Après le coup d’Etat du 18 août 2020… Ce qu’exige la Transition  

 Pour de nombreux observateurs avertis de la scène politique malienne, il est souhaitable  que la Transition annoncée soit dirigée par un chef militaire, un homme de poigne de la trempe d’un dictateur. Elle permettra d’assainir et d’aseptiser, dans une certaine mesure, la gouvernance du pays.

Le coup d’Etat, quoique condamnable, appelle à la réflexion pour profiter de ce changement en vue de se relever. Pour ne plus s’écrouler de façon aussi…stupide. Car, comme le dit La Bible, « Au jour du malheur, réfléchis ».

Tirer des leçons pour ne plus s’écrouler

C’est peut-être dans cette logique que les responsables du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) annonçaient les couleurs, après ce qu’ils appellent leur « opération » du 18 août dernier. « Afin d’éviter au pays de sombrer, nous, forces patriotiques regroupées au sein du Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP), avons décidé de prendre nos responsabilités devant le peuple et devant l’histoire d’assurer la continuité de l’Etat et des services publics », a indiqué le porte-parole du CNSP, le Colonel-major Ismaël Wagué.

Et il est établi qu’en science politique, les crises majeures de gouvernance doivent être des opportunités pour le pays concerné de se relever d’aplomb et de conjurer, par des mesures appropriées, les démons ayant entraîné la chute. C’est ce qu’a fait l’Allemagne nazie pour devenir l’une des puissances mondiales. C’est ce que tente de faire aujourd’hui le Rwanda pour émerger en Afrique, après ses années sombres de tueries et de massacres…

Dans le cas du Mali, c’est presque à l’unanimité que les forces vives du pays usaient de l’euphémisme selon lequel « le pays ne se porte pas bien ».Et ce ci depuis plusieurs années. Pour dire que la gouvernance (avant l’ère IBK) était plombée par plusieurs maux comme la crise sécuritaire, économico-financière. Tout cela baignant dans un environnement gangrené par la corruption et la délinquance financière, l’injustice et l’impunité, le favoritisme et la gabegie, etc. Ces derniers maux s’étant davantage exacerbés sous le magistère d’IBK.

Ce contexte, dangereusement détérioré par les tensions sociopolitiques, sous les coups de boutoirs du mouvement M5-RFP, a été bien décrit par les militaires tombeurs d’IBK, qui ont mis l’accent sur d’autres griefs. « Le clientélisme politique, la gestion familiale des affaires de l’Etat ont fini par tuer toutes opportunités de développement, la gabegie, le vol et l’arbitraire devenus des vertus, l’éducation nationale piétinée et le secteur de la santé est au plus offrant ».

Ce diagnostic impose donc une thérapie de choc, sans état d’âme, sans aucune complaisance. Ce sera comme un médecin devant un patient dont les membres sont en état de putréfaction avancée. Il ne devra pas hésiter un seul instant à ordonner l’amputation pour ensuite guérir la plaie. Ce constat semble cadrer avec l’engagement des nouveaux hommes forts du pays. «Nous ne tenons pas au pouvoir, mais nous tenons à la stabilité́ du pays, qui nous permettra d’organiser dans des délais raisonnables consentis, des élections générales pour permettre au Mali de se doter d’institutions fortes capables de gérer au mieux notre quotidien et restaurer la confiance entre les gouvernants et les gouvernés».

Homme de poigne et de fermeté

Or, il est reconnu aux militaires une certaine poigne pour poser les fondements d’un régime susceptible de résister aux éventuels mauvais vents. Le General De Gaulle n’est-il pas le père de la Constitution française de 1958, qui régit la vie politique de ce pays depuis lors ? Malgré tout ce qu’on peut lui reprocher, Adolph Hitler n’a-t-il posé les fondements de la nouvelle Allemagne ?

Un certain nombre de raisons incitent à concevoir une Transition politique dirigée de main ferme par un militaire de compétence avérée, entouré par des patriotes, politiques et des technocrates, ayant la probité requise.

D’abord, le fait que la classe politique est discréditée depuis plusieurs années n’inspire à responsabiliser une de ces brebis pouvant se transformer en loup ravisseur ou prédateur. Sans compter que la période transitoire est celle par excellence des suspicions et des appréhensions diverses dans la marche du pays vers de nouvelles élections.

Il s’ensuit nécessairement que  le politique ou le technocrate qui se verrait confier la direction d’une transition sera l’objet des soupçons les plus grotesques sur sa proximité d’avec une chapelle politique. Ce qui peut sérieusement polluer le climat sociopolitique.

En plus, l’instinct grégaire et l’expression des sympathies politiciennes feront que le leader politico-civil de la transition sera en clin à distribuer des prébendes ou même à régler quelques comptes. Ce qui conduira à attiser des  frictions préjudiciables à la sérénité requise pour cette période.

En revanche, lorsqu’un officier supérieur vertueux (l’Armée malienne en compte) prend en main la direction de la Transition, il développe nécessairement une crainte et un respect vis-à-vis du bien public. Il pourra ainsi  activer un système judiciaire plus à même de procéder à un lavage des écuries d’Augias de divers secteur de gouvernance. Cela se fera par exemple suite à des audits dans divers départements et principalement dans les dossiers sulfureux qui avaient défrayé la chronique durant la gouvernance IBK.

A titre d’exemple, des affaires de mauvaises gestions présumées, de crimes divers ayant meublé les colonnes des journaux sous le magistère IBK pourraient facilement remises au goût du jour afin de donner un signal fort de bannissement de l’impunité. Quid de l’achat de l’avion présidentiel, du marché des équipements militaires, des avions cloués au sol, des blindés en mauvais état, de la disparition du journaliste Birama Touré, etc ? La justice pourra s’atteler sans aucun frein ou influence politique à édifier l’opinion afin que les lignes d’une nouvelle ère, celle de la redevabilité du gouvernant face aux gouvernés soient tracées dans la conscience collective.

Rétablir l’autorité de l’Etat

Par ailleurs, les militaires étant réputés hommes de terrain, le chef militaire de la transition avec son cabinet, constitué de hauts gradés et d’officiers de réputation, devra poser les jalons des prochaines textes et préalables de refondation de l’Homme malien. Quels actes de réaffirmation de l’autorité de l’Etat prendre ? Quel changement de mentalité opéré, quel message de conscientisation envoyé aux populations ? Quelles mesures fortes de sanction des cas d’incivisme prendre ? Ce sont là des pistes vers lesquelles des hommes forts du CNSP ou de l’Armée malienne en général doivent tourner leurs regards de fermeté et poigne. Et c’est cela qui favoriser l’aspiration de la majorité des populations à confier son destin à ders hommes nouveaux, pour de nouvelles espérances. Celles du « plus jamais ça ! » Bruno D. SEGBEDJI