Mali : Barrick face à un tournant crucial après la nomination d’un administrateur provisoire à Loulo-Gounkoto

 

La tension monte d’un cran entre l’État malien et le géant canadien Barrick Gold. Le Tribunal de commerce de Bamako a rendu sa décision, longtemps attendue, en nommant ce lundi 16 juin l’ancien ministre Zoumana Makadji comme administrateur provisoire de la mine d’or de Loulo-Gounkoto, la plus productive du pays.

Cette décision intervient après plusieurs reports et à l’issue d’une procédure judiciaire lancée par l’État malien début mai. Elle consacre une prise de contrôle inédite de l’État sur un site stratégique jusque-là géré à 80 % par Barrick et à 20 % par l’État malien. La mine, située dans la région de Kayes, a produit plus de 723 000 onces d’or en 2024, contribuant de manière significative aux recettes fiscales et aux exportations du Mali.

Une nomination qui ravive les tensions

La désignation de Zoumana Makadji, figure politique connue et ancien ministre, comme administrateur provisoire, est perçue par Barrick comme une ingérence grave et injustifiée. Le groupe avait jusqu’ici contesté fermement cette initiative, qualifiant la procédure de violation des accords contractuels et du droit malien.

Dans un communiqué antérieur, Barrick avait averti qu’une telle décision pourrait compromettre non seulement ses opérations, mais aussi l’image du Mali auprès des investisseurs étrangers, dans un contexte régional déjà fragile.

Un coup dur pour l’investisseur historique

Barrick, présent au Mali depuis près de trois décennies, s’est toujours présenté comme un partenaire stable et engagé. Le groupe rappelle avoir investi plusieurs milliards de dollars dans l’exploration, les infrastructures et les communautés locales. La société dénonce également la détention prolongée de plusieurs de ses employés, incarcérés depuis plus de cinq mois, ainsi que le blocage partiel des exportations d’or.

Et maintenant ?

La nomination d’un administrateur provisoire ouvre une nouvelle phase d’incertitudes. Si en théorie ce rôle vise à assurer la continuité des activités dans un cadre légal neutre, pour Barrick, cela revient à une mise sous tutelle de ses opérations.

Le groupe envisage désormais un recours à l’arbitrage international, comme le prévoient les conventions minières signées avec le Mali. L’enjeu : faire respecter ses droits, protéger ses investissements, et éviter un précédent nuisible pour le climat des affaires.

Une mine, un symbole

Le complexe Loulo-Gounkoto n’est pas seulement une mine : c’est un symbole de la coopération économique internationale du Mali et un pilier de son secteur extractif. Mais cette crise pourrait bien rebattre les cartes. Entre volonté de souveraineté économique de l’État malien et recherche de sécurité juridique des investisseurs, l’équilibre est fragile.

La question désormais : Barrick peut-il encore espérer conserver le contrôle effectif de sa mine ? Ou assiste-t-on au début d’une ère nouvelle où l’État malien reprendra progressivement la main sur ses ressources stratégiques ?

La rédaction

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