Comité d’Experts pour la révision constitutionnelle Soumeylou cloue le bec à ses détracteurs ?

Par Décret 0015/PM-RM du 14 janvier 2019, le Premier ministre, Soumeylou
Boubèye Maïga, a mis en place le Comité d’experts pour la réforme
constitutionnelle. Ce Comité a pour mission essentielle d’élaborer l’avant-
projet de loi portant révision de la Constitution du 25 février 1992, en tenant
compte des clauses de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu
du processus d’Alger qui relèvent de la matière constitutionnelle. Il s’agit aussi
de prendre en compte les propositions pertinentes des précédentes tentatives
de révision constitutionnelle et des autres réaménagements devant être
apportés à la Constitution au regard de l’évolution du contexte institutionnel et
juridique du pays.
Ce Comité d’experts est composé d’un Président, de 11 experts et d’un personnel
d’appui constitué d’un Secrétaire et de deux chauffeurs. Le président et les experts
sont nommés par Décret du Premier ministre. Tandis que le personnel d’appui est
nommé par décision du président du Comité, après avis du Premier ministre. Et le
même jour, Soumeylou Boubèye Maïga a procédé à la nomination des membres du
Comité d’experts, par Décret N°0016/PM-RM du 14 janvier 2019. Son choix s’est
porté sur l’ancien ministre Makan Moussa Sissoko, Professeur de l’Enseignement
supérieur. Les 11 experts ont pour noms : Eloi Diarra (Professeur Agrégé de droit
public) ; Abdoulaye Coulibaly (Professeur Agrégé de droit public) ; Abdraham
Bengaly (Professeur de l’Enseignement supérieur) ; Mohamed Traoré (Professeur de
l’Enseignement supérieur) ; Bakary Camara (Professeur de l’Enseignement
Supérieur) ; Sidi Mohamed Diawara (Avocat) ; Séni Touré (Administrateur civil) ;
Fousseyni Doumbia (Maitre-Assistant) ; Mme Coumba Cheick Salah Dolo (Chargée
d’enseignement et de recherche de droit) ; Mme Diallo Kaïta Kayentao (Magistrat à la
retraite). Moins d’une semaine après leur nomination, les onze personnalités du
comité d’experts pour la révision constitutionnelle ont été reçues par le Premier
ministre Soumeylou Boubèye Maiga.
A l’issue de la rencontre, Pr Makan Moussa Sissoko a insisté sur l’instruction ferme
du président de la République et du Premier ministre d’avoir une méthode inclusive
de travail : «Nous allons rencontrer toutes les parties concernées, c’est à dire
l’ensemble de la classe politique, l’ensemble de la société civile et toutes les
institutions de la République. Toute personne susceptible d’apporter sa contribution
sera aussi accueillie pour l’écouter… Nous allons avoir une écoute attentive et très
large».
Malgré ces instructions du Premier ministre, et nonobstant les assurances données
par le président du comité, les oiseaux de mauvais augures ont eu à redire ! On se
rappelle en effet que le Front pour la Sauvegarde de la Démocratie avait fait savoir
que le Premier ministre Soumeylou Boubèye Maiga n’est pas qualifié pour mettre en
place un comité d’experts en vue de réviser la constitution. « Dans l’esprit et la lettre
de la loi fondamentale de 1992, l’initiative de toute révision constitutionnelle
appartient au Président de la République et à l’Assemblée Nationale. Dès lors, il est
inapproprié que le comité chargé de la révision de la constitution soit créé par le
Premier Ministre et rattaché à ses services », expliquait le front piloté par le chef de file de l’opposition. La coalition avait en outre fait savoir que le Premier Ministre, en
créant ce comité et en nommant ses membres sans concertations préalables, était
dans la politique du fait accompli en mettant la charrue avant les bœufs. Comme le
FSD, d’autres acteurs de la classe politique et de la société civile avaient dénoncé le
comité d’expert du Premier ministre. Ce qui est une fuite en avant, car tous savent
que pour le respect des engagements souscrits par l’État dans le cadre de l’accord
pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, des réformes
institutionnelles et politiques sont devenues un impératif. Même si, suite aux risques
de troubles orchestrés par le front anticonstitutionnel, regroupé au sein de «Antè A
bana », le Président IBK avait dû calmer les ardeurs des uns et des autres.
