Leçon de géopolitique : l’immigration clandestine, un fléau au sein de la jeunesse africaine

Très largement occultée par le terrorisme dans l’actualité internationale, l’immigration clandestine en Afrique subsaharienne devient, de plus en plus, le fléau qui mine la jeunesse du continent. Le décompte macabre continu depuis maintenant plusieurs années. La détresse de nombreuses familles endeuillées ne fait que grandir. Et le drame est d’autant plus saisissant qu’elles ne parviennent, même pas, à faire le deuil de leurs proches disparus dans les flots de la mer méditerranée. Depuis trois ans, plus de 10 000 jeunes africains subsahariens ont ainsi perdu la vie, souvent dans des circonstances troubles. Et ceux qui arrivent à survivre à la mort du parcours vers l’ « Eldorado », perdent toute dignité, car deviennent esclaves.

L’horreur aura vite fait le tour du monde à travers le web et les médias : des migrants vendus comme esclaves aux enchères ! En effet, une journaliste de la chaine américaine d’informations CNN a pu assister à une vente aux enchères de migrants subsahariens à des « clients » libyens par leurs passeurs. Dans le reportage, l’on dénombre une douzaine de nigérians vendus de manière lapidaire. Dans le même reportage, des migrants témoignent se faire battre régulièrement par des câbles électriques. Très souvent, le piège se renferme sur les immigrants clandestins sur place. Puisque les garde-côtes libyens ont considérablement réduit les voies maritimes menant à l’Europe à cause d’un accord conclu entre l’Union Européenne et l’Etat libyen, les passeurs, « propriétaires » de beaucoup de migrants qui ne sont plus rentables, deviennent de la marchandise à vendre aux plus offrants. Cet enfer libyen fait aussi écho aux conditions de vie misérables d’autres migrants en Algérie où ils se font traiter encore pire qu’ « un mouton », selon un des aventuriers.

Mais alors, pourquoi malgré la tragédie humaine en cours, le flot de migrants africains ne faiblit-il pas de manière considérable ? Difficile de répondre à une telle question. Certainement que les pays d’origines ne font pas assez de communication autour du fléau pour dissuader les candidats à l’aventure, à défaut de les empêcher de tenter la traversée. Les Etats africains, à forte résonance de migrants, devront multiplier les initiatives pour montrer la réalité de l’aventure. Et de prouver qu’il vaut mieux rester chez soi, pauvre mais digne que de vivre ailleurs en tant qu’esclave quand on a la chance de ne pas mourir par noyade. En plus de cet aspect, force est de reconnaître que la précarité dans les pays africains est le facteur déterminant qui pousse beaucoup de jeunes à croire en un Eldorado, même écorné.

« Outrage à la conscience de l’humanité »

Entre temps, l’ONU dénonce le pacte inhumain qu’a conclu l’Union Européenne avec la Libye pour endiguer le flux d’immigrés clandestins sur ses côtes. L’UE ferme sciemment les yeux sur les horreurs qui sont commis quotidiennement en Libye et en Algériens sur les migrants, pourvu que ses côtes soient épargnées. Le Haut-commissaire de l’ONU aux Droits de l’Homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, ne mâche pas ses mots pour dénoncer la cruauté de la Communauté internationale : «la souffrance des migrants détenus en Libye est un outrage à la conscience de l’humanité» a-t-il dit.

D’après les chiffres du Département libyen de lutte contre la migration illégale, cités par l’ONU, 19 900 personnes se trouvaient dans ces centres début novembre, contre environ 7 000 à la mi-septembre.

Ahmed M. Thiam
thiam@journaljournalinfosept.com