Sidiki Sow, ingénieur agronome et agroéconomiste « Par faute d’initiatives, le Mali perd 900 milliards de FCFA par an dans le coton »

Lors de la première édition de l’espace de discussions, d’échanges d’idées  pour  changer  le Mali  dans  le futur, dénommé  Ted X Bamako (idée à but non  lucrative qui vise à rassembler les gens et les personnalités autour des idées qui méritent d’être partagées, comme le futur que nous voulons ; ces idées sont ensuite retransmises dans plus de cent langues partagées  pour que les gens puissent s’inspirer de ces idées pour changer le monde), organisée par Accountability Lab (qui  intervient  pour l’amélioration de la gouvernance au Mali, la lutte contre la corruption et la transparence) avec  à sa tête son directeur pays, Moussa Kondo, et financé par l’Ambassade Américaine au Mali, des speakers (orateurs) ont été choisi pour partager leurs expériences avec la jeunesse sur le futur. Parmi ces orateurs, figure Sidiki Alassane Sow, ingénieur agronome et agroéconomiste. Il a intervenu sur le thème : « l’agro-industrie : véritable moteur de développement pour le Mali ». De ce fait, il a pris un exemple  agricole  pour changer le futur du Mali en positif. L’exemple à trait à la culture du coton, secteur dans lequel le Mali perd 900 milliards de Fcfa par an, faute d’initiatives.

Parlant du coton, ce sésame rare dont le Mali minimise l’importance, il a dit : le coton supporte la vie de 4 millions d’agriculteurs, il est produit sur plus de 135.000 km2  et  dessert  plus de trois milles villages en cinq régions différentes, il fait  vivre  un malien sur cinq. Le coton, c’est 15% du PIB du pays,  c’est  la première activité agricole au Mali. La CMDT est en charge de la campagne, elle fournie  les intrants, les engrais et finance toute la campagne  agricole  avec ses 4 millions de  cotonculteurs. Elle se charge aussi du transport  et de l’égrenage du coton. La  CMDT génère, dit-il, chaque année plus de 200 milliards de FCFA de chiffre d’affaires et garantie un prix minimal aux agriculteurs  qui  produisent  le coton. En  plus de cela, poursuit, Sidiki Sow, le coton  au Mali est produit  de manière écologique, c’est-à-dire, qu’il est produit en rotation culture, sa production donc au Mali,  respecte  les caractéristiques du sol.

Parlant de la chaine de transformation du coton, l’agroéconomiste dit que le coton passe à travers  trois  à quatre  chaines  de transformations dans la vingtaine  d’unités  d’égrainage de coton  que le pays a mis en place. Le textile est ce qui nous intéresse  aujourd’hui, dit-il, après  l’égrainage, le coton passe dans la filature. Après  c’est  le titurage, la teinture, le tissu. Avec e tissu, on pourra ensuite coudre les vêtements.

Au Mali, indique l’orateur, on exporte plus de 97%  de notre production de coton  annuel. Seul 3% du coton que nous avons, dit-il, est utilisé dans l’industrie au Mali. Ce qui  est complètement insuffisant. Le coton a des multiples utilisations. Le coton est utilisé dans la pharmacie, dans le mobilier, dans le fauteuil, dans les chaises, dans le transport, et dans bien d’autres domaines.

Qu’est ce que  le coton  peut nous apporter  la thématique étant l’industrialisation du coton?  Quelle  est  la valeur que le coton peut apporter au Mali si nous étions capables de le transformer uniquement jusqu’au tissu ? On a fait le constat que les  industries  qui  se sont  implantées en Afrique, dit-il, nous ont permis  de  voir qu’un  investissement  de 150 millions de dollars était capable de créer à peu près 10000 emplois.  La transformation  du coton  est  une  machine  à  emploi. Un  investissement de 15000 dollars crée un emploi dans notre pays. Avec  cette  transformation, dit-il, on est capable de générer 100 millions de dollars de chiffre d’affaires et de transformer 35000 tonnes de coton. Si nous étions  capables  de  mettre  en place uniquement  dix  unités  de transformation  du  coton  jusqu’au tissu, nous  serions  capables  de transformer la moitié de la production  malienne  de  coton  et de générer un chiffre d’affaires d’un milliards  de  dollars (plus  de 600 milliards de FCFA). Et si nous étions  capables  de transformer  la totalité de notre production de coton au Mali que  pourrions-nous faire ? Avec uniquement  trente  unités  de transformations jusqu’au tissu,  nous  serions  capables de  créer 200.000 emplois, nous serions capables de générer plus  de 2  milliards  de  FCFA de chiffre d’affaires. Aujourd’hui la CMDT génère 375 millions de dollar en chiffre d’affaires. Et si nous étions capables  d’aller  jusqu’au bout  de  la chaine de transformation,  nous serions capables  de  générer plus 2  milliards de dollar de chiffre d’affaires, ce qui fait 1000 milliards de FCFA.

Savez vous qu’on est passé cette année nous sommes passés à côté de 1,6 milliards  de  dollars,  plus  de  900 milliards de FCFA ? Si on veut être milliardaire, conseille  Sow  à  l’assistance, c’est dans le coton qu’il  faut se lancer. Mais la création de 200.000 emplois c’est aussi une manière de réduire de 15% le chômage au Mali,  qui est à peu près 1, 3 millions de personnes, nous serions capables de réduire le taux de chômage dans notre pays de 15% juste en développant l’industrie que nous avons au Mali.

Le premier défi pour nous, dit-il, c’est la compétition sur le marché international. Pour y faire face, il faudrait que  notre Etat supporte l’industrie du coton en subvention  économique  qui  nous permettra de faire la compétition  à l’international. Le deuxième défi, c’est l’électricité. « Sans électricité, il n’y a pas d’industries. On doit absolument mettre l’accent sur le développement du secteur énergétique au Mali que ce soit avec les projets étatiques ou projets privés », a soutenu Sow. Le troisième défi, c’est  la main d’œuvre. L’Etat  malien  doit  mettre  en place une politique  d’éducation  pour  que chaque année, il y ait des formations pointues  à l’endroit  des Maliens dans le secteur de l’ingénierie  agroalimentaire, dans le secteur de l’agroéconomie, dans le secteur de l’agrobusiness, des ingénieurs  mécaniques, etc. Car deux cent mille emplois, c’est deux cent mille personnes formées, deux cent mille emplois, c’est aussi deux cent mille familles qui arrivent à survivre au Mali. Le quatrième défi, les entrepreneurs. Comme je l’ai dit, vous voulez  être milliardaire ? C’est dans le coton que ça se passe. Il y a 900 milliards  à perdre dans  le coton, il y a de la place pour tout le monde. Le coton, c’est la création d’emploi, le coton,  c’est l’industrialisation, c’est une machine à emploi. On doit participer  tous ensemble à la transformation et la valorisation  de cette richesse que nous avons au Mali, pour  développer  le coton du Mali, car c’est une ressource qui est la notre, que le Mali nous a donné.

Hadama B. Fofana