Crise politique / le saut dans l’inconnu

C’est dans cette logique que le RPM de Ibrahim Boubacar Keita avait quitté le FDR, le camp anti putsch au motif que le retour à la légitimité constitutionnelle était devenu une réalité  et qu’il fallait après ouvrir une autre page  qui conduirait à une nouvelle gouvernance et de nouvelles autorités qui prendraient en charge la réunification du pays coupé en deux depuis l’offensive MNLA.

C’est aussi la position de la junte qui s’est exprimée sur la question en des termes sans équivoque. Du coup, le président par intérim, à l’occasion de son adresse aux travailleurs à l’ occasion de la fête du travail, le premier mai dernier, a indiqué que s’il était considéré comme un facteur de blocage, il s’en irait de sa charge aussitôt le délai légal expiré, malgré la volonté de la CEDEAO de le voir rester au poste.

Quoique prévu par l’accord Cadre,  ce départ soulèverait une multitude de questions auxquelles il va falloir répondre et peut aussi entrainer une quantité de problèmes à gérer, à la satisfaction de tous. A la satisfaction de tous  ou à tous le moins dans une démarche consensuelle et concertée, et la chose même dans ce cas là, est difficile. L’Accord cadre sera-t-elle complétée par des dispositions nouvelles pour permettre à la sortie de crise d’avancer ? Les acteurs politiques de tous bords  seront-ils ignorés dans  le  gouvernement de transition qui ne manquera pas de succéder à celui de l’intérim et qui aura connu les correctifs inhérents à tout gouvernement de crise ou de sortie de crise ?

Quelles seront les conditions, les critères qui dicteront le choix de la nouvelle  personnalité qui devra conduire la transition ? De quels pouvoirs disposera t-il ? Acceptera-t-il  de ne se cantonner qu’à la seule symbolique de sa fonction ? Autant de questions que l’on pourrait se poser et auxquelles il faudrait ajouter, du fait de son extrême urgence  et de l’impatience des populations,  la re-constitution sinon la reconquête des deux tiers du territoire national. Car celles-ci ont besoin de savoir par quels moyens l’Etat envisage t-il concrètement de les recoudre à leur pays, non qu’il s’agisse de dévoiler les stratégies mais, à tout le moins,  d’être informé des initiatives entreprises en son nom et à son bénéfice.

Si l’équation  CNRDRE, Président par intérim et premier ministre de plein pouvoir est déjà difficile à cerner, il faudra lui ajouter  dans les jours à venir celle d’une l’Assemblée Nationale  qui, remise en selle, voudra jouer sa partition et faire entendre sa voix.
Une clarification s’impose donc en cela qu’elle contribuera à  redonner confiance à tous et même à fédérer les énergies pour atteindre les objectifs. Et ils sont nombreux : la durée de la transition dont dépendra  la fin  de la situation d’exception  actuelle, la reconstruction de la confiance entre tous les acteurs, de tous bords, le retour des populations déplacées, la survie de celles qui sont restées, la sauvegarde de la cohésion et de l’unité nationale…

Dans quinze jours comme d’un coup de baguette,  le Maliens voudraient être assurés sur tout cela  et le décompte angoissant des internautes est bien la preuve qu’ils sont inquiets de leur avenir, de leur avenir proche.

S. Elkounta

Le Républicain Mali 08/05/2012