville de Conakry, elle reste fortement soumise aux
contraintes de sa situation géographique, sur la presqu’ile de Kaloum, ce qui la conduit à une
expansion linéaire ; avec une forte concentration à l’extrême pointe de la péninsule. « Les
villes connaissant une fragmentation urbaine tendent à limiter les opportunités
d’interaction, ce qui accroit le cout de la fourniture d’infrastructures et de services urbains.
Ces ville ne parviennent donc pas à tirer profit des avantages généralement liés à la
croissance» explique Madame Soukeyna Kane.

Les trois capitales accusent un retard par rapport à la moyenne des villes subsahariennes et
montrent de faibles signes de redressement.
«Pour devenir des vecteurs de croissance et fournir des services publics adaptés, Bamako,
Conakry et Niamey doivent se concentrer sur leur urbanisme et leur organisation spatiale car
les trois villes ne disposent pas actuellement de marchés fonciers suffisamment efficaces ; ce
qui entraine des investissements dans des bâtiments et infrastructures éloignés des centres
villes» explique Madame Soukeyna Kane. Pour elle, l’insuffisance des investissements dans
un réseau d’infrastructures rentables, y compris celles des transports publics, a aggravé les
problèmes d’accessibilité et de mobilités urbaines.
La planification, la connexion et le financement coordonnés devraient constituer une
priorité importante à l’avenir
Le rapport indique que la planification implique de tracer une voie pour les villes en fixant
les conditions de l’urbanisation, en particulier les politiques d’utilisation des terres urbaines
et d’expansion des infrastructures de base et des services publics. Quant à la connexion, elle
concerne l’accessibilité des ménages aux emplois et aux services, tandis que le financement
suppose de trouver des sources pour les fonds nécessaires à la fourniture des infrastructures
et des services à mesure que les villes se développent. Toutes ces fonctions doivent être
coordonnées pour soutenir l’urbanisation.
En somme, en misant sur l’atout d’une jeunesse de plus en plus nombreuse et en
promouvant une gestion urbaine maitrisée, qui coordonne politiques publiques et
investissements dans les infrastructures, Bamako, Conakry et Niamey pourront accélérer
leur développement et offrir des opportunités économiques à l’ensemble de leur
population.

Dieudonné Tembely