Disparition d’Abdoul Traore dit « Diop » Un homme, un parcours, une conviction

On se rappelle de ses discours très durs, en 2007, contre le candidat Amadou Toumani Touré, alors même que son parti (faisant partie de l’alliance des 43 partis politiques ayant soutenu celui-ci), avait décidé de ne pas présenter un candidat. Avec l’Association Démocratie et Justice, ADJ,  » Diop » est entré en  » rébellion  » contre une décision qu’il jugeait « anti-démocratique ».

Mais ses sorties fracassantes dans la presse, ses coups de gueule en conférence de presse, ou encore ses critiques littéraires, vont désormais nous manquer. Diop a été arraché à l’affection de tous ce vendredi 15 juin dans un hôpital de Bamako. Son inhumation a eu lieu hier en présidence de plusieurs barons de son parti et autres responsables politiques du pays. La présence aux obsèques d’Alpha Oumar Konaré, de Cheick Oumar Sissoko (du parti Sadi), d’Aly Nouhoun Diallo, etc., témoigne de l’engagement politique de l’homme.

L’artiste, le journaliste, le politique…

Médecin personnel de l’ancien président Alpha Oumar Konaré, le Pr. Abdoul Traoré aura été de tous les combats. Sa vie professionnelle fut menée de manière intense entre les cours à la Faculté de médecine, pharmacie et d’odontostomatologie (FMPOS), les consultations de ses malades, la recherche, les publications académiques et l’encadrement des CES.

Homme de culture, Diop l’a été, pour été l’initiateur d’un des premiers festivals du Mali : Festival des Masques de Markala.

Ces activités, il les menait de front avec une production littéraire et artistique qui donnera quelques nouvelles dont une primée à l’internationale, un recueil d’épitres sur la gouvernance récente du Mali, des scénarios de film, etc. Son dernier livre, « Comment meurt l’autre moitié du Mali », (publié aux éditions « La Sahélienne »), connait  un franc succès. Et les lecteurs lui reconnaissent « une plume d’acier ». L’homme de conviction qu’il fut, doit cette qualité d’écriture à sa carrière de journaliste, pour avoir servi au journal « Les Echos » dont il fut un membre fondateur dans les années 1991 avec Alpha Oumar Konaré.

Un combattant

A 58 ans, le Pr. Diop n’avait rien perdu de sa combativité. Jusqu’au coup d’Etat du 22 mars, il était un membre très actif du collectif anti-réforme « Touche pas à ma Constitution ». D’où l’avis de ses camardes d’enfance, que Diop est resté combatif jusqu’au bout, faisant référence à ses luttes dans le mouvement estudiantin de l’UNEEM (Union nationale des élèves et étudiants du Mali), l’Adéma/PASJ, l’Association des écrivains du Mali.

Un de ses camarades politiques retient de lui « un grand combattant de la justice ». Pour Cheick Mamoutou Thiam, secrétaire à la communication de l’Adéma/PASJ,  » Diop est un homme qui s’est toujours battu pour les causes justes ».  » Il n’a jamais cherché quelque chose pour lui-même. Il n’était pas un chercheur de postes ou de faveurs, mais plutôt un homme qui se battait pour ses convictions ».

Ismaël Samba Traoré, directeur des éditions « La Sahélienne », se souvient l’avoir rencontré il y a 27 ans.  » Il venait de publier des nouvelles. Il nous a rejoints dans ce mouvement littéraire. Et dans ses écrits, j’ai découvert en lui une belle plume. Ceci a fondé notre amitié depuis 27 années… Je retiens de lui un homme très actif dans les mouvements associatifs. Il était une valeur sûre de la littérature. Et son dernier livre « Comment meurt l’autre moitié du Mali » a marqué le début d’une nouvelle collaboration avec moi. Nous avions beaucoup de projets littéraires. Et sa mort constitue non seulement une perte énorme pour le Mali, mais aussi et surtout pour le monde littéraire », témoigne Ismaël Samba Traoré.

Diop laisse ainsi derrière lui un grand vide. Mais la jeune génération a de quoi s’inspirer de son parcours.

Dors en paix Professeur !

Issa Fakaba Sissoko

L’ Indicateur Du Renouveau 19/06/2012