Sécurisation des organes de la transition et guerre de libération du nord

La Cédéao doit-elle ou non intervenir militairement dans la reconquête du Nord du Mali, tombé – il y a trois mois – entre les mains des mouvements rebelles du MNLA, Ançar Eddine, Aqmi, Mujao, etc. ?  Sur cette question les avis sont partagés.

A Bamako, les autorités pensent que l’Armée malienne, dotée de moyens logistiques conséquents, peut seule faire l’affaire : reconquérir les 2/3 du territoire occupé. Cette thèse a du mal à passer auprès de la Communauté internationale à commencer par la Cédéao…à  l’Union africaine…

Selon certains observateurs, la première erreur dans une guerre consiste à minimiser l’ennemi. C’est ce qu’il faut éviter dans ce contexte actuel du Mali. L’autre chose à éviter est de continuer à croire obstinément que notre armée peut seule faire la guerre si elle est conséquemment dotée de moyens logistiques.

« Sans vexer nos vaillantes forces armées et de sécurité, je crois qu’elles ont besoin d’appui extérieur en tout genre pour faire cette guerre au nord. Sans compétences supplémentaires, je me demande si l’appui logistique sollicité auprès de la Cédéao ne risque pas un jour de renforcer l’arsenal de guerre des rebelles qui disposent déjà d’un parc assez garni d’engins lourds et de véhicules immatriculés AMA (Ndlr : armée malienne) », note un sous-officier à la retraite à Niono.

Aux yeux de certains analystes économiques, Bamako n’a aucun intérêt à rester dans la situation actuelle quand on sait que l’asphyxie risque d’être multiforme dans les mois à venir pour le Mali. En plus du déficit budgétaire créé par la suspension de plusieurs aides extérieures, le Mali fait aussi face à une crise alimentaire exacerbée par la prise en charde des populations déplacées du nord.

Il faut rappeler que depuis sa mise en place, le gouvernement CMD se fait toujours attendre sur certaines grandes questions comme la renaissance de la justice, la relance de l’économie, la mobilisation de fonds de guerre, la sécurité des personnes et de leurs biens, etc. L’agression du chef de l’Etat jusqu’à son lieu de travail (première institution de la République), la gestion les procédures judiciaires ouvertes à cet effet, ne convainquent pas la population de l’efficacité de l’équipe de l’astrophysicien de la Nasa dont le remplacement est de plus en plus sollicité.

Cheick Modibo qui a aussi besoin de prouver à l’opinion nationale et internationale que ses décisions n’ont rien d’imposé par la junte dont une supposée emprise sur le gouvernement est sans cesse dénoncée par les Etats-Unis, la Cédéao, l’Union africaine, etc. Ils sont aussi nombreux les Maliens à croire que le Premier ministre risque de vite tomber dans l’immobilisme en seulement deux mois de fonction.

« Cheick Modibo doit convaincre le capitaine Amadou  Haya Sanogo que la présence d’autres commandements (fussent-ils étrangers) sur le sol malien n’a rien d’attentatoire à son pouvoir », confie un étudiant malien. Avant d’ajouter que « le rejet de l’intervention de la Cédéao au Mali par le capitaine se justifie par sa volonté de demeurer seul maître à bord du bateau Mali ».

Or, l’arrivée des forces de la Micéma pourrait le priver d’une manière ou d’une autre de ce privilège quand on sait que celles-ci n’auront pas seulement à combattre les rebelles au nord mais aussi à faire respecter les institutions de la République par tous ceux qui tenteront d’empêcher le processus de normalisation de la transition, enclenchée avec la mise en place du gouvernement, la reconduction du président intérimaire, Pr. Dioncounda Traoré, et la dissolution du CNRDRE.

Décrite comme suit : un gouvernement à la coupe de la junte, la décapitation de l’armée avec la mise à la retraite de plusieurs dizaines de gradés, président de la République hors du pays pour des raisons de santé… la situation actuelle marquée par un ralentissement des choses tourne à la faveur du capitaine Sanogo, moins présent sur la scène publique mais puissant pour être celui qu’on consulte et à qui on rend compte sur chaque décision. Il continue de régner caché.

Pour un analyste malien, des questions militaires, la guerre de libération que le Mali prépare contre les rebelles ne doit point s’inscrire dans la durée pour qui connaît le coût d’une guerre. Donc, il convient de renforcer nos troupes avec d’autres hommes et de moyens logistiques pour que ça soit le cas.

Ayant déjà réalisé cela, la Cédéao veut éviter une permanente guerre sur une partie de son territoire aux conséquences extensibles et migratoires. L’ONU, la France et d’autres sont visiblement acquis à cette cause, pas le capitaine Amadou Haya Sanogo et son homme lige Cheick Modibo Diarra qui n’entendent pas lâcher du lest quitte à ce que le Mali soit définitivement amputé.

Markatié Daou

L’ Indicateur Du Renouveau 15/06/2012