DISPARITION La presse et la culture pleurent Modibo Konaté

« Nous venons d’Allah, et à Allah nous retournons. Modibo Konaté vient de rendre l’âme. Que la terre lui soit légère ». En ce lundi 29 octobre 2012 vers 15 h, lorsque je reçois ce SMS dans mon téléphone, je fus effondré. Si nous étions au mois d’avril, je penserais qu’il s’agissait d’un poisson d’avril.
Il est vrai que tout homme est appelé à mourir, mais celle de Modibo, nous ne l’attendions pas de si tôt. Surtout qu’il y a deux semaines, quand je lui avais téléphoné pour venir aux nouvelles de sa santé, sa grande sœur, la cinéaste Kadiatou Konaté, qui a décroché le téléphone, m’avait assuré qu’il dormait et que son état de santé s’améliorait beaucoup. Mais les vieilles personnes nous enseignent que la maladie et l’âme ne sont pas du même côté.

 

Après plusieurs mois de combat contre la maladie, notre confrère Modibo Konaté est décédé ce lundi 29 octobre 2012 à l’âge de 40 ans. L’annonce de la nouvelle est tombée comme un coup de tonnerre, tant dans la presse que dans le monde des arts et de la culture. Dans les rédactions où la nouvelle est parvenue, c’était la stupéfaction et la tristesse.
Journaliste professionnel, Modibo Konaté l’était. Et la présence à ses obsèques du directeur général de l’Amap, Souleymane Drabo, et plusieurs journalistes de « L’Essor » témoignait de son engagement dans la collecte et le traitement de l’information.

Artiste, il l’a été aussi. Militant de l’Association des jeunes écrivains du Mali, Modibo aura consacré sa vie à la culture. Jusqu’à sa mort, le confrère siégeait pour un deuxième mandat au bureau national de la Fédération des artistes du Mali (Fédama), dont il était le secrétaire général. Son dynamisme et son dévouement en faveur de la culture ont impulsé une nouvelle dynamique à cette Fédération et la prise en compte des intérêts des artistes dans les prises de décisions politiques.

A son enterrement, mardi matin, le monde des arts et de la culture s’est fortement mobilisé. Le secrétaire général du ministère de la Culture, Al Hady Koïta, était à la tête d’une forte délégation composée de cadres de son département, mais aussi d’artistes-musiciens et de comédiens comme Michel Sangaré, le réalisateur Salif Traoré ou encore Kardjiguè Laïco Traoré.  

« Un grand bosseur »
Travailleur, humain, dynamique, engagé, etc., ses plus proches collaborateurs et amis ne tarissent pas d’éloges sur lui. Joint au téléphone, l’icône du cinéma africain, Souleymane Cissé, retient de lui « un garçon très respectueux », après avoir travaillé avec lui sur beaucoup de projets culturels, notamment les premières éditions du Festival international de Nyamina.

Pour l’administrateur de « Blonba », Modibo Konaté était la 3e personnalité de sa structure. Son dynamisme, dit-il, et son dénouement au travail ne faisaient l’ombre d’aucun doute. « Il était le rédacteur en chef de toutes nos émissions (comme « Barra », « A nous la citoyenneté », etc.), explique Alioune Ifra Ndiaye. Dans le travail de Blonba, c’est moi qu’on voyait, sans doute en tant que premier responsable, mais la cheville ouvrière c’était bien Modibo, témoigne son ex-employeur.
« Il était sur le chantier de formation d’une centaine de jeunes dans plusieurs aspects de la vidéo, comme la réalisation, le captage, etc. Sa mort constitue pour moi et pour Blonba une énorme perte. Je perd un gros bosseur », confie Alioune Ifra Ndiaye.
A « L’Essor », Modibo a su cultiver avec les autres le sens de rapports humains. Et Youssouf Doumbia, qui a travaillé avec lui au desk culture le témoigne : « Je retiens de lui un homme qui aimait profondément la culture, pour laquelle il avait une sensibilité particulière. Ce qui était remarquable chez lui, c’était aussi son dévouement et sa passion pour la littérature. Avec les jeunes écrivains, il avait créée une association, et il avait un projet d’éditions de plus d’une cinquantaine de jeunes auteurs ».

« Homme de conviction et d’action »
« Modibo était un fédérateur, renchérit Youssouf Doumbia. En témoigne son combat au sein du bureau de la Fédama, où il n’a jamais ménagé son engagement à défendre bec et ongle les droits des artistes. Il avait une obsession : que l’artiste puisse vivre de son art. Et la réalisation de cette ambition avait commencé à travers les droits d’auteur payés aux artistes ».
« Sur le plan humain, je retiens de lui un collaborateur sociable, sans rancœur, et très attaché aux rapports humains. Sans doute, il doit cette vertu à son appartenance à une grande famille. Lors de son enterrement, j’ai vu de nombreux stagiaires de L’Essor qui ne sont plus là, mais qui ont tenu à être présents à ses obsèques. Ceci témoigne du fait qu’il avait su cultiver avec les autres une relation fondée sur les valeurs sociales. Il va beaucoup nous manquer », regrette Youssouf Doumbia.

Au ministère de la Culture, on pleure la mort d’un jeune dynamique au service de la culture. Pour le coordonnateur de « L’Opéra du Sahel », Alamouta Danioko, le défunt est un homme de pensée, de conviction, mais surtout d’action. « En 2006, j’ai connu Modibo Konaté lorsque je dirigeais l’Agence pour la promotion des industries culturelles. Depuis cette période jusqu’à son décès, c’est un homme humble, courtois et engagé que j’ai connu. Il avait un idéal, celui d’œuvrer pour la promotion de la culture du Mali sous toutes ses formes. En tant que secrétaire général de la Fédama, il avait impulsé une dynamique forte à cette Fédération, dans l’intérêt des artistes. Il avait permis à la Fédama d’être un partenaire privilégié du département de la Culture. Aujourd’hui, nous pleurons une grosse perte », témoigne Alamouta Danioko.

Modibo Konaté s’en est donc allé. Il laisse derrière lui une veuve et un enfant. Mais pour la presse et la culture maliennes, il restera parmi nous, car « les morts ne sont jamais morts ». Dors en paix, cher ami !

Issa Fakaba Sissoko

L’ Indicateur Du Renouveau 01/11/2012