Bouclier antimissile: quand l’armée sud-coréenne ne dit pas tout au président

Le président sud-coréen Moon Jae-In, lors d’un discours à Gwangju, en Corée du Sud, le 18 mai 2017 / © POOL/AFP/Archives / Kim Min-Hee
Des officiers sud-coréens ont délibérément caché des informations sensibles au nouveau président Moon Jae-In au sujet de l’arrivée de nouveaux éléments du très controversé bouclier antimissile américain, a annoncé mercredi la présidence.

Des documents présentés au nouveau président peu après son investiture étaient rédigés de façon à ne pas mentionner quatre nouveaux lance-missiles destinés au bouclier Thaad (pour « Terminal High Altitude Area Defense »).

Le déploiement du THAAD, qui doit permettre de contrer la menace nord-coréenne, a soulevé une forte opposition d’une partie de l’opinion sud-coréenne.

La Chine est furieuse car elle considère que le puissant radar du système est susceptible de réduire l’efficacité de ses propres systèmes de missiles, en permettant aux Américains de mieux les surveiller.

Deux lance-missiles ont d’ores et déjà été installés dans le comté sud-coréen de Seongju. L’existence de quatre autres lance-missiles était soupçonnée mais n’avait jamais été annoncée.

Cependant, des hauts gradés qui ont briefé la semaine dernière le conseiller à la sécurité nationale de M. Moon ont délibérément évité de mentionner les nouveaux lanceurs ou de donner leur nombre total, a déclaré le porte-parole du président.

« Ces éléments (…) figuraient dans le rapport original rédigé par un officier mais en ont ensuite été retirés par ses supérieurs », a déclaré aux journalistes le porte-parole, Yoon Young-Chan.

Il a ajouté que tous les officiers impliqués dans la rédaction de ce rapport avaient reconnu qu’il avait été expurgé pendant sa finalisation de certains éléments clés.

Le ministre de la Défense Han Min-Koo a finalement admis la présence des nouveaux lanceurs mardi quand le président l’a pressé sur le sujet lors d’une conversation téléphonique, a précisé M. Yoon.

M. Han avait été nommé par l’ex-présidente Park Geun-Hye, qui a été destituée dans un retentissant scandale de corruption. Son successeur n’a pas été désigné.

Les nouveaux lanceurs étaient arrivés en Corée du Sud avant que M. Moon ne prenne ses fonctions, et ils sont actuellement stockés sur une base militaire américaine, a précisé la présidence.

Aucune explication n’a été fournie à cette dissimulation d’informations.

M. Moon, issu du Parti démocratique (centre-gauche) s’était montré très réservé quant à l’opportunité de déployer le THAAD, un dispositif qui avait été accepté par la conservatrice Park, dont la ligne politique est beaucoup plus dure vis-à-vis de Pyongyang.

La Chine a exigé le 2 mai l’arrêt du bouclier antimissiles américain en Corée du Sud, dont Washington avait annoncé la veille la mise en service.

En réponse à ce déploiement, Pékin avait pris des mesures considérées à Séoul comme des mesures de rétorsion économique, en interdisant notamment à partir de mars les voyages de groupe chinois en Corée du Sud, ce qui a eu un très fort impact sur les recettes touristiques du Sud.

M. Moon veut suspendre le déploiement du THAAD, préconisant davantage de discussions sur le sujet, notamment au Parlement.

(©AFP / 31 mai 2017 07h39)