Edito : Ramadan et COVID-19 riment avec paupérisation

A trader wearing a protective mask weighs grains at the Kimironko market as shoppers stock up on essential items that have been price fixed in order to prevent exploitative prices in Kigali, Rwanda March 17, 2020. REUTERS/Maggie Andresen

Les Maliens, dans leur écrasante majorité, ne savent plus à quel saint se vouer en ce début du mois béni de ramadan tant les crises s’enchainent et les solutions rarissimes. En effet, jamais, de l’avènement de la démocratie à nos jours,  le Mali n’a  connu une période aussi triste que décadente que celle que nous connaissons aujourd’hui caractérisée par une multitude de crises.

Depuis 2013, les gouvernements successifs se sont battus pour enrayer la  crise sécuritaire qui sévit au nord et au centre, mais  en vain. A cette  gravissime crise s’est greffée une autre tout aussi alarmante, à savoir la crise  sociale avec son cortège d’extrême pauvreté touchant les 3 /4 de la population malienne. Comme si celles-ci ne suffisaient pas, une pandémie d’une rare violence  vient  de s’abattre sur l’humanité toute entière.

C’est dans cette atmosphère désespérée et désespérante pour les maliens  qu’a débuté le vendredi 24 avril 2020 le ramadan. Pourtant un mois béni, un mois de pardon, un mois de pénitence pour tout musulman afin  que le miséricordieux puisse absoudre les péchés. Mais cette année, ce mois sera le plus difficile, à cause de trois facteurs majeurs, à savoir l’insécurité, la mal gouvernance et la pandémie du COVID-19.

L’insécurité empêche les populations de se mouvoir sur le territoire, surtout au nord et au centre. L’Etat malien n’’exerçant son autorité que sur le 1/3 de la vaste étendue du territoire malien ne pourrait  pas assurer la libre circulation des personnes et des marchandises. Conséquences, les prix des denrées de première nécessité vont non seulement prendre l’ascenseur, mais aussi et surtout seront fixés dans une anarchie totale. Si en 2013, seules les zones dites du nord et du centre faisaient face à  l’insécurité, en 2020, soit sept ans plus tard elle  s’est même déplacée jusqu’au sud et les gens ne vivent que recroquevillés.

La mal gouvernance, avec son corollaire de corruption à ciel ouvert, a gangréné tous les secteurs productifs du Mali,  à telle enseigne que toutes les ressources sont entre les mains de la petite bourgeoisie au détriment  de la grande majorité qui broie du noir. Plus de 80 % de la population malienne vivent en dessous du seuil de pauvreté et cette situation, loin d’être une fatalité, est simplement la conséquence de la mal gouvernance et de l’inéquitable répartition des ressources du pays. Le Mali était déjà agonisant avant l’arrivée de la pandémie du COVID -19, il est maintenant sur le point de tomber.

Le COVID-19, cette pandémie ravageuse n’épargnant personne, est venue amplifiée une situation sociale  déjà  grave au Mali. Avant cette pandémie, le pays était déjà dans  l’impasse financière, car incapable de faire face  aux revendications d’ordre syndical. Donc, le coronavirus, qui  touche aujourd’hui aux fondements économiques et sociaux  des Nations les plus développées, n’épargnerait pas celles qui balbutient, comme le Mali. A cause de cette pandémie, toutes les activités sont au ralenti, ce qui complique davantage l’approvisionnement des citoyens en denrées de première nécessité.

C’est dans cette atmosphère triplement alourdie que les musulmans ont entamé le Ramadan.

Youssouf Sissoko