Ansar-Dine et Mnla à Alger / La fuite en avant des rebelles maliens

Les représentants d’Ansar Dine et du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) ont convenu de « s’abstenir de toute action susceptible d’engendrer des situations de confrontation et toute forme d’hostilité dans les zones qui sont sous leur contrôle, et tout mettre en œuvre pour y faire respecter cet engagement », selon une déclaration distribuée aux journalistes. Cette déclaration lue lors d’une conférence de presse organisée à l’issue d’une réunion sous l’égide de l’Algérie ne dit pas que les groupes armés du MNLA et jihadistes d’Ansar Dine vont se retirer de ces régions occupées, encore moins renoncer à l’application de la charia dans le nord du Mali. Au contraire, ils veulent « sécuriser les zones sous leur autorité, à travers la mise en place de forces de sécurité composées des éléments de leurs groupes respectifs », selon leur déclaration.

Médiation algérienne

Les groupes armés Ansar Dine et MNLA récusent-ils le médiateur de la CEDAO, le Président burkinabé Blaise Compaoré ?  Selon une déclaration du représentant d’Ansar Dine Mohamed Ag Akharib, « il appartient maintenant au pays médiateur (l’Algérie) de fixer un calendrier des négociations. C’est un processus qu’on vient d’engager, il faut qu’on aille vite ». Cependant, il « refuse catégoriquement de renoncer à la charia », sachant bien qu’il s’agit d’un préalable pour Bamako. L’émissaire du MNLA, Bay Dikmane s’est également inscrit dans cette médiation, qu’il croit être « une opportunité pour le Mali de se remettre sur les rails et de trouver une voie pour le dialogue », alors que le 4 décembre dernier à Ouagadougou les mêmes groupes ont eu une première rencontre avec le gouvernement malien, sous la médiation de Blaise Compaoré. « … Nous demandons à l’Algérie et la communauté internationale de nous accompagner à la recherche d’une solution pacifique », a ajouté Mohamed Ag Akharib.     

Cette rencontre d’Alger vise certainement à relancer des bases de négociations pour les groupes armés qui ont dit leur disponibilité à la négociation avec les autorités maliennes de la transition. Ils se sont également engagés « à agir de manière à permettre la libération de toute personne se trouvant en état de captivité et/ou d’otage dans la zone affectée ». Mais, selon certains connaisseurs du dossier, il s’agit là d’un moyen de se poser en négociateur pour la libération des otages, ce qui est une position privilégiée pour mieux profiter des rançons exigées au pays d’origine des personnes enlevées. Ce serait une passerelle permettant de maintenir des liens solides avec Alqaida au Maghreb islamique (Aqmi) et le Mouvement pour l’unité du Jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) que la résolution 2085 vise à démanteler. Actuellement dix Européens, dont sept Français, et au moins trois otages algériens sont détenus dans cette région, par des groupes islamistes, dont Aqmi et le Mujao.     

A Bamako, les autorités maliennes se disent certes disposées au dialogue avec ces Maliens, mais indiquent des points non négociables comme  l’intégrité du territoire national, la laïcité et le caractère républicain de l’Etat. Ce qui veut dire que pour Bamako, Ansar Dine doit s’engager, comme préalable à toute négociation, à renoncer à l’application de la charia et le MNLA doit s’inscrire dans le cadre d’un Etat unitaire, sans ambigüité. La déclaration des groupes rebelles et islamistes sous l’égide de l’Algérie au lendemain du vote de la résolution 2085 qu’ils ont dénoncée à cette occasion n’est pas plus qu’une fuite en avant, parce que n’apportant rien de nouveau sinon qu’un recadrage de leur feuille de négociation. La résolution 2085, outre le déploiement des forces internationales, invite aussi  les autorités de transition à Bamako à engager des négociations « crédibles » avec les groupes présents dans le Nord.

Nouvelles amputations

Pendant ce temps, les islamistes d’Ansar Dine ont perpétré de nouvelles amputations de la main sur deux personnes à Gao, et donné des coups de fouet, au lendemain du vote de la résolution 2085 du Conseil de sécurité de l’ONU autorisant le déploiement d’une force armée internationale. Ils affirment que les amputations vont continuer en application de la charia.    

B. Daou

Le Républicain Mali 23/12/2012