EXCLUSIF / Mohamed Ag Najim, le chef du MNLA, parle au Républicain

En rentrant à Tombouctou comme dans les trois autres régions du Mali que nous pensons être les nôtres (Azawad), nous avions pensé avoir en face la détermination des hommes sensés la sécuriser, la défendre, mais hélas ! De bien de mes hommes je crois que je suis l’un des rares à n’avoir jamais franchi les murs de cette ville. Comme tout habitant de la planète, je crois que j’ai beaucoup entendu parler de Tombouctou.

Sauf que dans ma vision,  je m’attendais à une ville avec tout ce que cela comporte au plan du développement des infrastructures, de l’urbanisation,  de l’assainissement et du  tourisme. Mais à ma grande surprise, j’ai découvert, avec  grand regret,  une autre réalité : une ville où tout est à faire et à tous les niveaux, en somme une ville prestige, qui repose sur des valeurs de foi et de croyance attelées à des vertus que consacrent  333 saints. Alors le constat qui s’impose est que le Nord du pays, toute la zone « Azawad » a été délaissée au profit des villes du centre et du Sud par les différents gouvernements successifs, sur tous les pans.

Voilà pourquoi notre combat consiste à opter pour un choix de développement durable de ces 3 régions, en nous appuyant sur les valeurs intrinsèques de culture et de connaissance des fils du Nord. Plus questions d’attendre que tout vienne de décisions relevant de la compromission, plus questions de vie sous le poids d’une administration à la solde de Bamako. Le constat est cinglant entre d’une part la paupérisation des infrastructures entre Kidal,  Gao, Tombouctou et d’autre part l’embelli ostentatoire affichée par les autres régions. Le Nord est un contenant  vide. Le schéma pensé de l’ « Azawad » repose sur des racines solides, des branches soutenues. L’ « Azawad » de demain sera grand.

Nous comptons sur vous pour traduire cette réflexion et porter ce message de paix à toutes les communautés dans un esprit fraternel qui ne sera nullement sous tendu par une quelconque exclusion. Cet acte nous le posons ensemble et nous avons conscience des enjeux. Voilà pourquoi nous en appelons à la sagesse des notables ici présents et aux bénédictions des Imams dans cette salle. L’Azawad est un espace de vie de toutes les communautés qui y vivent, sans exclusive. Nous ne l’avions jamais pensé en termes de Noirs ou blancs, de Tamasheqs ou d’Arabes encore moins de Sonrhaïs ou de Peulhs. Les objectifs de départ n’ont pas changé, les hommes qui ont initié le mouvement n’ont pas changé, il n’y a aucune raison de penser que vivre ensemble devienne insurmontable. Pour ce qui est d’AQMI, je vous renvoie la réflexion du  pourquoi le Mali a laissé la Mauritanie faire cette guerre en lieu et place de son armée et sur son territoire.

Pourquoi le Mali a-t-il refusé de faire la guerre à AQMI ? La zone frontalière avec la Mauritanie est devenue une zone de non droits, dépourvue de tout aspect sécuritaire, et du coup AQMI pouvait en faire ce qu’il voulait, cette zone n’intéressait plus le gouvernement, sinon comment comprendre que le Niger soit à combattre AQMI ? Pourquoi les interventions de l’armée Mauritanienne sur le sol du Mali ? N’est-ce pas là un problème du Nord ? Imaginez que cela se passe à Ségou, Sikasso, Kayes imaginez aussi les moyens militaires qui auraient été déployés. Je souhaite que chacun ici devienne mon messager pour une meilleure compréhension de notre combat ! »

Askia Mahamane

Le Républicain Mali 24/04/2012