Dans son adresse à la nation pour annoncer le report du référendum, le président
IBk avait prévenu : « Nous devons prendre le temps de nous retrouver pour
échanger sans détour. Il me reviendra en tant que Président de la république à faire
prendre les dispositions nécessaires pour que le dialogue qui s’engagera soit inclusif
et dépassionné ». Réélu en août dernier, le Président IBK annonçait dans son
discours d’investiture, sa volonté de réengager « dans l’écoute et la concertation, les
changements institutionnels nécessaires, tout comme l’opérationnalisation des
régions nouvellement créées, chose qui permettra de rapprocher l’État du citoyen ».
Remettant la question des réformes à l’ordre du jour, lors du conseil des ministres du
20 décembre 2018, le président a instruit au Premier ministre d’engager le processus
de révision constitutionnelle et les réformes institutionnelles nécessaires dans le
cadre d’une démarche consensuelle et inclusive. Entre la prise de l’initiative de la
révision de la Constitution et la mise en œuvre de la réforme, il y a un grand fossé
que la mauvaise lecture de l’opposition FSD ne peut combler par un simple
Communiqué. En effet, nulle part, la Constitution ne dit que c’est l’initiateur qui doit
conduire, mettre en œuvre l’ensemble du processus de la révision constitutionnelle.
Pour les réformes envisagées, c’est bien le Président IBK et non son Premier
ministre qui est à la base de l’initiative.
Soumeylou fait perdre leurs langues aux frondeurs
En effet, conformément à la volonté exprimée par le Président de la République
S.E.M. Ibrahim Boubacar Keita, d’effectuer des réformes institutionnelles pour
consolider notre démocratie, le Premier Ministre Soumeylou Boubèye Maïga a
instauré par le Décret N°20/PM-RM du 17 janvier 2019, un Cadre de Concertation
national (CCN) entre le Gouvernement, les partis politiques et la société civile pour
valider les propositions du Comité des Experts. La mise en place de ce cadre
matérialise la volonté du Gouvernement d’inclure toutes les forces vives de la nation
dans le processus de révision constitutionnelle. Le Cadre de Concertation national a
pour mission de formuler des propositions au Gouvernement sur les questions qui lui
sont soumises. Le cadre sera consulté sur plusieurs grandes questions, notamment : – Les orientations à donner aux Comités d’Experts chargés de la révision
constitutionnelle ; – Les projets de textes portant création des circonscriptions
administratives et des collectivités territoriales ; – Les modifications de la loi électorale
; – Les projets de lois organiques fixant le nombre d’élus au Parlement ; – Le
chronogramme des consultations référendaires et de toutes les élections. Présidé
par le Ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, le CCN se
réunit en deux formations, une politique et l’autre technique. La formation politique
réunit les ministres, les présidents des partis politiques représentés à l’Assemblée nationale et dans les Conseils communaux ainsi que les chefs de file de la
Coordination des Mouvements de l’Azawad et de la Plateforme. Elle se réunit sur
convocation du président du CCN pour valider les travaux des experts issus des
sessions de la formation technique. La formation technique comprend les experts du
gouvernement, les partis politiques représentés dans les Conseils communaux, ceux
des organisations de la société civile et des mouvements signataires de l’Accord
pour la paix et la réconciliation issu du Processus d’Alger. Tous les partis politiques
sont concernés par le CCN, même si leur représentativité est déterminée par le
nombre de conseillers communaux et de députés dont ils disposent. La société civile
sera largement représentée dans toute sa diversité ; ses membres seront désignés
par le Forum des Organisations de la Société civile et le Conseil national de la
Société civile. L’Arrêté n°37 MATD-SG du 17 janvier 2019 du Ministre de
l’Administration Territoriale et de la Décentralisation, fixe la composition de chacune
des deux formations », note-t-on dans le communiqué du gouvernement. Qui dit
mieux ? Qui peut encore parler d’exclusion ?
Salif Diallo