Le « Kamablon » a un nouveau toit pour 7ans

Au pays des conservateurs

La cérémonie du vendredi dernier, à l’image de celle des précédents septennats,  a été organisée par les membres du clan des Keïta (descendants du fondateur de l’Empire du Mali, Soundiata Keïta) et par les griots du patronyme Diabaté, lesquels sont les détenteurs de l’histoire du Kamablon. La réfection du toit, nous apprennent les anciens, est l’occasion d’évoquer l’histoire et la culture du Mandé à travers les traditions orales. Elle permet aussi de renforcer les liens sociaux, de régler les conflits et de prédire l’avenir pour les sept ans à venir.

Les festivités  durent cinq jours. Mais pour la cérémonie proprement dite du vendredi, des jeunes âgés de 20 à 21 ans descendent l’ancienne toiture, puis posent la nouvelle sous la surveillance et la direction des anciens de la communauté, qui, à cette occasion, transmettent leurs savoirs liés à la case sacrée, à sa construction, son histoire et sa valeur symbolique. Les griots du village voisin de Kéla rendent hommage à l’occasion à Soundiata et livrent des récits de la tradition orale du Mandén.

« Il est strictement interdit de filmer ou de photographier cet événement. Profaner certains rites peut encore aujourd’hui entraîner de sévères représailles », nous préviennent les détenteurs de la tradition orale.

La réfection du Kamablon est donc un événement rituel d’une haute portée culturelle et symbolique, au cours duquel les traditions orales sont déclamées et chantées, transmettant l’histoire orale de l’Empire du Mali à ses descendants des temps modernes dans la région du Mandé. « Elle consacre la réunification des membres du clan et de la famille autour d’un symbole puissant de leur identité culturelle »,  nous explique le Pr. Drissa Diakité qui a consacré un ouvrage sur les griots du Mandé (« Kuyaté, la force du serment : Aux origines du griot mandingue », publié aux « Editons la Sahélienne ».

Patrimoine culturel à conserver

Inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO, la construction du Kamablon remonte, selon plusieurs traditions orales, vers 1653. Ce bien culturel est un édifice de plan circulaire en briques de banco. Les architectes le décrivent avec un diamètre de 4m et une hauteur 5 m. Il est recouvert d’un toit conique de chaume. Les murs, à l’intérieur et à l’extérieur sont ornés de peintures sensées prédire l’avenir du Mandé pendant les sept années suivant la réfection du toit. Le Kamablon, situé au cœur du bara (espèce de place publique réservée aux grandes cérémonies) est entouré de plusieurs biens sacrés: le puits et le figuier qui le surplombent, les fromagers, et la tombe de Massa Sèmè (fondateur et premier prêtre du Kamablon).

Le Kamablon de Kangaba est un remarquable édifice de plan circulaire qui abrite des objets et des éléments de mobilier d’une grande richesse symbolique pour la communauté et qui est utilisé comme sénat villageois.

« La communauté de Kangaba et les autorités nationales ont élaboré des mesures de sauvegarde de cet élément important, en mettant en place une législation et un programme de prise de conscience visant à encourager la transmission des savoir-faire et des connaissances aux générations futures », nous apprend Ben Kaba Koné, un ressortissant de la localité résidant à Bamako. « Depuis de nombreuses années, cette cérémonie attire de part tout les ressortissants de Kangaba et autres visiteurs pour des bénédictions », explique notre interlocuteur.  

Ce qui fera au directeur national du patrimoine culturel, Klessigué Sanogo, que la culture malinké reste encore très proche de son histoire et de ses traditions. La case sacrée de  Kamablon, dit-il, en est l’exemple ».

Issa Fakaba Sissoko

L’ Indicateur Du Renouveau 25/04/2012