Mot de la semaine : Arrêt

Sans surprise, les neuf membres de la Cour constitutionnelle du Mali ont rendu leur arrêt
définitif pour le premier tour de l’élection présidentielle. Dernier espoir des candidats ayant
obtenu des scores qu’ils ont jugés inférieurs aux résultats issus des bureaux de vote, la Cour a rejeté en bloc les requêtes formulées, qui vont de la récusation de six membres de la Cour constitutionnelle, à l’annulation pure et simple de l’élection présidentielle, ou de certains résultats qui seraient frauduleux. Manassa Dagnoko et les huit conseillers de la Cour constitutionnelle n’ont pas voulu suivre les plaignants, et ont proclamé les résultats dans le même ordre que le Ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation. Cette
décision qui est sans appel, ressemble, aux dires des candidats plaignants, plus à un service
rendu au Président de la République, candidat à sa propre succession, qu’à une
proclamation des résultats sur la base des suffrages exprimés par les électeurs. Lors d’un
meeting au Palais de la Culture Amadou Hampaté Ba, la veille de la proclamation, 21
candidats avaient déjà annoncé qu’ils ne reconnaîtraient pas les résultats qui seront
proclamés le lendemain s’ils ressemblent à ceux proclamés par le Ministère. Ils ont fait le
serment de se battre jusqu’au bout afin que le droit soit dit. Qui du regroupement des 21
candidats contestataires ou du Président sortant aura le dernier mot ? Manassa Dagnoko et
ses huit conseillers ont-ils rendu un arrêt conforme à la loi ou un service à un homme,
comme l’affirmait l’opposition ? Les réponses à ces deux questions seront connues avant le
dimanche 12 Août 2018, date du second tour. Selon nos informations, les 21 candidats
contestataires projetteraient de manifester pour réclamer les vrais résultats, ceux qui sont
issus des urnes et non des attributions de notes à la tête du client. En tout cas, à en juger par
la détermination des participants au meeting, il y a fort à redouter que les prochains jours
pourraient être tumultueux à Bamako, dans les capitales régionales, ou autres localités. Ils
sont nombreux, ceux qui pensent que l’élection présidentielle n’a été ni transparente ni
crédible, encore moins équitable. Par conséquent, ils se disent outrés par la proclamation de
la Cour constitutionnelle qui, au lieu de dire le droit, aurait rendu un arrêt tout aussi inique
que partial.
Par cet arrêt, la présidente et les conseillers de la Cour Constitutionnelle ne viennent-ils pas
de rater une occasion unique d’écrire une nouvelle page de l’histoire de l’institution, dont les décisions font l’objet d’incompréhension au sein de l’opinion ?

Youssouf Sissoko